Petit portrait idéologique de LR à travers le choix des candidats du parti pour les européennes<!-- --> | Atlantico.fr
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Jeune céréalière dans le Tarn, Céline Imart a été désignée numéro 2 derrière François-Xavier Bellamy sur la liste des Républicains pour les élections européennes.
Jeune céréalière dans le Tarn, Céline Imart a été désignée numéro 2 derrière François-Xavier Bellamy sur la liste des Républicains pour les élections européennes.
©Matthieu RONDEL / AFP

Dans quel état errent-ils ?

Les Républicains ont dévoilé leur liste pour les élections européennes de juin prochain.

Guillaume Bernard

Guillaume Bernard

Guillaume Bernard, docteur et habilité à diriger des recherches en histoire des institutions et des idées politiques, est maître de conférences à l'ICES (Institut Catholique d'Études Supérieures).

Il enseigne ou a enseigné dans divers autres établissements comme Sciences-Po Paris. Il a rédigé ou codirigé un certain nombre d'ouvrages scientifiques parmi lesquels Dictionnaire de la politique et de l'administration (PUF, 2011) et Introduction à l'histoire du droit et des institutions (Studyrama, 2éd., 2011), ou destinés au grand public, dont L'instruction civique pour les nuls (First, 2e éd., 2015). Il est également l'auteur de La guerre à droite aura bien lieu, (Desclée de Brouwer, 2016).

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Atlantico : Les Républicains ont dévoilé leur liste pour les élections européennes de juin prochain. Que nous apprend cette dernière sur la ligne de politique du parti ? 

Guillaume Bernard : Pour composer une liste destinée à se présenter à une élection au scrutin proportionnel à un tour, il faut résoudre la quadrature du cercle : combiner les divers clans au sein du parti tout en donnant une coloration dominante dans le but de capter un principal segment électoral car, aujourd’hui, LR n’en est plus à essayer de ratisser le plus large possible quitte à en faire pâtir la cohérence. Il leur serait difficile de l’avouer, mais il existe un réel risque pour LR, comme d’ailleurs pour Reconquête!, de ne pas passer, le 9 juin prochain, la barre des 5 % des suffrages exprimés permettant d’avoir des élus au Parlement européen. En effet, leurs scores potentiels donnés par les sondages (entre 6 et 8 %) doivent être lus en intégrant les marges d’erreur.

Certes, LR a un tissu important d’élus locaux, ce qui n’est pas le cas de Reconquête!, qui devront remettre leurs mandats en jeu en 2026 pour les communes et 2028 dans les départements et les régions. Mais, c’est bien la cohésion et peut-être même la survie du parti qui est en jeu. Car une organisation qui n’est pas, plusieurs fois de suite, en capacité de se hisser au second tour d’une présidentielle est une force politique de second rang. Les noms des candidats annoncés en tête de liste – ceux qui peuvent espérer être élus – semblent indiquer un choix pour un positionnement explicitement à droite. Il est vraisemblable que LR cherche à se distinguer de la « grande coalition » des modérés dont l’espace politique se réduit et dont la pérennité est sujette à caution dans la mesure où, a priori, Emmanuel Macron ne pourra pas être candidat en 2027 et risque donc de se diviser. Dès lors, LR espère survivre en 2024 lors des européennes puis rebondir en 2026 à l’occasion des municipales et, sur cette base, reprendre une partie de l’espace politique de la macronie.

Avec un penseur de la droite (François-Xavier Bellamy), une agricultrice (Céline Imart) et un militaire (le général Christophe Gomart), est-ce que LR cherche à parler d’abord à son électorat traditionnel et conservateur ? 

C’est plus qu’explicite. Au-delà du discours, la vie politique est faite aussi de symboles. Dans ces conditions, la liste combine de nouvelles têtes et des caciques de la politique et cherche à juxtaposer divers pedigrees susceptibles de canaliser différentes catégories d’électeurs tant d’un point de vue sociologique que géographique. Cependant, ce type d’alchimie ne fonctionne vraiment que si, d’une part, la juxtaposition n’apparait pas comme trop artificielle, autrement dit que la campagne soit mue par un véritable dynamisme et si, d’autre part, il n’y a pas trop de différence de participation entre les différentes catégories socio-professionnelles visées. En outre, cela témoigne d’une certaine fébrilité : la volonté de s’adresser à un électorat dit déterminé (ou captif) plus que de chercher à capter un l’électorat flottant voire abstentionniste. LR n’est évidemment pas le seul parti dans ce cas.

Des figures historiques du parti ont réussi à conserver leur place en positions éligibles : Nadine Morano et Brice Hortefeux. Est-ce que cela veut dire que malgré un rapprochement entre Nicolas Sarkozy et Emmanuel Macron, la ligne de l’ancien chef de l’État conserve du poids dans l’appareil des Républicains ? 

C’est moins le « sarkozysme » tel qu’il est devenu que ce qu’il en reste de légendaire dans les mémoires (la droite décomplexée de la campagne de 2007 avec la « ligne Buisson ») qui est, vraisemblablement, surtout exploitée aujourd’hui. Et, ce, dans le but de limiter l’hémorragie des électeurs vers Reconquête! et le RN. En effet, d’après les enquêtes d’opinion, si 15 % environ de l’électorat de Valérie Pécresse de 2022 envisagerait de voter au centre et à gauche pour les européennes de 2024, ce n’est le cas que de moins de 5 % de l’électorat s’étant prononcé en faveur de la liste menée par François-Xavier Bellamy en 2019. Autrement dit, un positionnement identifié comme de droite semble plus efficace pour cristalliser l’électorat qu’un glissement vers le centre-droit. Car, c’est bien plus vers sa droite que vers sa gauche que l’électorat LR envisagerait de se reporter s’il modifie son vote : presque 25 % pourrait basculer vers Reconquête! et le RN, un tiers pour le premier, deux-tiers au bénéfice du second.

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