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Quand les secrets du succès du Bon Coin intriguent Amazon et eBay
©THOMAS PADILLA / Leboncoin / AFP-Services

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Les leaders mondiaux du e-commerce convoitent le succès du « Bon coin » et ne comprennent pas. Cette entreprise française a l’ambition de devenir champion de l‘économie circulaire.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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« Le Bon Coin » vient de faire sauter un des freins les plus puissants à son développement en réglant la question du paiement. Jusqu’alors, les acheteurs et les vendeurs, mis en contact par la plateforme, s’arrangeaient entre eux pour assurer le paiement. D’où les problèmes de sécurité qui se multipliaient et hypothéquaient le contrat de confiance indispensable dans le e-commerce.

Le Bon coin a réglé la difficulté en rachetant une startup spécialisée dans le paiement sécurisé lors de vente de véhicules d’occasion. Cette startup n’est pas la première à passer dans le giron du groupe qui a compris que, pour aller vite, il lui fallait multiplier les acquisitions d’applications spécialisées dans le secteur des petites annonces comme A vendre à louer ou videdressing.com. 

Son projet est évidemment, à partir de son cœur de métier qui est la mise en ligne de petites annonces, d’élargir son expertise à tous les autres secteurs. 

Depuis 2006, Le Bon Coin est devenu le plus grand magasin de France.  On y trouve de tout, de l’électroménager aux animaux de compagnie, en passant par l’offre de services et l’immobilier. 1 million de nouvelles annonces sont déposées chaque jour et 28 millions de visiteurs passent par là chaque mois. Pour les spécialistes du e-commerce qui ont d’abord regardé le Bon Coin de très haut parce que le site était trop simple et pas très attirant, ils estimaient que Le Bon Coin ne serait que l’Amazon du pauvre. Cela étant, les études de marché réalisées sur la réalité sociologique des utilisateurs réfutent le fait que le site de petites annonces serait le refuge des classes populaires. Il aurait au contraire comme conséquence de recréer du lien social et un espace de solidarité nationale. 

En bref, Le Bon Coin aurait réussi à marier le e-commerce et l’économie circulaire. Pour Amazon et les autres, c’est un pied de nez dangereux à un moment où le courant anti-gaspillage, recyclage et protection de l’environnement sont aussi très puissants.

En fait, Le Bon Coin, 6ème site le plus consulté en France, derrière cinq sites américains, fonctionne parce qu’il répond à deux besoins essentiels des consommateurs : ---celui de consommer - des biens, des services - pour se nourrir et vivre et gagner de l’argent, autrement qu’en travaillant. 

- celui de raisonner et de ne pas gaspiller. Les consommateurs d’aujourd’hui sont « raisonnés : ils peuvent s'offrir un vélo neuf très cher et acheter des meubles d'occasion. Ils arbitrent. Surtout, ils ne veulent plus jeter ou stocker » explique le directeur du site. Et surtout, ça leur sert à gagner de l’argent ou du moins de ne plus en perdre. 

Ça marche aussi parce que c’est digital : et si Le Bon Coin est né via un site internet, c’est sur l’application mobile que compte maintenant l’entreprise et qui comptabilise 80% des passages. 

Le Bon Coin embrasse tous les domaines : immobilier, locations saisonnières, objets et services mais aussi offre d’emplois.

Ça fonctionne parce que son organisation privilégie le local, la proximité. Pendant longtemps, la vente d’un objet ou d’un service sur le Bon Coin se matérialisait par une rencontre physique. Parce qu’on achète et que l’on vend près de chez soi, Le Bon Coin reprend le rôle d’un commerçant de quartier d’autrefois dans les campagnes, qui pouvait délivrer du bouche à oreille et ça inspire confiance. Jacques Le Goff, historien, explique que « Le Bon Coin est au XXIe siècle ce que la foire était au Moyen Âge. À cette époque, il n’y avait pas tellement de boutiques, ni en ville ni à la campagne. Le grand centre où les gens se procuraient de tout, c’était les foires. J’analyse plutôt l’essor du Bon Coin comme une expression de la débrouillardise française. […] Le site démocratise l’acquisition de produits dont une grande partie du prix peut être liée aux intermédiaires ». 

Pour certains observateurs, c’est aussi la défiance vis à vis des institutions traditionnelles qui conduit les utilisateurs à trouver des moyens d’autonomie.  

La recette du Bon Coin est donc très simple. Antoine Jouteau, le CEO du Bon Coin explique “avoir misé sur le "freemium” : l'utilisation gratuite de nos services et des options payantes, comme de la visibilité supplémentaire. On a aussi décidé que les professionnels étaient les bienvenus sur la plateforme avec la création de services ad hoc. Enfin, nos millions de visiteurs mensuels intéressaient forcément les annonceurs... »

Depuis 13 ans, ça marche. Leboncoin.fr , est né à l’origine d’un partenariat entre une filiale du groupe Ouest-France et un éditeur norvégien Schibsted pour copier ce qui se faisait déjà ailleurs en Europe (subito.it en Italie, segundomano.es en Espagne). 

A l’heure où la grande distribution s’interroge sur son avenir, à l’heure ou le e-commerce, entrainé par le succès planétaire d’Amazon, contribue à diffuser la société de consommation , Le Bon coin s‘offre le luxe d’encourager l’économie circulaire mais aussi la « déconsommation », tout en restant totalement immergé dans l’économie de marché et la concurrence. 

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