SOS Travail ! On a oublié que la production de richesses reposait sur lui, pas sur les réserves de changes (partie 3)<!-- --> | Atlantico.fr
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Dans les pays à monnaie de réserve la capacité de l'économie à garantir la dette s'est amoindrie par la sous-compétitivité du travail domestique.
Dans les pays à monnaie de réserve la capacité de l'économie à garantir la dette s'est amoindrie par la sous-compétitivité du travail domestique.
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Chômage for ever ?

Les réserves mondiales en dollars et les réserves de change allemande ou chinoise ne font que perturber le fonctionnement de l’économie mondiale puisque cet argent est soustrait aux circuits de financement potentiels d’une relance mondiale.

Pierre  Sarton du Jonchay

Pierre Sarton du Jonchay

Pierre Sarton du Jonchay est consultant en économie de la décision et en organisation financière depuis novembre 2008.

Il est l'auteur de l'ouvrage, Capital, crédit et monnaie dans la mondialisation, économie de vérité, L'Harmattan, Paris. paru en février 2011.

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La politique de change des orientaux s'est emboitée dans la politique financière des États-Unis dès 1945 puis de l'Europe ultérieurement. Les dépôts étrangers en dollars, euros ou livres sterling ont remplacé les exportations de travail étatsunien ou européen. Ainsi les États-Unis doivent-il plus que l'intégralité de leur production annuelle de biens et services dans les réserves mondiales accumulées en dollar.

Entre des zones monétaires différentes, la comptabilité des réserves de change passe par les banques. Les 3000 milliards de réserves inscrites en yuan dans les banques en Chine sont déposées en dollar et en euro dans les filiales occidentales des banques internationales. La contrevaleur en dollar et en euro des dépôts des Chinois est replacée auprès d'emprunteurs publics et privés.

Les réserves de change internationales provoquent mécaniquement des dettes et des crédits bancaires. Mais il n'existe pas de régulation mondiale de la croissance des dettes selon la capacité globale des emprunteurs à rembourser leurs crédits. Les États ne négocient pas entre eux des parités de change qui évitent la croissance excessive des excédents commerciaux contre les déficits commerciaux.

L'accumulation de réserves de change est la cause et le symptôme de la chute irrémédiable du système bancaire international appuyé sur le dollar. Les banques internationales ont dû prêter à des emprunteurs de moins en moins solvables les liquidités déposées dans leurs comptes. La Fed et la BCE sont obligées d'émettre de la monnaie contre des titres de dette publique ou privée dont le prix de marché est de plus en plus décoté par rapport au prix nominal en monnaie.

Dans les pays à monnaie de réserve la capacité de l'économie à garantir la dette s'est amoindrie par la sous-compétitivité du travail domestique. A niveau égal de qualification et de productivité les investissements vont aux pays où le taux de change de la monnaie rend le travail moins cher. La persistance d'exportations excédentaires entraîne alors une consommation et une élévation du niveau de vie moins rapide que la production.

La consommation allemande ou chinoise ne relance pas la croissance mondiale qui rétablirait la solvabilité des pays surendettés

Les Allemands et les Chinois ne consomment pas les excédents commerciaux accumulés sur le reste de l'Europe et du monde. Depuis 1945, le monde a financé une croissance partiellement fictive sur des pertes de production en l'absence de règle économique d'équilibre des changes. Le prix du travail aux États-Unis et en Europe a été surestimé par le taux de change du dollar et de l'euro. La dette a financé un sous-emploi croissant du travail par l'insuffisance des revenus distribués aux salariés.

L'inégalité de statut des monnaies dans les échanges internationaux provoque un surplus mondial de l'offre sur la demande de travail. Les dettes non remboursables des pays où le travail est monétairement trop cher représentent les salaires non versés dans les pays où le travail n'est pas rémunéré à la hauteur de ce qu'il produit réellement. La consommation allemande ou chinoise ne relance pas la croissance mondiale qui rétablirait la solvabilité des pays surendettés.

La crise de 2007 n'a pas seulement révélé les pertes cachées des banques mais la destruction de l'économie de production par la dette internationale non régulée. Garants en dernier ressort des banques, les États sombrent également dans le surendettement à commencer par les États-Unis. En 2011, l'économie mondiale se fige.

L'effondrement des revenus dans les pays où la monnaie est surévaluée provoque l'effondrement des anticipations d'exportations des pays où la monnaie est sous-évaluée. Le défaut est systémique : les acteurs internationaux du système s'interdisent de dévaluer les monnaies de réserve pour ne pas ruiner les pays ayant accumulé des réserves de change. La Chine s'oblige à prêter aux États-Unis pour ne pas perdre ses avoirs en dollar.

Et sans dévaluation des monnaies de réserve, le chômage et la baisse des revenus du travail aggravera l'insolvabilité des débiteurs obligés au remboursement d'urgence des dettes en cours. L'effondrement inéluctable d'un système monétaire international fondé sur des monnaies de réserve nationales a été analysé par Keynes à propos de la livre sterling dans l'entre-deux-guerres.

Changer le modèle de représentation des monnaies

Pour créer les conditions du plein emploi du travail et de l'équilibre des revenus de la production réelle entre les salariés, les entrepreneurs et les épargnants, Keynes avait proposé en 1944 que les dettes internationales soient contractées dans une monnaie mondiale négociée à égalité de responsabilité entre les États.

Si la communauté internationale décide de convertir l'actuelle unité de compte du FMI en monnaie de compensation des dettes internationales, les réserves de change peuvent être immédiatement converties en DTS (Droit de Tirage Spécial du FMI). Le dollar, l'euro, le yen et la livre peuvent être dévalués en DTS pendant que le yuan chinois reste stable.

Le rééquilibrage mondial des prix du travail redistribue les revenus de la production au bénéfice des pays exportateurs. Et il remet au travail les pays surendettés. Le marché des changes en DTS fixerait la parité des monnaies nationales au niveau où le prix du travail d'un pays lui permet d'exporter les biens et services qui remboursent ses dettes. Tant que le travail n'est pas reconnu comme cause de la production de richesse, l'accumulation de monnaie détruit l'économie.

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