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La France est le premier bénéficiaire de la PAC
La France est le premier bénéficiaire de la PAC
©Antoine Jeandey - WikiAgri

Histoire de gros sous

Alors que la 50e édition du Salon de l'Agriculture s'est ouverte samedi, le président François Hollande se présente comme la grand défenseur de la politique agricole commune dont les milliards d'euros distribués font souvent débat.

Jean-Philippe  Feldman,Pierre Priolet et Antoine Jeandey

Jean-Philippe Feldman,Pierre Priolet et Antoine Jeandey

Antoine Jeandey est rédacteur en chef de WikiAgri, pôle multimédia agricole composé d’un magazine trimestriel et d’un site internet avec sa newsletter d’information. Lancé en début d’année 2012, WikiAgri a pour philosophie de partager, avec les agriculteurs, les informations et les réflexions sur l’agriculture.

Jean-Philippe Feldman est juriste.Il est professeur agrégé des facultés de droit à Rennes et avocat à la Cour de Paris. Il est aussi maître de conférences à SciencesPo. Il a publié "La famine menace-t-elle l'humanité ?", aux Editons JC Lattès.

Pierre Priolet est agriculteur depuis 1990 à Mollégès. Il se veut l’instigateur d’un projet pour bâtir un nouveau système de distribution qui se passerait des aides, et il se bat  pour l’idée d’une société où l'on consommerait plus juste. Grâce à ses passages télés remarqués, Pierre Priolet est devenu la nouvelle icône médiatique du monde agricole qui souffre. Il est l'auteur de "Les fruits de ma colère : Plaidoyer pour un monde paysan qu'on assassine" (Robert Laffont, 2011) et s'occupe quotidiennement du blog "consommer juste".

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Atlantico : François Hollande souhaite se présenter en grand défenseur de la politique agricole commune alors que s'est ouvert le 50e Salon de l'Agriculture à Paris samedi 23 février 2013. Mais au-delà des négociations européennes autour du dispositif, où passent réellement les milliards d'euros de la politique agricole commune en France ?

Antoine Jeandey : La France est le premier bénéficiaire européen de la PAC. De fait, chaque président de la République, quel qu'il soit, quelle que soit son étiquette politique et quel que soit son intérêt réel pour l'agriculture, se présente comme le "grand défendeur de la PAC". En son temps, Bruno Le Maire, alors ministre de l'Agriculture, avait témoigné des efforts de Nicolas Sarkozy en la matière. Aujourd'hui, c'est au tour de François Hollande de revendiquer cet effort. Il n'y a pas de surprise à ce niveau-là. Seul le temps dira qui est vraiment sincère. François Hollande n'a pas prononcé une seule fois le mot "agriculture" lors de sa première conférence de presse nationale, mais il vient de passer 12 heures au salon de l'Agriculture à flatter les croupes bovines, tel un illustre prédécesseur corrézien. Où est sa vérité sur le sujet ? Il est encore trop tôt pour le dire.

Le système des aides n'est pas parfait, tout le monde s'accorde là-dessus. En revanche, personne n'a encore trouvé un véritable système de substitution. Beaucoup de 'il faut que', peu de solutions réelles. On sait qu'il existe des abus (terres de la Couronne d'Angleterre, ou utilisation à des fins non agricoles par les pays d'Europe centrale).

Ensuite, la stratégie de distribution est sujette à contestations. Mais il semble, il s'agit en tout cas des vœux formulés par le Commissaire européen à l'Agriculture Dacian Ciolos, que la PAC 2014-2020 réagisse à ces critiques, avec une distribution différente. Les aides vont aux agriculteurs, et font partie de leurs émoluments. Elles vont aussi aux coopératives, et à tous ceux qui peuvent justifier de l'utilisation de terres agricoles. Retirer les aides aux agriculteurs, cela reviendrait à leur retirer une partie de leur salaire. On imagine facilement geler le salaire d'une catégorie professionnelle, mais lui en retirer une partie, surtout quand la corporation visée sait se défendre et n'hésite pas à manifester, c'est plus compliqué.

Alors oui, sans doute, parmi les coopératives ou autres bénéficiaires il y a des abus, des trop perçus par rapport à ce qu'il faudrait, masqués par ceux de Monaco ou de la Couronne d'Angleterre. Mais il est quasiment impossible de remettre en cause le système des aides sans entrer dans la rémunération de l'agriculteur, donc de risquer une riposte syndicale, et de fait chacun évite ce sujet.

