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Obama sera-t-il le seul Président 
à ne pas être balayé par la crise ?
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Yes he can ... le retour !

Alors que les chefs d'Etats et de gouvernements européens sortent vaincus des urnes, les Américains, appelés à voter le 6 novembre prochain, suivront-ils le mouvement ? Explications d'un vote qui s'annonce finalement plus serré qu'on ne le pense...

Nicole Bacharan

Nicole Bacharan

Nicole Bacharan est historienne et politologue, spécialiste de la société américaine et des relations transatlantiques.
Elle a co-écrit avec Dominique Simonet  "11 septembre le jour du chaos" (Perrin, à paraître le 18 août 2011).

Son prochain livre est Le guide des élections américaines de 2012, co-écrit avec Dominique Simmonet,  à paraître aux éditions Perrin.

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Atlantico : Barack Obama semble toujours distancer Mitt Romney, son rival républicain, en termes de grands électeurs selon les sondages menés dans les différents Etats. Sera t-il le seul président à ne pas être balayé par la crise comme cela semble être le cas en Europe ?

Nicole Bacharan : Il n’est absolument pas sûr que Barack Obama ne soit pas « balayé » par la crise comme les autres chefs d’Etats et de gouvernements. L’élection de François Hollande n'est pas une bonne nouvelle pour le président américain dans la mesure où son élection constitue une preuve supplémentaire que les présidents sortants, qu’ils soient de droite ou de gauche, ne sont pas réélus.

Il est vrai que les sondages portant sur les grands électeurs sont importants car l’élection américaine se joue Etat par Etat. Mais en termes d’intention de vote, les deux candidats sont presque au coude à coude.

D’ailleurs Barack Obama n’est pas si populaire qu’on peut le croire. Certes, il a une forte côte personnelle qui le crédite en terme d’intelligence, d’intégrité, de capacité à travailler et à prendre ses responsabilités... Mais il tourne autour des 46% en termes d’approbation de son action présidentielle ce qui n’est pas un très bon score pour un mois de mai en année d’élection si on le compare aux présidents sortants précédents cherchant à remporter un second mandat.

Cependant, son bilan sans être mauvais, reste plutôt mitigé. Il a déçu une partie de l’aile gauche de l’électorat en apparaissant parfois comme trop timide sur la régulation financière ou pour ne pas avoir pu fermer Guantanamo.

Sa récente position sur le mariage gay est courageuse dans la mesure où l’audace est, en partie, ce qui a manqué et déçu les américains. Au delà des points de vu, son électorat a besoin de voir un président qui prend des risques d’autant plus que cette mesure plait surtout aux jeunes qu’ils soient démocrates ou républicains.

Barack Obama distance largement Mitt Romney en termes de fonds levés pour financer sa campagne. N’est-ce pas le signe d’un engouement autour de sa candidature et de grande confiance quant à sa réélection ?

Tout à fait. Le « premier tour financier » est un indicateur de la foi qui est portée envers un candidat. Barack Obama peut être critiqué, mais il est un candidat exceptionnel qui, en 2008, a réussi à battre Hillary Clinton lors des primaires démocrates ce qui fut un événement considérable voire inimaginable à l’époque.

Il n’a pas peur et ne craque jamais. Il lui a été reproché au cours de son mandat à la Maison Blanche d’être froid, intellectuel et distant... mais ces éléments disparaissent lorsqu’il est en campagne où il fait preuve de chaleur, d’empathie ou encore de grand  talent d’orateur lors des débats.

Mais il faut aussi tenir compte du fait que son adversaire, Mitt Romney, est plutôt un mauvais candidat depuis plusieurs mois. Cette faiblesse est un atout pour le candidat démocrate.

Barack Obama avait été élu en 2008 en période de « début de crise ». En 2012, les Etats-Unis sont en « sortie de crise » avec des parutions de chiffres rassurant sur l’économie américaine depuis quelques semaines. Comment ce changement de climat politique peut-il influencer les électeurs américains ? Cela va t-il jouer en faveur ou défaveur du président sortant ?

A l’exception d’un événement extérieur majeur, l’élection se fera avant tout sur l’économie. Les chiffres américains sont, bien entendu, meilleurs qu’en France, mais ils ne sont tout de même pas très bons.

Si les chiffres du chômage vacillent d’un mois à l’autre, ce sera très mauvais signe pour Obama. Si l’emploi, la croissance et les déficits s’améliorent continuellement, ce sera au contraire positif pour lui. Mais nous n’en sommes pas là. Par exemple, les chiffres de l’emploi du mois d’avril ne sont pas au rouge, mais ils ne sont pas dans le vert non plus puisqu’ils annoncent une stagnation de l’emploi. Les trajectoires économiques seront décisives.

La question majeure qui jouera sera : « lequel de ces deux hommes détient les clefs pour que l’économie redémarre fortement ? ». Mitt Romney mettra alors en avant son profil d’entrepreneur ayant réussi. Obama ripostera en rappelant les emplois délocalisés par ce dernier.

Autre objectif pour les deux candidats, rendre le camp adverse responsable des blocages qui persistent à Washington entre un Sénat démocrate et une Chambre des représentant républicaine.

En quoi les électeurs américains votent-ils différemment des électeurs européens ?

Les questions qui forment le débat présidentiel ne sont pas les mêmes des deux côtés de l’Atlantique. Par exemple, 15% des américains votent en ne se basant que sur les valeurs morales et religieuses.

Le rôle de l’Etat et du gouvernement cristallise également les débats, beaucoup d’américains estimant que l’Etat est essentiellement nuisible et non pas un acteur neutre et impartial comme beaucoup le voit en France. Ce sujet jouera en défaveur d’Obama, en partie à cause des déficits.

Autre grande différence, la désaffection des américains pour leur système politique se traduit en abstention, alors qu’en France les gens continuent de voter. De manière générale, les américains votent peu, le taux d’abstention étant très fort. En 2008, Obama avaient créé un tel engouement que beaucoup de citoyens se sont rendus dans les bureaux de vote, y compris ceux qui habituellement ne se déplaçaient pas (les jeunes, les minorités, les femmes...). Parmi ces derniers, un grand nombre ont été depuis déçu et s’ils ne voteront pas contre Obama en 2012, ils risquent s’abstenir. Les équipes du candidat démocrate craignent donc un retour de l’abstention. Il va donc devoir remobiliser sa base.

Enfin, les indépendants, représentant à peu près un tiers de l’électorat, continueront à jouer un rôle important. C’est eux qu’il faudra convaincre. Je pense que le résultat final sera serré.

Propos recueillis par Olivier Harmant

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