Narcotrafiquants mexicains : des hommes d'affaires passés par les meilleures universités<!-- --> | Atlantico.fr
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Derrière les narcotrafiquants mexicains se cachent en fait des hommes d'affaires en costume-cravate passés par les meilleures universités.
Derrière les narcotrafiquants mexicains se cachent en fait des hommes d'affaires en costume-cravate passés par les meilleures universités.
©Reuters

Elite criminelle

Le chiffre d'affaires mondial de la drogue est estimé à 450 milliards de dollars par an, soit 50 milliards de plus que les ventes d'armes. Derrière les clichés sur les narcotrafiquants mexicains, il y a pourtant des hommes d'affaires en costume-cravate passés par les meilleures universités et des juristes de haut niveau qui exploitent les circuits de la mondialisation. Extrait de "Narco business : l'irrésistible ascension des mafias mexicaines" (2/2).

Babette Stern

Babette Stern

Babette Stern est  journaliste,  spécialiste  des  grands  sujets  économiques  internationaux.  Elle a été correspondante d'un grand quotidien français au Mexique et en Amérique latine, où elle se rend régulièrement.

Elle est l'auteur de Narco business : l'irrésistible ascension des mafias mexicaines (Max Milo, avril 2011).

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Inutile de chercher leur nom dans la liste des 30 valeurs du Dow Jones, l’indice phare du New York Stock Exchange, pas plus que dans le CAC 40 ou le Hang Seng de Hong Kong. Pourtant, leur poids financier, leur chiffre d’affaires, leur présence internationale, leur structure industrielle et le nombre de leurs collaborateurs ne détonneraient pas aux côtés des grosses capitalisations boursières que sont Apple, Total ou HSBC.

Les cartels mexicains ne sont pas des entreprises tout à fait comme les autres et les matières premières qu’ils commercialisent brutes ou raffinées, – le pavot, la cocaïne et le cannabis – ne sont pas cotées à la bourse du commerce mondiale qu’est le Chicago Board of Trade, comme le soja ou le blé. Mais ce sont bel et bien des entreprises.

Les unes évoluent dans un cadre légal. Les autres s’épanouissent dans l’économie parallèle. La différence entre les deux types de sociétés est essentiellement réglementaire. Les entreprises de Wall Street payent des impôts, obéissent à des règles de concurrence strictes, sont soumises à des contrôles de qualité de leurs produits, doivent acquitter des taxes douanières. Leurs clients ont des recours légaux si le produit n’est pas conforme à la commande, leurs employés sont protégés par des lois sur le travail. Elles doivent verser des dividendes à leurs actionnaires.

Dans le monde parallèle des mafias, aucune de ces contraintes n’existe. Les bénéfices vont directement dans la poche des dirigeants, la concurrence est sauvage, le client doit se contenter du produit livré, les employés sont exploités.

Mais le fonctionnement industriel est le même ou presque. L’économie de marché, les effets de la mondialisation, les innovations des technologies, la libre circulation des marchandises, le développement des marchés financiers et la prolifération des paradis fiscaux sont exploités par les unes et les autres. Elles alimentent le système capitaliste.

*

Les barons de la drogue mexicains ressemblent à des hommes d’affaires, portant costume et cravate. Si les patrons sont des self-made-men, leur état-major est passé par les universités. Ils sont entourés d’une armada de financiers, de juristes et d’investisseurs. Le chiffre d’affaires total de la drogue est estimé par l’ONU à 450 milliards de dollars par an, 50 milliards de plus que les ventes d’armes. Toujours selon l’ONU, le chiffre d’affaires annuel de la cocaïne est de 88 milliards de dollars. Les Américains en consomment 41 %, soit un marché de 36 milliards de dollars. 90 % de la cocaïne consommée aux États-Unis passe par les cartels mexicains.

Le Mexique est, derrière l’Afghanistan (7 700 tonnes) et le Myanmar (410 tonnes), le troisième pays producteur d’opium avec une production de 325 tonnes par an (chiffres 2008 de l’ONU), dont les trois quarts servent à fabriquer de l’héroïne, une des drogues les plus répandues au monde. Il en produit 38 tonnes par an (380 tonnes pour l’Afghanistan et 40 tonnes pour le Myanmar).

En deux décennies, les cartels mexicains se sont hissés au premier rang du trafic de drogue, supplantant les Colombiens dans cette spécialité. Rompant avec les règles non écrites qui les liaient aux groupes « narcos » d’Amérique du Sud, les cartels mexicains contrôlent pratiquement le centre et le sud du continent où ils se fournissent en précurseurs chimiques pour préparer des drogues synthétiques dont ils sont devenus les grands spécialistes. Dans tous les pays latino-américains, y compris le Belize, ils ont établi des bases patrimoniales pour trois raisons : surveiller les routes de transit des biens et services illicites qu’ils gèrent ; protéger leurs actifs générés par leurs activités et garantir l’approvisionnement des produits qu’ils utilisent. Ils sont présents dans tout l’hémisphère. Des pays comme l’Argentine n’ont pas de lois interdisant l’importation de précurseurs chimiques, ce qui augmente le trafic à travers l’Amérique centrale.

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Extrait de Narco business : l'irrésistible ascension des mafias mexicaines

Narco business : l'irrésistible ascension des mafias mexicaines

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