Jean-Philippe Feldman : La France reçoit près de 10 milliards d'euros de subventions communautaires chaque année. Elle est traditionnellement le pays qui bénéficie le plus des fonds agricoles avec aujourd'hui près de 20 % du total. Un béotien pourrait s'imaginer que cet argent profite en priorité aux agriculteurs en difficultés. Rien n'est moins vrai…

Depuis 2008, la Commission européenne se trouve dans l'obligation de publier l'intégralité des bénéficiaires des aides. En ce qui concerne la France, les 200 premiers reçoivent plus de 500 000 euros, tandis que 50 000 exploitants touchent moins de 1 000 euros par an de subventions.

En réalité, la PAC, par ailleurs d'une rare complexité, a créé un vaste "marché politique" au sein duquel certains agriculteurs et syndicalistes tirent leur épingle du jeu, au détriment des autres agriculteurs... mais surtout au préjudice des contribuables!

Pierre Priolet : En préalable je voudrais dire que tous les secteurs de l’économie et de la vie sociale de  la société française touchent des aides de différentes manières. Que l’agriculture n’est qu’un secteur parmi d’autre qui bénéficie de ce régime d’aide. Seul leurs efficacités et leurs buts me posent problème aujourd’hui, quand l’on constate l’énorme gâchis des résultats de ces politiques.

L’agriculture française  est malade de sa gouvernance. Depuis plus de 50 ans le couple, responsables FNSEA et les différents pouvoirs politiques ont montré leur incompétence en matière de traitement des problématiques agricoles. Sinon avec la montagne d’aide que l’agriculture a reçu depuis tant d’années nous aurions du sortir du tunnel depuis longtemps. Au lieu de cela la politique agricole commune met des cataplasmes sur des jambes de bois. Et les agriculteurs disparaissent tous les jours. Les trois quart du temps non ou mal remplacés par une jeunesse qui a déserté les campagnes. Les  responsables de la FNSEA savent pertinemment que les agriculteurs qui touchent le plus d’aides sont ceux qui en ont le moins besoin. Alors que des secteurs en désespérance sont complètement oubliés. Il suffit de lire la Presse unanime de ce samedi 23 Février, jour d’ouverture du Salon  de l’Agriculture pour comprendre qu’aujourd’hui tout le monde est parfaitement informé du mode inique de distribution des aides de la PAC.

L’aide est divisée en  catégories :

- Les gros céréaliers qui ne vivent que de cela et qui malgré les immenses propriétés ne travaillent que 800H par an perçoivent plus de 45% des aides et sont à la direction de la FNSEA. Leur problématique est aujourd’hui la défiscalisation de ces aides par rachat de propriété et achat de matériel américain jamais assez gros. Il suffit d’aller au Salon de  Villepinte pour s’en convaincre.

- Les éleveurs, ils perçoivent les aides de la PAC uniquement destinées à les empêcher de mourir. Ils survivent afin de pouvoir nourrir les troupeaux avec les céréales chères et ultra subventionnées. Mais ils sont aujourd’hui incapables de vivre dignement de leur travail. Malgré les aides reçues la précarisation, la solitude et la désertification de leur environnement continuent.

- Les agriculteurs qui perçoivent des aides liées aux Plans Structuraux. Ils ne les reçoivent que pour subventionner le matériel agricole et les modifications d’installations qui lient les agriculteurs aux prêts financiers induits à ces subventions. Ils dépensent ainsi 100€ et ils reçoivent de 30 à 50€ d’aides.   A 80% ce sont des aides liées aux mises aux normes imposées par l’Europe dont ils se seraient bien passés ! Elles sont très souvent accordées par le bief des Organisations de Producteurs. Ce qui enchaine l’agriculteur à son groupement de Producteur. En effet s’ils voulaient partir de ce groupement ils devraient rembourser l’intégralité de ces aides. Ce qui explique pourquoi il y a un manque de réaction dans le monde agricole car personne n’a les moyens de contester les décisions ni de partir.

- Il y a une perception des aides indirectement par l’organisation agricole syndicale par le moyen du montage de dossier d’aide sous forme de pourcentage perçu. Elle effet elle se souvent très compliquées et difficile à obtenir. Ce pourcentage  va soit directement à la FNSEA soit aux divers Chambre d’Agriculture. Ce pourcentage n’est pas infime par rapport au 10 Milliards de la PAC.

- Les Industriels du secteur agricole touchent eux aussi une grosse part du gâteau et il faut ajouter à ceux-ci les organisations caritatives.

