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Pourquoi les grosses voitures électriques polluent plus que les petites voitures à essence
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Voitures électriques

La voiture électrique, meilleure alliée de l'environnement ? Pas toujours... Si rouler en Tesla ne produit pas de CO2, la construction des batteries et la production d'énergie sont parfois loin d'être propres. Entre la production de lithium ou de cobalt, et le rechargement des voitures avec des centrales à charbon, essence ou gaz, il faut revoir les systèmes de bonus/malus pour réorienter toute une filière en expansion.

Laurent  Meillaud

Laurent Meillaud

Laurent Meillaud est journaliste, écrivain et consultant spécialisé dans l'automobile et les nouvelles technologies. Il anime le blog Voitures du Futur.

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Sur les dispositifs de bonus écologiques et autres vignettes

L'erreur historique du Grenelle de l'Environnement est d'avoir basé uniquement le bonus écologique sur le CO2. C'est la raison pour laquelle les pouvoirs publics ont fait monter si haut la part du Diesel, qui a été forcément privilégié puisqu'il rejette 15 à 20 % de CO2 en moins par rapport à l'essence. Et en plus, des modèles sans filtres à particules ont bénéficié de bonus à l'époque. Je note d'ailleurs que les Verts n'ont rien fait pour changer la règle quand François Hollande est arrivé au pouvoir et a prolongé le dispositif, ce qui montre au passage que les donneurs de leçons ne sont pas forcément les mieux placés.

Paradoxalement, on applique la même règle aujourd'hui en se basant sur le CO2 pour le malus, ce qui a pour effet de faire payer plus aux français qui ont fait l'effort de passer à des véhicules à essence au lieu du Diesel, notamment sur des monospaces ou de grandes berlines ! A la limite, la vignette Crit'Air est plus juste, même s'il est scandaleux que les moteurs Diesel Euro 6 ne puissent pas prétendre à la catégorie 1, alors qu'on attribue cette même catégorie aux véhicules essence Euro 6 qui rejettent des particules.

Les élus de grandes villes et certains pays, jusqu'à la Commission Européenne font la même erreur en faisant une analyse à courte vue et en ne regardant que les émissions de CO2 en sortie. Certes, une voiture électrique ne rejette pas de particules (sauf celles issues de ses plaquettes et disques de freins). Mais, elle pollue aussi, à sa manière. Un véhicule électrique impacte l'environnement en raison de l'énergie qu'il faut pour le produire, mais aussi en raison du lithium (demain pour le cobalt) qu'il faut extraire pour l'intégrer dans les batteries. Précisons au passage que tous les constructeurs de la terre sont dépendants de cellules lithium-on qui viennent d'Asie. L'autre aspect à prendre en compte est l'origine du courant électrique (est-il vertueux quand il vient du nucléaire qui génère des déchets, ou quand les centrales sont alimentées par du charbon, voire du fioul à Porcheville aux portes de Paris ?) et enfin l'énergie nécessaire à la déconstruction.

La batterie présente cependant un avantage, c'est qu'elle peut connaître une seconde vie et servir dans un bâtiment avant d'être recyclée. La question qui n'est jamais posée est celle de la capacité du réseau électrique à absorber des volumes importants de véhicules électriques, notamment quand ils feront de la recharge rapide. Quand on sait que RTE prévient déjà des risques de coupure cet hiver, alors qu'on ne dénombre qu'un peu plus de 100 000 véhicules en circulation, on devrait y réfléchir à deux fois.

Peut-on fabriquer une voiture sans émettre de CO2 ?

Non, évidemment. Quelle que soit la motorisation, l'analyse du puits à la roue induit forcément une dépense d'énergie. Par contre, certains constructeurs essaient de raisonner autrement. C'est le cas d'Audi, qui a investi dans une centrale de méthanisation. Le constructeur récupère l'énergie issue des éoliennes et la transforme en hydrogène, puis en méthane qui va ensuite alimenter des voitures au GNV, avec un gaz vert puisque d'origine renouvelable. Si les investissements des industriels étaient pris en compte, pour le gaz comme pour les futurs carburants de synthèse, le calcul des émissions de CO2 serait différent. Un autre exemple : savez-vous qu'un véhicule au gaz naturel rejette 20 % de CO2 en moins et pas du tout de particules ? Et s'il roule avec du biométhane, issu par exemple de la valorisation de déchets, ses émissions du puits à la roue passent alors à... 5 grammes de CO2 par km ! Et ça, on peut le faire localement avec le concours des agriculteurs, au lieu d'acheter de la technologie chinoise, coréenne ou japonaise. De la même façon, on devrait s'intéresser aussi à l'hydrogène, car on a la chance d'avoir en France des acteurs qui maîtrisent toute la chaîne, y compris pour un mode de production plus écologique avec des électrolyseurs.

Le Financial Times explique qu'il est préférable pour l'environnement de conduire une petite voiture à essence qu'une grosse voiture électrique dans le mid-west américain, à cause d'un mix énergétique dominé par les énergies fossiles.

Une étude du MIT dit aussi qu'un voiture à essence est plus vertueuse sur le cycle de vie en matière de CO2 qu'une Tesla Model S. Le choix de la motorisation dépend de l'usage. Quelqu'un qui fait de grandes distances sur autoroute a tout intérêt à continuer à rouler au Diesel. A l'inverse, une personne qui fait peu de km au quotidien devrait plutôt prendre une voiture à essence, et si elle fait essentiellement de la ville, une hybride ou une électrique. Il faut surtout arrêter de faire croire qu''il n'existe qu'une seule solution qui serait l'électrique. Ce n'est pas aux politiques de dicter les solutions, surtout quand ces prises de parole sont en fait des postures pour occuper l'espace médiatique. L'intelligence (des ingénieurs) est préférable au sectarisme et à l'incompétence.

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