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Pourquoi les opérateurs 
de téléphonie mobile ont-ils 
tant de mal à appliquer le droit 
européen de la concurrence 
et de la consommation ?
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C'est pas du jeu !

UFC-Que Choisir a mis en lumière des clauses abusives dans les contrats "illimités" de dix opérateurs de téléphonie français. Et ce n'est pas la première fois qu'ils se font épingler pour entorse au droit de la concurrence.

Paul Nihoul

Paul Nihoul

Paul Nihoul est professeur à l'Université de Louvain en Belgique. Ses activités portent sur la construction européenne, sur la concurrence et sur la consommation. Une chaire Jean Monnet lui a été attribuée ad personam  par la Commission européenne. Il a étudié le droit à l'Université de Louvain et à la Harvard Law School (USA).

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Atlantico : Les opérateurs de téléphonie mobile français ont été épinglés une nouvelle fois - par l'association de consommateurs UFC-Que Choisir ce coup-ci - pour clauses de contrat abusives. Ils ont auparavant été condamnés plusieurs fois pour ententes et accords. Pourquoi dans le secteur de la téléphonie des entorses sont si souvent faites au droit de la concurrence européen ?

Paul Nihoul : Ce sont deux problèmes distincts. D'une part, des opérateurs se sont mis d'accord, dans le passé, pour fixer les prix. Cela constitue une entente contraire au droit de la concurrence - en France et en Europe. D'autre part, un certain nombre de ces opérateurs proposent à leurs clients des contrats déséquilibrés. Dans ces contrats, les obligations pesant sur les clients sont excessives au regard de celles qu'acceptent les opérateurs pour eux-mêmes. Ce problème concerne, lui, plutôt, le droit de la consommation.

Les deux problèmes peuvent-ils toutefois être liés?

Les problèmes concernent des divisions distinctes au sein des entreprises. Pour les ententes, ce sont sans doute des commerciaux qui ont commis la faute. Pour les clauses abusives, c'est la division chargée des questions juridiques. Au-delà de ces divisions de responsabilité, le problème reste le même : il est impératif que ces opérateurs se conforment à la loi, à toutes les lois. 

Le secteur de la téléphonie est-il celui ou les entorses sont le plus fréquentes ? 

Non, loin de là. Il y a des ententes et des clauses abusives dans tous les secteurs. Mais la téléphonie est sans doute un secteur où les problèmes sont particulièrement visibles, parce qu'ils concernent un grand nombre de clients et la compétition y est plus intense.

Il y a-t-il des sanctions spécifiques prévues par le droit communautaire pour les entreprises dont les infractions sont trop récurrentes ?

En droit de la concurrence, oui. Si les opérateurs s'engagent dans une nouvelle entente, cela leur couterait très cher. Mais, comme je l'ai indiqué, il s'agit ici d'une infraction différente. On n'en tient pas compte pour déterminer la sanction. Dans le cas des clauses abusives, la sanction est essentiellement la nullité de la clause. Le consommateur n'est pas tenu de respecter les clauses dites abusives. 


Les ententes et les clauses abusives dans le secteur mobile ont été mises en lumière par UFC Que choisir. Que pensez-vous du rôle joué par cette association?

C'est un rôle essentiel. Pas tellement dans le droit de la concurrence, où la France dispose d'une excellente autorité. Mais plutôt dans les contrats avec les consommateurs. Seul, un consommateur est bien faible si un opérateur dirige contre lui sa force juridique en cas de litige. L'intervention d'UFC permet de mutualiser les forces des consommateurs.

Le droit européen de la concurrence mériterait-il d'être renforcé afin de pouvoir mieux protéger le consommateur ?

C'est surtout le droit de la consommation qui doit être renforcé. Il faut des agences chargées de dépister les problèmes et astreignant les entreprises à se conformer à la loi.

Propos recueillis par Priscilla Romain

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