Chacun d’entre nous peut s’informer de la manière dont est distribuée cette manne dont très peu d’exploitations bénéficient et qui est pour 80% des agriculteurs est synonyme de surendettement. Pour faire simple les aides sont totalement non seulement injustes, très contraignantes mais en plus très très mal réparties dans le monde agricole. Tout est fait pour encourager les concentrations au détriment de l’harmonisation du tissu rural français. Et comme ce sont les plus puissants mènent la danse dans le monde politique et  qui tiennent la caisse, difficile pour un agriculteur en difficulté de s’en approcher.

Les aides sont une arme syndicale qui rend dépendant ceux qui les reçoivent ! Elles ne sont accordées que pour empêcher les agriculteurs de mourir. Elles sont  la cortisone administrée aux souffrants dans les hôpitaux. Elles permettent  au système absurde de vente à perte de continuer et elles permettent aussi à l’industrie agro-alimentaire de ne jamais manquer de matières premières à bas coût.

Quelles conséquences ces financements ont-ils réellement sur l'agriculture française ? Cela signifie-t-il que notre économie agricole est "sous perfusion" ?

Antoine Jeandey : La PAC donne une orientation stratégique et politique. Les aides ont longtemps accompagné ce que l'on appelle le premier pilier, à savoir l'acte de production. De plus en plus, elles se déplacent vers le deuxième pilier, en d'autres termes la reconnaissance de l'effort environnemental. Le point d'équilibre est en train d'être trouvé dans les négociations sur la PAC 2014-2020. Le modèle agricole européen consiste à satisfaire son résident dans ses demandes citoyennes en matière de sécurité alimentaire et d'environnement, donc à produire sur place l'alimentation qui correspond.

Après une période (années 1970) de productions à tout va, une réaction sans doute trop sévère mais nécessaire en faveur d'un tout environnement, il semble que l'on arrive enfin à un équilibre avec la nécessaire production incluant le respect de l'environnement. C'est tout l'enjeu de la PAC 2014-2020. Les agriculteurs sont très en attente, maintenant que le budget a été voté, des modalités d'application. Le fait que les financements de la PAC soient affectés selon telle ou telle politique générale implique des modifications à l'intérieur de chaque exploitation. Les conséquences sont donc énormes. D'une manière générale, les agriculteurs ne sont pas opposés à une prise en compte supérieure de l'environnement, ils veulent juste savoir comment, précisément. Pour la toute première fois, une politique agricole commune est décidée pour une période de 6 ans. Pour la toute première fois, les agriculteurs acquièrent une lisibilité sur le moyen terme, et peuvent donc investir en conséquence, modifier leurs structures avec un réel échéancier de financement à terme.

Le fait qu'un pays comme la France perçoive beaucoup d'aides permet aux réceptionnaires d'investir dans leurs structures et autres machines. La France est l'un des pays les mieux équipés en tracteurs par exemple. Les aides agricoles, en l'occurrence, permettent non seulement aux agriculteurs de vivre, mais à tous leurs fournisseurs, du constructeur de tracteurs au fabriquant d'engrais, d'assumer une économie dynamique, avec de nombreux emplois à la clef. On peut critiquer le système des aides (encore une fois pas parfait), estimer ou non, à l'intérieur de celles-ci, qu'il faudrait un rééquilibrage plus important entre céréaliers et éleveurs, mais vouloir les retirer sans système de substitution valable aurait un effet de domino désastreux : les agriculteurs seraient les premiers touchés, avec tous les risques sanitaires que cela comporte pour le citoyen, et derrière toute l'économie qui vit de l'agriculture.

A mon sens, l'agriculture n'est pas plus sous perfusion que de nombreux autres domaines économiques en France. Et elle conserve un énorme avantage, elle occupe et entretient le territoire, là où, pour d'autres activités, il faut des accords financiers et politiques pour accueillir des entreprises étrangères sans assurance de pérennité.

Jean-Philippe Feldman : Il y a un paradoxe : les agriculteurs ont le plus souvent un sens aigu de la propriété – ce n'est pas un hasard s'ils votent très majoritairement à droite et au centre – et ce sont des entrepreneurs, qui le plus souvent travaillent très dur. Pourtant, la PAC en fait, pour beaucoup d'entre eux, des "assistés".

Il faut rappeler que les subventions agricoles représentent environ 15 % des revenus des agriculteurs américains, mais 30 % de ceux des agriculteurs communautaires : le double en proportion ! Quant aux agriculteurs français, 65 à 70 % de leurs revenus proviennent de subventions (on l'a compris, avec d'importantes variations: il ne s'agit que d'une moyenne).

