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Mariage pour Tous : "Une société qui ne donne pas naissance à la vie meurt"
©Reuters

Bonnes feuilles

Un pouvoir secret au sein de l’Église, une nébuleuse énigmatique qui intrigue et inquiète : qu’est-ce que l’Opus Dei et qui se cache derrière son fondateur ? Comment cette institution catholique, que certains pensent remonter au Moyen Âge, a-t-elle pu se hisser au sommet du Vatican comme d’aucuns le prétendent ? Fantasmes ou vérité ? De la guerre d’Espagne à Franco, d’Adolf Hitler à la question des sectes, des dessous du Da Vinci Code à nos brûlantes actualités… que révèlent ces dossiers ? Extrait de "Opus Dei, confession inédite", de Philippe Legrand avec Mgr de Rochebrune, aux éditions du Cherche Midi 2/2

Philippe Legrand

Philippe Legrand

Philippe Legrand a fait ses débuts de journaliste au Quotidien de Paris puis à la radio, entre autre sur RMC. Il est l'auteur de cinq livres dont Oh Happy Days, la vie de Clyde Wright ou l'histoire du Gospel (prix d'Excellence), mais aussi d'une dizaine d'émissions qu'il a animées. Aujourd'hui, il dirige la communication de Paris Match, du Journal du Dimanche, et présente Match +, le rendez-vous de web radio sur parismatch, relayé sur RFM.

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Antoine de Rochebrune

Antoine de Rochebrune

Antoine de Rochebrune a été ingénieur et docteur en génie électrique avant d’être ordonné prêtre. Nommé par Xavier Echevarría, prélat de l’institution religieuse à Rome, et fait Monseigneur par le pape Benoît XVI en 2006, il a la charge de l’Opus Dei en France. Il est aussi docteur en théologie dogmatique et, avant tout, "pasteur".

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Dans les manifestations du «mariage pour tous», de quel côté se trouvaient les fidèles de l’Opus Dei ?

Je pense qu’ils se trouvaient pour un bon nombre dans les rangs de ceux qui y étaient opposés. Ce qui ne veut pas dire que tous y étaient ! Tout le monde n’a pas la culture de la manifestation.

Impossible alors de penser que certains pouvaient être ailleurs que «dans les rangs de ceux qui y étaient opposés»?

En général, et a fortiori pour toutes ces initiatives nationales qui touchent l’opinion et qui engagent chacun individuellement, je ne donne aucune consigne personnelle. C’est le propre de l’Opus Dei de laisser chacun libre de choisir et de prendre ses responsabilités.

Et vous-même, monseigneur, avez-vous pris part aux manifestations ? En faisant quel choix ?

J’ai hésité et puis j’ai finalement décidé d’accompagner des amis qui n’appartenaient pas à l’Opus Dei. N’ayant donné aucune consigne, j’y ai pris part en tant que prêtre citoyen avant tout, sans porter mon titre de Monseigneur de l’Opus Dei en France. C’était un acte personnel dont je n’ai pas fait publicité.

A lire aussi sur notre site : Quand l’Opus Dei répond aux fantasmes exprimés par Dan Brown et son Da Vinci Code sur la mortification corporelle de ses membres

Mais étiez-vous en civil — si je peux dire — ou en clergyman ?

Plus simplement que cela : en prêtre-citoyen. Le prêtre a un rôle dans la société, mais aussi un avis sur l’ensemble des sujets qui occupent l’opinion, indépendamment des missions qui sont les siennes.

Sur ce sujet en particulier, le prêtre reste prêtre, semble-t-il. Et vous-même, vous adoptez la ligne de conduite de l’Église. Effectivement, ce que je pense est en phase avec le discours de l’Église.

Mon point de vue est celui de l’Église, et, aussi religieux soit-il, il n’est jamais un jugement qui vise à opposer les uns aux autres, mais une invitation à regarder la nature réelle d’un engagement sacré.

Seule compterait alors l’image du mariage conventionnel ?

L’analyse se situe ailleurs. Elle est certes religieuse, mais aussi anthropologique, sociologique, historique. Une société qui ne donne pas naissance à la vie meurt.

C’est ce que dit l’Église.

C’est ce que constate la Bible. La réalité aussi d’ailleurs. Les textes sacrés qui expriment toute la force du mariage en montrent aussi toutes ses qualités. La magnifique exhortation apostolique du pape François sur la «joie de l’amour» dévoile une partie de la profonde beauté de cette famille, scellée par l’engagement du mariage entre un homme et une femme.

Mais que faites-vous, dans cette réflexion, de l’homosexualité ? L’excluez-vous ?

Pas du tout. Sur ce point, je situe le mariage ailleurs, entre deux êtres qui, à travers la notion de la famille, envisagent de s’unir pour avoir des enfants. L’amour peut rapprocher des individus de même sexe sans pour autant que l’on parle de mariage. Aristote l’a décrit en évoquant une forme d’amitié. On peut aimer sans chercher à mener cette étrange croisade du «mariage pour tous». En réalité, tous ces débats médiatiques enflammés autour de ce sujet masquent la réalité fondamentale. En effet, le mariage traverse une crise sérieuse depuis plusieurs décennies. On se marie peu et on divorce facilement.

Sur ces «débats», comme vous dites, l’Église et l’Opus Dei n’auraient-ils pas raté un rendez-vous avec la modernité ?

Je vous rappelle que l’Opus Dei est né au xxe siècle au cœur de l’Église. Ses racines sont par essence modernes. Quant au pape François, en moins d’un an, il a présidé deux synodes sur la famille. Au contraire, la question est essentielle. Nous ne voulons aucunement y échapper. Pourquoi ne pourrait-on pas penser, a contrario, que le mariage entre un homme et une femme fondé sur le consentement libre est un apport majeur du christianisme à cette modernité dont vous parlez ?

Est-ce pour cela que l’on n’a jamais autant parlé du mariage des prêtres ?

La question revient souvent dans l’opinion. Plus souvent qu’hier. Mais la règle de l’engagement qui est le nôtre est celle de Dieu, à travers l’exemple de Jésus qui se consacre à son apostolat dans le célibat.

Pourtant, il existe des prêtres mariés !

Oui, mais en en parlant le public oublie que cela s’inscrit dans la tradition de l’Église d’Orient, qui reconnaît le mariage des prêtres lorsque ceux-ci sont mariés avant de devenir prêtres.

Que dire du financement par l’Opus Dei de la manifestation contre le «mariage pour tous»?

Cette idée est ridicule. Je peux le dire, l’écrire s’il le faut: la manifestation n’a pas été financée par l’Opus Dei. Avec le temps, on remarque que, bien souvent, lorsqu’une personne ou un groupe souhaitent se dissimuler et répandre des soupçons, ils font courir des bruits et brocardent l’Opus Dei. Cela intrigue toujours et fait son effet.

Finalement, le «mariage pour tous» ne vous dérange pas plus que cela ?

Mon engagement est clair et mon point de vue aussi. Sans en approuver le contenu, j’aurais préféré l’expression l’«union pour tous». En fait, derrière ces réflexions autour de l’alliance, il y a une grande question qui perturbe notre société, celle du «vivre ensemble ». Même avec les outils qui sont actuellement les nôtres, communiquons-nous vraiment, profondément, suffisamment ? Acceptons-nous, dans le fond, les différences qui composent l’humanité et qui font du voisin un être à découvrir ?

Extrait de "Opus Dei, confession inédite", de Philippe Legrand avec Mgr de Rochebrune, publié aux éditions du Cherche Midi, octobre 2016. Pour acheter ce livre, cliquez ici

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