Nouvel organigramme de l'UMP : la part d'habileté, la part de choix contraint et celle qui relève d'un pari risqué<!-- --> | Atlantico.fr
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NKM aété nommée numéro 2 du parti
NKM aété nommée numéro 2 du parti
©Reuters

Le changement, c'est maintenant

Les nominations pleuvent à l'UMP : Nathalie Kosciusko-Morizet est la nouvelle vice-présidente déléguée du parti depuis jeudi, Laurent Wauquiez est quant à lui le nouveau secrétaire général. Des choix très politiques qui présentent des avantages... et des inconvénients.

Philippe Goulliaud

Philippe Goulliaud

Rédacteur en chef du service politique du Figaro, il a co-écrit avec Marie-Benedicte Allaire "L'incroyable septennat" en 2002 (Fayard). 

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Atlantico : L’organigramme de l’UMP se dévoile peu à peu : NKM a été nommée jeudi vice-présidente déléguée de l’UMP "numéro 2 du parti", tandis que Laurent Wauquiez est nommé secrétaire général. En quoi ce choix de Nicolas Sarkozy est-il habile ? Quels risques prend-il toutefois ? Ces décisions ont-elles été imposées à Nicolas Sarkozy ?

Philippe Goulliaud : Ces choix n'ont pas été imposés à Nicolas Sarkozy, si ce n'est par le poids politique de chacune de ces deux personnalités. Chacun de ces deux quadras a joué un rôle majeur dans la campagne pour la présidence de l'UMP. Laurent Wauquiez est en phase avec les idées de la base militante, avec la ligne droitière portée en son temps par Patrick Buisson, le conseiller aujourd'hui honni de l'ancien président de la République.  A Laurent Wauquiez, le poste de secrétaire général du parti, au contact direct avec les militants, avec les fédérations et les responsables locaux.  Il s'efforcera de séduire un électorat droitier, tenté par le FN.

Nathalie Kosciusko-Morizet, elle, développe des idées plus modernes, notamment sur les questions de société. Icône des bobos, elle ouvre l'électorat de Nicolas Sarkozy au centre - à Paris elle a fait alliance avec l'UDI mais aussi avec le MoDem -, voire à la gauche, aux écologistes, à la société civile. Elle peut espérer récupérer une part des 30% de voix de Bruno Le Maire sur le créneau de la rénovation. Elle sera utile pour tenter d'amener à Nicolas Sarkozy des électeurs qui sont souvent éloignés de l'UMP, mais qui en ont marre de la gauche.

L'habileté de Nicolas Sarkozy consiste donc à associer dans le trio de tête du parti deux représentants de lignes très différentes, voire opposées.  Il couvre ainsi un spectre très large, lui-même s'installant dans un rôle valorisant de fédérateur, de seul rassembleur. Toutefois, il risque d'être difficile de faire marcher d'un même pas ces deux fortes têtes qui, qui plus est, sont de la même génération et partagent une solide ambition. NKM revendique une totale liberté de parole. On a vu qu'elle savait en faire usage au détriment de Nicolas Sarkozy lorsqu'elle s'est démarquée de lui et a critiqué ses propos sur l'abrogation du mariage pour tous, que Laurent Wauquiez défend mordicus. Les risques de couacs et de bagarres sont nombreux dans un parti fragile.

En récoltant 29 % lors de l’élection pour la présidence de l’UMP, Bruno Le Maire a fait un bon score samedi. Nicolas Sarkozy a nommé Thierry Solère, chargé d’organiser la prochaine primaire à droite. Cette désignation d’un soutien de Bruno Le Maire a-t-elle été imposée au nouveau président de l’UMP par les résultats de l’élection ? Ce geste d’ouverture pour prouver sa volonté de rassemblement est-il habile ? Quels sont les risques pris par Nicolas Sarkozy en nommant le tombeur de Claude Guéant lors des législatives de 2012 ?

Là encore, le choix de Nicolas Sarkozy tient compte de la réalité sortie des urnes à l'UMP. Thierry Solère a été l'un des plus actifs parmi les soutiens de Bruno Le Maire. Mais c'est aussi un élu des Hauts-de-Seine qui a travaillé avec Nicolas Sarkozy, qui s'entend bien avec Alain Juppé dont le bras droit, Gilles Boyer, soutenait le même candidat aux municipales à Boulogne-Billancourt. Il a aussi de bonnes relations avec François Fillon et Xavier Bertrand. De ce point de vue, c'est un choix habile qui donne un gage à tous les partisans de la primaire. Reste à savoir si Thierry Solère, qui n'est pas un ténor de l'UMP, aura l'autorité nécessaire face au rouleau compresseur sarkozyste. Le choix du tombeur de Claude Guéant aux législatives de 2012 à Boulogne est un paradoxe. Il était alors dissident et avait frôlé l'exclusion. Mais après tout, il apporte la preuve qu'il faut parfois en passer par des primaires pour éviter la division.

Bruno Le Maire et Hervé Gaymard, pro-Alain Juppé, ont été nommés à la stratégique commission d’investiture du parti. Ces choix présentent-ils des dangers pour le président de l’UMP ou au contraire est-ce plutôt habile ? Nicolas Sarkozy a-t-il été contraint de nommer un juppéiste et son ancien concurrent ?

Ces choix pour la Commission des investitures s'imposaient. On ne voit pas comment Nicolas Sarkozy aurait pu éviter de faire entrer Bruno Le Maire et un représentant d’Alain Juppé dans cette instance qui jouera un rôle décisif lors des échéances électorales à venir. C'est plus une nécessité qu'une habileté. Mais le nouveau président de l'UMP aura un allié de poids en la personne de Christian Estrosi qui préside désormais cette commission, chargé du pouvoir de vie et de mort sur des candidats à la candidature. Ils pourraient être fortement incités à soutenir Nicolas Sarkozy en échange d'une investiture. A Hervé Gaymard et Alain Juppé de se montrer attentifs.

Quels sont les autres défis qui attendent Nicolas Sarkozy dans la constitution de l’organigramme du parti ? Et plus généralement, dans la création du nouveau parti à droite à laquelle s’attelle le président de l’UMP ?

Nicolas Sarkozy, soulignent quelques hiérarques de l'UMP, a six mois pour montrer qu'il a repris le leadership sur la droite française. Sa victoire à la présidence du parti est nette, mais pas écrasante dans le coeur nucléaire de son électorat. Il va donc devoir s'atteler à la mue du parti, en faisant émerger des têtes nouvelles et des idées neuves.

Dans la constitution de l'équipe dirigeante, il devra se garder de faire exclusivement revenir les anciens, sans pour autant froisser ses fidèles. Il devra rajeunir et féminiser. Il devra ménager les sensibilités, tout en assurant l'homogénéité. La tâche est ardue. Quant au projet ou au programme, il va devoir trouver des idées mobilisatrices et novatrices. Faute de quoi, se contenter de dire qu'on abrogera les réformes de la gauche pourrait être aussi peu efficace que le détricotage par François Hollande des réformes du quinquennat de Nicolas Sarkozy.

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