Je rappelle qu'un agriculteur australien ne dépend qu'à 5 % des subventions et son homologue néo-zélandais à 1 %. Pourquoi ? Sont-ils faits d'un autre métal ? Connaissez-vous beaucoup d'autres professions du secteur privé qui dépendent autant de fonds publics ? Nicolas Sarkozy avait justement parlé aux agriculteurs français comme à des entrepreneurs, mais sa politique conservatrice n'a pas eu d'effet. Quel gâchis ! C'était pourtant la voie à suivre.


Pierre Priolet : Le problème de notre société moderne, c’est que ce sont les plus riches qui distribuent et qui sont les premiers à se servir.  Pour moi cet argent est de l’argent public et cela devrait être aux consommateurs de décider quelle agriculture ils veulent voir imposer au pays.  Au lieu de cela l’argent public est partagé entre lobbyistes comme si c’était le leur. Donc ils se servent et imposent à ceux qui les financent leurs vues sur l’alimentation et sur l’espace rural.

Si les consommateurs décidaient je pense sincèrement que les exploitations de taille moyenne reviendraient rapidement  et que le maillage nourricier du pays serait beaucoup mieux pensé que ce qu’il ne l’est aujourd’hui.  En ce moment les gros groupes ne cultivent pas pour nourrir la population mais pour faire du fric. Et les aides leurs sont accordées en priorités. Alors que les bords de ville se désertifient. La suffisance alimentaire n’est plus à l’ordre du jour nous faisons comme si de rien n’était. C’est une politique absurde. Il y avait un vrai savoir faire agricole dans notre pays qui est aujourd’hui abandonné. Le technicien m’a dit, est devenu d’une banalité consternante. Alors que dans beaucoup de cas le technicien est  un agent commercial des grands groupes aussi bien phytosanitaire, qu’industriel. A cette économie là des bras pas chers suffisent, ils n’ont plus besoin  des hommes libres et entreprenants!

L’alimentation est un choix de société trop sérieux pour le confier qu’aux agriculteurs, c’est un choix politique au sens vie de la cité il en va de notre avenir. Et j’espère beaucoup de ce coté là.

La France va-t-elle pouvoir maintenir son avantage encore longtemps ? Quelles sont les principales réformes en vue de la PAC ? Que peuvent-elles changer pour les agriculteurs français ?

Antoine Jeandey  : Si avantage il y a pour la France, il tient de la diversité de son territoire, et donc dans la diversité de ses agricultures. Elle possède de vrais arguments pour défendre son agriculture. Sur une surface très largement inférieure, elle possède la même diversité de cultures que les Etats-Unis par exemple. C'est un atout considérable, d'autant qu'il est doublé d'une réelle compétitivité des entreprises agricoles, d'un savoir-faire évident, de rendements compétitifs. Ces arguments sont défendus à différents niveaux, souvent sous l'influence du syndicat majoritaire, la FNSEA (qui vient encore de remporter un franc succès aux élections professionnelles pour la chambre d'agriculture avec seulement cinq départements qui lui échappent), qui sait allier plusieurs stratégies : politique en restant un interlocuteur privilégié du pouvoir même quand celui-ci change d'étiquette ; européenne à travers son engagement dans le Copa (sorte de fédération des syndicats agricoles européens), très influent dans le lobbying bruxellois.

La PAC 2014-2020, plus environnementale, va pousser les agriculteurs français à modifier une partie de leur comportement vis-à-vis des cultures. Une technologie de pointe, avec l'utilisation de matériels suréquipés tels que présentés en ce moment au Sima (le salon international du machinisme agricole, à Villepinte), permet des passages de moissonneuses calculés au plus juste, donc en économisant l'énergie. Les GPS donnent des indications sur la nature du terrain et sur la profondeur où il faut arroser ou administrer des intrants, de fait des proportions moindres. Le labour reste d'actualité en certains endroits qui le réclament, mais n'est plus universel, ou alors sous des formes plus respectueuses de la terre (moins profond, avec de nouveaux matériels).

Ces évolutions conviennent parfaitement à la très grande majorité des agriculteurs, qui les ont d'ailleurs déjà initiées, certains depuis plusieurs années. Ce qu'ils craignent le plus, c'est l' "environnement-sanction", avec des mesures sans discernement qui vont à l'encontre du pragmatisme du terrain. En revanche, la croissance verte vers laquelle s'oriente la Pac 2014-2020, c'est-à-dire avec une rémunération des efforts environnementaux, convient parfaitement. Cette rémunération est nécessaire à deux niveaux : pour aider les indécis à bien aller sur cette voie, mais aussi parce qu'elle représente la reconnaissance de la société pour l'effort fourni par les agriculteurs.

