Non le changement d’heure n’a pas d’impact sur la santé cardiaque<!-- --> | Atlantico.fr
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Alors que certains s’inquiètent du potentiel impact néfaste du passage à l’heure d’été sur la santé cardiaque, une nouvelle étude vient d’être publiée.
Alors que certains s’inquiètent du potentiel impact néfaste du passage à l’heure d’été sur la santé cardiaque, une nouvelle étude vient d’être publiée.
©LOIC VENANCE / AFP

Passage à l’heure d’été

Alors que certains s’inquiètent du potentiel impact néfaste du passage à l’heure d’été sur la santé cardiaque, une nouvelle étude vient d’être publiée.

Christophe de Jaeger

Christophe de Jaeger

Le docteur Christophe de Jaeger est chargé d’enseignement à la faculté de médecine de Paris, directeur de l’Institut de médecine et physiologie de la longévité (Paris), directeur de la Chaire de la longévité (John Naisbitt University – Belgrade), et président de la Société Française de Médecine et Physiologie de la Longévité.

Il est l'auteur de plusieurs ouvrages, notamment de "Bien vieillir sans médicaments" aux éditions du Cherche Midi, "Nous ne sommes plus faits pour vieillir"  chez Grasset, et "Longue vie", aux éditions Telemaque

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Atlantico : Alors que certains s’inquiètent du potentiel impact néfaste du passage à l’heure d’été sur la santé cardiaque, une nouvelle étude vient d’être publiée. Quels sont les principaux enseignements de ces nouveaux travaux ? Est-ce rassurant sur le plan cardiaque ? Le changement d’heure n’a-t-il pas de conséquences sur le plan cardiaque ?

Christophe de Jaeger : Le changement d’heure est bien plus ancien que nous le pensons en général. Il a été appliqué en France pour la première fois en 1916, dans le but d'économiser des ressources énergétiques comme le charbon. Ce n’est qu’en 1944, à la Libération que l’heure d’été a été abandonnée en France. Il faudra attendre 1975 pour que l’heure d’été soit rétablie afin d’économiser l'énergie en réduisant les temps d'éclairage artificiel le soir. L'heure d'été est fixée à UTC+2. Cette mesure qui devait être provisoire est toujours appliquée, bien que chaque année, on nous annonce sa fin prochaine.

Depuis sa réinstauration dans les années 75, le changement d’heure, suscite de nombreuses polémiques et en particulier sur notre santé. La rupture de nos rythmes circadiens peut en effet avoir des conséquences délétères sur notre santé et en particulier sur notre sommeil entraînant un surcroît de fatigue, des troubles de la concentration et donc des fonctions cognitives et une baisse des capacités de travail, ainsi que des troubles de l’humeur. On note également une augmentation du risque d’accidents de voiture les premiers temps après le changement d’horaire. Certains ont même décrit des conséquences sur notre santé cardio-vasculaire, sur l’immunité, etc…

Cette nouvelle étude qui vient d’être publiée par le  Dr. Benjamin Satterfield, cardiologue à la Mayo Clinic aux États-Unis semble répondre définitivement sur le risque cardio-vasculaire lié au changement d’horaire. Je dis « définitivement » car cette étude porte sur 36 millions d’Américains. Cette étude porte sur la semaine qui suit le changement d’horaire au printemps et à l’automne, car étant le moment le plus impacté par le changement de biorythmes. L’équipe du Dr. Benjamin Satterfield a recensé environ 75000 évènements cardio-vasculaires durant la semaine suivant le changement d’horaire. La question étant de savoir s’il y avait une modification significative par rapport aux autres semaines de l’année. Bien qu’il semble y avoir une très discrète augmentation des évènements cardio-vasculaires, cette augmentation n’est pas statistiquement significative.

La conclusion du Dr Bernard Gersh, cardiologue à la Mayo Clinic est que la santé cardio-vasculaire de nos contemporains n’est pas impactée par le changement d’horaire et qu’il ne convient donc pas d’en tenir compte pour décider de son maintien ou de sa suppression.

Quels sont les principaux facteurs de risques qui entraînent et participent à l’accélération des problèmes cardiaques et à la survenue des AVC ?  

Les facteurs de risque de maladies cardio-vasculaires sont bien connus. Ils peuvent entraîner ou favoriser ces maladies. Classiquement, on en recense 9 : le tabagisme, le diabète de type 2, l’hypercholestérolémie, la sédentarité, l'hypertension artérielle, une hérédité familiale, la consommation d'alcool et bien sûr la surcharge pondérale.

Les facteurs prédisposant aux accidents vasculaires cérébraux sont de même nature, mais dans un ordre différent. On retient comme principaux facteurs de risque : l'hypertension artérielle, le tabagisme, l’hypercholestérolémie, le diabète de type 2, la consommation d’alcool, le stress, la sédentarité, la surcharge pondérale.

En réalité, les deux listes se superposent et certaines études incluent d’ailleurs, le stress comme facteur de risque cardio-vasculaire ce qui paraît tout à fait compréhensible puisqu’il s’agit de facteurs de risque artériels de topographie cardiaque ou cérébrale. La vraie problématique n’étant pas le facteur prédisposant, mais les valeurs de références. Quel doit être la valeur maximale de la pression artérielle tolérable, ou plutôt quelle est la valeur optimale d’une pression artérielle. Or celle-ci peut changer d’une personne à l’autre. Quelle est la valeur optimale d’une charge glycémique ? Quelle est l’activité physique optimale ? On peut s’interroger sur les valeurs cibles qui sont bien plus ambitieuses que les valeurs classiquement admises.

Si le changement d’heure n’a pas d’impact sur les problèmes cardiaques, quelles doivent être les consignes et la prévention à déployer pour limiter les crises cardiaques et les accidents vasculaires cérébraux en temps normal ?

On connaît bien et cela depuis de très nombreuses années, les objectifs ou valeurs cibles que nous devrions tous viser. La problématique n’est donc pas la science, mais la capacité pour nos contemporains de faire les efforts nécessaires et indispensables pour y arriver ou plus modestement, pour les approcher. Un article récent montrait que les personnes ayant une pression artérielle inférieure ou égale à 12/7 ne faisaient jamais d’accident vasculaire cérébral. Jamais (ou presque). Qui a aujourd’hui, après 50 ans, une pression artérielle de 12/7 ? Qui après 60 ans ? Qui après 70 ans ? Combien de nos contemporains sont à 14/9 en se disant parfaits  et en n’ayant aucune envie de faire des efforts pour se prendre en charge ?

C’est toute la difficulté que nous avons en médecine préventive primaire de demander des efforts aujourd’hui, alors que tout va bien, pour éviter des maladies demain. Néanmoins, et nous le voyons de plus en plus en consultation, le nombre de gens qui sont prêts à des efforts pour éviter des accidents dans le futur, sont nombreux, et de plus en plus jeunes. En quelques années, la proportion de consultants de moins de 60 ans, puis de moins de 50 ans a augmenté considérablement montrant qu’un discours de prévention personnalisé, mais vraiment personnalisé, fonctionne et intéresse de plus en plus.

Les résultats de cette étude pourraient-ils faire évoluer le regard des décideurs politiques sur la législation sur le changement d’heure, et pour les politiques de santé publique ? 

Nous savons que la motivation principale du changement d’heure est l’économie et que le principal obstacle est d’ordre sanitaire. Le changement d’heure fait du bien à l’économie et du mal à notre santé. Si les études commencent à montrer qu’il n’y a pas de conséquences réelles et sévères à ce changement d’horaire, alors il semble qu’il n’y ait plus d’obstacles au changement d’horaire, même si au quotidien, durant la semaine, voire plus, qui suit le changement, nous ressentons tous des inconvénients dans notre vie. Qu’est ce qui doit primer : nos inconvénients temporaires, plus ou moins importants en fonction des individus, ou notre économie ? C’est aux politiques de décider.

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