Plus de contaminations = plus de variants, plus de variants = plus de contaminations : faut-il nous résigner au cercle vicieux du Covid ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Santé
Pourrions-nous essayer de faire mieux dans le cadre de la lutte contre le Covid-19 malgré tout ?
Pourrions-nous essayer de faire mieux dans le cadre de la lutte contre le Covid-19 malgré tout ?
©JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP

Lutte contre la 7e vague

Lors de son intervention du 14 juillet, Emmanuel Macron s’est réjoui que nous ayons su réagir à la septième vague de la pandémie. Pourrions-nous, et peut-être même devrions-nous, essayer de faire mieux malgré tout ?

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

Voir la bio »

Atlantico : A quel point sommes-nous actuellement dans un cercle vicieux hausse des contaminations - apparition de nouveaux variants (plus de contaminations = plus de variants, plus de variants = plus de contaminations )?

Antoine Flahault : Nos autorités ne qualifieraient probablement pas la situation actuelle du Covid comme relevant d’un cercle vicieux. Au contraire, nous sommes arrivés à une forme d’équilibre épidémiologique qui semble laisser les pouvoirs publics satisfaits un peu partout en Europe. C’est un peu effarant cependant de voir les gouvernements de nombreux pays sembler se contenter d’une situation qui génère une nouvelle vague pandémique tous les trois mois avec son lot d’absentéisme pour Covid, d’hospitalisations, de décès et de Covid longs, sans qu’ils semblent s’en soucier davantage. Les autorités européennes affichent même leur satisfaction vis-à-vis de la gestion de ce qu’elles définissent comme la nouvelle stratégie du “vivre avec”, et c’est à peu près la situation de tous les pays d’Europe de l’ouest actuellement.De nouveaux variants émergent dans un monde globalisé qui les font tourner avec une rapidité accrue puisqu’aucune mesure n’est prise aujourd’hui pour tenter d’en ralentir l’entrée sur le territoire européen, puis la progression et la diffusion. Ces nouveaux variants sont sélectionnés par le processus évolutif de la pandémie parce qu’ils sont plus transmissibles, ou parce qu’ils échappent à l’immunité laissée par les variants précédents, ou parce qu’un peu des deux phénomènes se conjuguent. Tout cela conduit à de nouvelles vagues qui contaminent une large proportion de la population plusieurs fois par an. C’est une situation épidémiologique totalement inédite, sans que l’on sache très bien les conséquences sanitaires de ces infections à répétition par le Sars Cov 2.

À Lire Aussi

BA 2.12.1, BA.4 et BA.5 : tout ce qu’il faut savoir sur les sous-variants les plus contagieux d’Omicron

Le Covid et notamment ses sous variants actuels sont-ils particulièrement propices à nourrir cette tendance ? 

Cette pandémie nous a surtout révélé à quel point nos connaissances en matière d’immunologie étaient parcellaires et pauvres. Nous découvrons les mécanismes qui conduisent à l’immunité humorale, ceux qui conduisent à l’immunité à médiation cellulaire. Nous apprenons l’existence de variants passant sous les radars de l’immunité, comme Omicron. Nous découvrons que des vaccins peuvent être efficaces contre les formes graves de Covid-19 sans être capables d’en freiner la transmission ni d’empêcher de nouvelles vagues de survenir. Nous n’avons pas terminé de comprendre la virologie, l’immunologie et l’épidémiologie du Sars Cov 2 et du Covid-19 qu’il entraîne.

Lors de son intervention du 14 juillet, Emmanuel Macron s’est réjouit que nous ayons su réagir à la septième vague de la pandémie. Pourrions-nous, et peut-être même, devrions-nous essayer de faire mieux malgré tout ? Sur quels points pouvons-nous travailler ?

Nous pouvons nous réjouir légitimement de ne plus avoir à imposer à la population des mesures drastiques comme celles qui ont dû être mises en œuvre avant l’ère des vaccins. Nous ne redoutons plus les confinements, les couvre-feux et les quarantaines comme en 2020. Mais nous ne pouvons pas nous réjouir de constater que les contaminations qui sont montées à un très haut niveau en Europe au cœur de notre été 2022 aient conduit à une augmentation très notable des hospitalisations et à une augmentation parallèle des décès dont la France et d'autres pays européens n’avaient pas encore atteint le pic au 20 juillet. Nous ne pouvons pas nous réjouir de ces vagues à répétition alors que plus de 80% de la population est doublement vaccinée, une grande part triplement vaccinée et une part substantielle quadruplement vaccinée.Les gouvernements actuels en Europe sont ceux qui ont permis de sortir de la phase moyenâgeuse du Covid-19, celle des confinements, couvre-feux et quarantaines dans laquelle sont encore englués les autorités chinoises faute d’avoir su vacciner suffisamment leurs aînés. Mais les gouvernements européens sont aussi ceux qui n’arrivent pas à faire sortir leur population de vagues pandémiques à répétition engendrant une tension hospitalière chronique et dévastatrice sur le plan de la gestion humaine des personnels soignants. Ces gouvernements sont aussi ceux ayant permis au Covid-19 de devenir et rester l’une des toutes premières causes de mortalité depuis 2020.Les conséquences à long terme des infections à répétition par le Sars Cov 2 sont encore mal évaluées mais certains redoutent que les Covid longs deviennent un vrai problème de santé publique à moyen terme.

À Lire Aussi

Vaccination Covid : la France accumule les trous dans la raquette

Comment tenter de sortir de ce cercle vicieux ? Quelles sont les stratégies à mettre en place ?

Pour tenter de sortir de cette impasse dans laquelle nous semblons installés avec la pandémie de Covid-19, il faudrait déjà sortir de la stratégie du “tout vaccinal”. Certes la couverture vaccinale doit continuer à être maintenue à un très haut niveau qui protège la société de la surcharge hospitalière et de grands excès de mortalité, mais ce n’est visiblement pas suffisant. Il conviendrait d’ajouter à la très forte couverture vaccinale, un véritable plan “Ventilation” qui manque encore un peu partout en Europe et qui permettrait d’améliorer substantiellement la qualité de l’air intérieur, celui où l’on se contamine avec le Sars-cov-2. Il conviendrait aussi de recommander de manière plus efficace le port du masque FFP2 en lieux clos, mal ventilés qui reçoivent du public à chaque fois que l’incidence dépasse un certain seuil. Lors de l’arrivée de nouvelles vagues, la promotion du télétravail, l’incitation au testing et à l’isolement des personnes infectées réduirait la circulation du virus, y compris aux frontières de l’Europe. Il faut par ailleurs traiter précocement les personnes les plus vulnérables avec des antiviraux efficaces pour leur éviter des formes graves, des hospitalisations et des décès. Bref, il faut cesser d’accepter de vivre avec une trop forte circulation virale. Il faut se conduire avec le Covid-19 comme on le fait avec le VIH, c’est-à-dire tout faire pour minimiser la circulation du virus sans jamais la banaliser. Enfin, il conviendrait de refonder la veille sanitaire pour la rendre plus fiable, plus précise et plus apte à éclairer les politiques publiques en matière de Covid-19 et plus généralement de viroses respiratoires. 

À Lire Aussi

Être contaminé par le Covid tous les mois ? Ce que l’on sait désormais des réinfections

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !