Passe vaccinal : que deviennent les données personnelles collectées par l’Etat, la SNCF, etc… depuis les débuts de la pandémie ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Contrôle du passe sanitaire à l'entrée d'un cinéma à Montpellier, 29 juillet 2021.
Contrôle du passe sanitaire à l'entrée d'un cinéma à Montpellier, 29 juillet 2021.
©PASCAL GUYOT / AFP

Vie privée et libertés publiques

Le projet de passe vaccinal prévoit la possibilité de contrôles d’identité. Que deviendront les données recueillies et que deviennent celles qui le sont déjà à l’occasion notamment des trajets en train ?

Parti Pirate

Parti Pirate

Le Parti Pirate est un mouvement politique international ralliant celles et ceux qui aspirent à une société capable de : Partager fraternellement les savoirs culturels et scientifiques de l’humanité ; Protéger l’égalité des droits des citoyens grâce des institutions humaines et transparentes ; Défendre les libertés fondamentales sur Internet comme dans la vie quotidienne.

En France, le Parti Pirate, constitué en association loi 1901, est un parti politique animé par près de 900 adhérents et plusieurs milliers de sympathisants, qui ambitionne de réhabiliter la politique en réaffirmant les valeurs des droits de l’Homme et de Liberté, d’Égalité et de Fraternité.

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Pierre Beyssac

Pierre Beyssac

Pierre Beyssac est Porte-parole du Parti Pirate

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Atlantico : Le projet de passe vaccinal prévoit la possibilité pour des acteurs non assermentés comme les restaurateurs ou les contrôleurs de train de réaliser des contrôles d’identité. Quels peuvent être les risques d’une telle démarche ? Qu’est-ce qui changerait par rapport à la situation actuelle ?

Parti Pirate, Pierre Beyssac : Les restaurateurs se permettaient déjà de contrôler des papiers d'identité pour éviter les chèques impayés. Quant aux contrôleurs, les conditions de vente des billets électroniques leur permettent déjà de demander une preuve d'identité. Ces situations de contrôle d'identité ne sont évidemment pas souhaitables, mais le passe vaccinal ne change pas profondément la donne.

Pour acheter un billet de train, il faut renseigner certains éléments personnels comme son adresse mail, mais aussi sa date de naissance ou son numéro de téléphone. Où sont conservées ce genre de données ? Des dispositifs juridiques encadrent-ils leur stockage et leur utilisation ? Ces dispositifs ont-ils évolué dans le temps ?

Le RGPD (Règlement général pour la protection des données), règlement européen en grande partie inspiré de la loi française informatique et libertés de 1978, nous protège de certaines dérives, en interdisant la collecte de données non strictement nécessaires à assurer un service. En particulier, il oblige les prestataires à stocker nos données personnelles dans des états de l'Union Européenne. Il introduit également une responsabilité des donneurs d'ordre, qui ne peuvent se défausser sur un intermédiaire indélicat. Le RGPD a étendu en 2018 notre loi informatique et libertés. Il présente en particulier l'avantage d'être harmonisé au niveau européen, donc d'offrir une meilleure protection qu'une simple loi nationale. Il est loin d'être parfait cependant, et il sera appelé à être renforcé et affiné dans le futur.

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Peut-on craindre, dans le cadre de la crise sanitaire, une augmentation de la collecte de nos données personnelles ? Avons-nous des garanties en matière de respect de la vie privée ?

Il y a objectivement une augmentation de la collecte des données personnelles, à divers titres : dossiers de santé, applications comme « Tous Anti Covid », tests, registres de restaurants et lieux publics destinés à la notification des cas contacts, etc.
La CNIL (commission nationale informatique et libertés) a donné des avis sur les dispositifs retenus par le gouvernement après études détaillées, retoquant certains procédés trop permissifs au vu du RGPD, par exemple sur les premières versions de l'application Tous Anti Covid.
Le RGPD nous protège ensuite légalement, notamment en interdisant les détournements de finalité, c'est à dire l'utilisation des données à d'autres fins que celles prévues lors de leur collecte, ici la lutte contre la pandémie, et en nous donnant des droits d'accès, de rectification et de suppression des données nous concernant. Mais puisque ce cadre est purement légal, des violations restent techniquement possibles, auquel cas il existe des recours devant la CNIL ou en justice, potentiellement difficiles et au résultat aléatoire.

Au regard de l’historique français en matière de gestion des données personnelles, faut-il s’inquiéter qu’elles soient de plus en demandées dans ce cadre ?

Oui. En matière de lois sécuritaires et de traçage, il existe un « effet cliquet » : des mesures temporaires deviennent définitives, les retours en arrière sont rarissimes. On le voit sur les lois anti-terrorisme, lois de surveillance (boites noires), avec les mesures Vigipirate, etc. On peut donc légitimement le craindre à propos des lois sanitaires actuelles.

Alors que l’instauration du passe vaccinal aura probablement une faible incidence sur la situation hospitalière, peut-on parler de dispositif restrictif en termes de libertés personnelles ?

Qu'il ait un impact faible ou non, le dispositif est, sans ambiguïté, restrictif en termes de libertés personnelles. Par rapport au passe sanitaire, on supprime la possibilité de présenter, hormis une vaccination ou une preuve de contamination de moins de 6 mois, un test PCR négatif.
L'objectif du gouvernement est de motiver les personnes hésitantes à se faire vacciner. On maintient une stratégie de "Nudge" (influencer le comportement des gens sans leur interdire aucune option). La question est donc de savoir si cette perte temporaire (le sénat veut y veiller) de libertés est acceptable et sera efficace.
En termes de santé publique, on peut fortement douter de l'efficacité sur la vague de contamination en cours. Le projet ressemble ici surtout à une mesure incantatoire.
Jeremy Ward, sociologue à l’INSERM et spécialiste des questions de vaccination, a réalisé une étude sur les "intentions vaccinales". Celle-ci conclut que 40 % des non-vaccinés le sont à cause d'un accès difficile à la vaccination (personnes âgées isolées par exemple). Pallier le manque de vaccination par cet angle n'est malheureusement pas une option choisie par le gouvernement.

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