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Quand le gouvernement veut baisser les impôts alors que les prélèvements obligatoires vont rester stables...ou quand la rhétorique hollandienne dépasse la fiction
©Pixabay

Paroles, paroles, paroles

Le 20 septembre, Michel Sapin présentait le budget prévu pour l'année 2017. Après les annonces de baisses d'impôts, le gouvernement souligne que les prélèvements obligatoires resteront stables.

Jean-Yves Archer

Jean-Yves Archer

Jean-Yves ARCHER est économiste, membre de la SEP (Société d’Économie Politique), profession libérale depuis 34 ans et ancien de l’ENA

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Atlantico : Suite aux déclarations de Michel Sapin, en ce 20 septembre, les prélèvements obligatoires français, pour l'année 2017 ; resteront au même niveau que pour l'année 2016, à 44.5% du PIB. En quoi cette déclaration peut-elle venir heurter la rhétorique de "baisse d'impôts" déployée par le gouvernement au cours de cette rentrée ?

Jean-Yves Archer : En matière budgétaire, le Gouvernement ne manque pas d'être actif du fait des promesses et engagements présidentiels : sur l'impôt sur le revenu, sur le coût accru du pacte de sécurité issu de la menace terroriste hélas mensuellement confirmée.

Certains chiffrages évaluent à près de 10 milliards le coût total du dérapage budgétaire. Dans les rangs des sénateurs socialistes, on évoque un peu plus de six milliards. Dès lors, on ne peut être que fort surpris par l'affirmation ministérielle, répétée à de nombreuses reprises, selon laquelle le taux de prélèvements obligatoires resterait stable à hauteur de 44,5% du PIB. Il y a un vrai hiatus entre la dynamique des flux budgétaires récents et cette affirmation qui parait d'autant plus péremptoire et hasardeuse que les baisses des dépenses publiques programmées ne semblent pas devoir être tenues.

Nous savons tous que la baisse de 50 milliards sur 3 ans ne sera pas honorée. On voit mal, dans ce contexte politico-social, comment 5 à 8 milliards additionnels de baisse pourrait se matérialiser. La réalité est simple à décrire même si elle est peu " rose " pour le contribuable. D'un côté, le Gouvernement agit " sur toutes les ficelles pour différer les dépenses " (Jacques Attali sur LCI, interview d'Yves Calvi). D'un autre côté, le Gouvernement continue de nier l'impact du tassement de la croissance et persiste à annoncer que la France parviendra à 1,5% en 2016 en se gardant bien de nous dire, de nous expliciter, le poids tendanciel de la dépense publique dans le PIB. On a quand même le droit de préférer un pays qui vend des locomotives à Belfort plutôt que des commandes publiques de gaz lacrymogènes !

En clair, il y a croissance et croissance et il faut se garder d'une lecture trop rapide de ce paramètre fondamental.

Depuis deux ans et demi, le Gouvernement agite le hochet des baisses d'impôts pour tenter de gommer le dérapage des comptes publics que le taux global d'endettement révèle.

Alors qu'en août dernier, Manuel Valls avait pu indiquer que la gauche européenne devait se faire entendre davantage sur "l'assouplissement des règles du Pacte de stabilité", c'est à dire sur le respect de la règle des 3%, Michel Sapin a pu indiquer que le déficit serait de 2.7% pour l'année 2017. Faut-il mettre en doute les chiffres avancés par le ministère ? Existe-t-il certaines zones d'ombre concernant les chiffres avancés ?

Les chiffres avancés en matière de déficit ne passeront pas le crible de l'avenir. Dans deux ans (délai de certification des comptes nationaux), il est patent que le pays ne sera pas en-deçà des 3%. Une publication (cette semaine) de l'UNEDIC rapporte que le nombre de chômeurs à indemniser repartira à la hausse en 2017 par rapport à celui de 2016. Il faut hélas être lucide et convenir que la reprise a été timide et est désormais fortement en question. Même les instituts crédibles prévoient une croissance allemande ralentie d'ici à la fin de l'année. Dès lors, la pression sur les dépenses publiques (budgétaires et sociales) n'est pas dans une configuration molle.

Ce qui est certain, c'est que la formation d'origine mathématique du Secrétaire d'État Christian Eckert lui est bien utile pour examiner les charges qui peuvent être imputées en engagements hors bilan (pour un total cumulé par toutes les majorités de 3250 milliards d'euros) et ainsi sorties du déficit au sens de Maastricht. On peut saluer l'équipe de virtuoses sans omettre que demain sera difficile pour la nouvelle équipe présidentielle. Par-delà sa couleur et ses options fondamentales.

Plus Globalement, est-il possible de dresser un bilan de l'action budgétaire du gouvernement, entre promesses de campagnes et respect des règles européennes relatives aux déficits ?

Comme pourrait le répéter Daniel Cohn-Bendit ou le député Charles-Amédée de Courson, le Président Hollande, en 2012, a voulu jouer " au bon élève " (sic) en essayant de redresser le cap des finances publiques et d'approcher le chiffre des 3% de déficit.

Pour y parvenir, il a massivement utilisé la matraque fiscale et a sous-estimé la théorie du multiplicateur : autrement dit, l'impact réel de ces hausses d'impôt sur la croissance et sur la confiance des agents économiques.

Nous connaissons par cœur les déclarations ubuesques de Jean-Marc Ayrault sur l'avenir économique de notre pays. La promesse de campagne d'aligner la fiscalité de l'épargne sur celle du travail a découragé bien des épargnants et induit un sérieux exil fiscal. Parallèlement, comme le démontre parfois avec justesse Arnaud Montebourg, cette purge a accéléré la désindustrialisation de notre pays.

Une chose est simple autant que certaine : la dette représente désormais près de 100% du PIB (ce qui n'est pas un indicateur de bonne gestion quinquennale) et lorsque les taux ne manqueront pas de remonter, la France aura à se tourner encore davantage vers ses contribuables ou revisiter son dialogue avec Bruxelles. Dans les deux hypothèses, le quinquennat budgétaire de François Hollande sera bel et bien un panier d'oursins. Les virtuoses ne sont pas vertueux dans le cas présent....

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