Jean-Philippe Feldman : La position ancestrale de la France en matière agricole est grosso modo identique, quelle que soit la couleur politique des gouvernants en place. Il s'agit d'un mélange de lâcheté et de pur électoralisme, au détriment des contribuables et des consommateurs.

Heureusement, la France est de plus en plus isolée au sein de l'Union européenne. Nos agriculteurs se trouvent en fait et de plus en plus dans une période intermédiaire délicate, confrontés qu'ils sont d'une part à une inévitable baisse des aides communautaires et à une concurrence internationale accrue, et d'autre part à des règles sociales et environnementales qui continuent de les enserrer.

En agriculture comme dans les autres domaines, la solution ne peut venir que d'une libéralisation croissante sur la base d'un accord : je ne vous donne plus d'aides par principe, mais je stoppe les réglementations abusives, je diminue les taxes et je réforme la protection sociale de telle manière que les charges ne soient plus pénalisantes. En d'autres termes, je vous donne enfin la liberté, mais ne venez pas me réclamer quoi que ce soit !

Pierre Priolet : Les différents politiques français en accordant la parole uniquement à la FNSEA ont beaucoup contribué à cet état de fait ! Mais c’est plus par paresse de peur des conséquences que cela a été fait. Il faut se souvenir des mouvements des agriculteurs nombreux qui faisaient trembler le pays. Aujourd’hui qui tremble devant le mal être agricole ? Dix cars de CRS suffisent à contenir des manifestations organisées uniquement pour faire tomber la pression et pouvoir dire vous voyez on a essayé mais il n’y a plus personne. Les agriculteurs n’ont plus les moyens de lutter contre leur misère. En même temps en accordant beaucoup à leurs responsables ils les tenaient beaucoup plus entre leurs mains. Regardez à travers l’histoire du syndicalisme agricole combien de responsables agricoles ont fait une carrière politique ? C’est un fait unique, le syndicalisme agricole est un tremplin pour se sortir de sa condition d’agriculteur.

Constatez aussi la similitude entre les cumuls de mandats politiques et le cumul des mandats syndicaux. On a rétablit des baronnies partout où chacun est le petit seigneur de son quartier. Rien ne bouge tout est sous contrôle et cela convient très bien à l’état. Dans beaucoup de département les DDT marchent main dans la main avec les Responsables Syndicaux. Ils  tiennent  La SAFER, le Crédit, les installations, la distribution des aides, l’assurance etc… Il n’y a plus aucune lutte contre les nouvelles réglementations qui s’accumulent malgré quelles soient néfaste aux agriculteurs et qui elles sont la Peste de notre monde moderne où le bien être animal passe avant les bien être des agriculteurs. Donc les politiques ont bien compris que s’ils voulaient avoir la paix, il fallait gaver les responsables qui ont tout à perdre en perdant leurs contacts rémunérateurs ou leurs bienveillances administratives.

L’Europe a poussé cette folie d’agrandissement des structures qui conduit aujourd’hui le monde agricole au gigantisme. Au résultat les structures sont devenues tellement grosses qu’il faut travailler avec des structures commerciales qui sont elles même les ferments de leurs propres pertes. Par des importations massives qui tirent les prix vers le bas uniquement pour assurer les frais de fonctionnement de structure où les dirigeants ont souvent des rémunérations plus importantes que nos ministres. Ce sont les vrais confiscateurs du pouvoir et de la richesse des agriculteurs.

En ce moment par exemple la société BLUE WHALE qui regroupe les coopératives françaises de pommes importe et vend à CARREFOUR des pommes Royal Gala Polonaises alors que ses propres producteurs n’arrivent pas à vendre les leurs. Bien sur ces pommes sont moins chères et font baisser la valeur de leur propre production. Cet exemple peut être décliné à l’infini. Ce système destructeur est absurde.

Les coopérateurs ont perdu la main dans leur propre coopérative. Un homme une voix et le tout à main levée est un système qui ne peut plus marcher car la pression du groupe est trop forte. Il faudrait ne pouvoir fonctionner qu’avec des votes à bulletin secret.

Oui le monde agricole est divisé et ce qui fait sa perte. C’est pourquoi je pense que le salut des agriculteurs doit passer par les consommateurs. Ils nous ont déjà fait faire d’énormes progrès dans notre rapport avec notre environnement et maintenant ensemble nous pouvons avancer pour faire progresser l’idée de manger mieux qui petit à petit fait son chemin dans les esprits. Ils commencent à comprendre que le moins cher est en fait qu’une opportunité pour faire énormément d’argent sur leur dos au détriment de leur santé. Il ni aura pas de salut sans la pression des consommateurs.

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