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Mahmoud Ahmadinejad, 
bientôt la fin ?
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Révolution de palais

Le président iranien prend un peu trop de place aux yeux des autorités religieuses. Ce sont pourtant elles qui détiennent le pouvoir en Iran. Plusieurs événements récents laissent envisager une destitution.

Arnaud Castaignet

Arnaud Castaignet

Arnaud Castaignet est consultant dans une agence de communication, après avoir travaillé en tant que journaliste économique pour une revue britannique.

Spécialiste des questions énergétiques et géopolitiques, il collabore toujours avec la presse étrangère sur des questions de relations internationales. 

Il tient un blog sur consacré à la politique internationale et aux affaires militaires : http://surlefront.blogs.nouvelobs.com/

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De nombreux signes semblent annoncer la disgrâce du président iranien Mahmoud Ahmadinejad. Le Guide suprême de la République islamique, l'Ayatollah Ali Khamenei, serait sur le point de demander officieusement au Parlement iranien de lancer une procédure de destitution à l'encontre du président, accusé de vouloir instituer un pouvoir personnel. Assistera-t-on à la fin pathétique de l'un des dirigeants mondiaux les plus craints ?

Le président iranien a beau être élu au suffrage universel, le vrai représentant du pouvoir est quelqu’un qui n’est pas élu, mais désigné par voie testamentaire de l’ayatollah Khomeini. Avec le titre de “Guide de la révolution”, l'ayatollah Ali Khamenei a dans ses mains la totalité des pouvoirs de l’exécutif et peut donc acculer le président de la République au départ.

Or, depuis de nombreux mois, une bataille pour le pouvoir fait rage entre Ahmadinejad et Khamenei. Les religieux accusent Ahmadinejad de les mettre à l'écart du pouvoir afin de favoriser certains quasi-oligarques issus des pasdarans et de chercher à instituer un pouvoir personnel.

Ces derniers temps, on a aussi pu entendre des accusations bizarres de vaudouisme et de péchés vénaux concernant des proches du président iranien, sans parler des accusations de corruption et de malversations financières pour des contrats, notamment à l'encontre d'Hamid Baghai, membre de la garde rapprochée d'Ahmadinejad.

Majoritairement acquis à Khamenei, les Majlis, membres du Parlement, pourraient à présent lancer une procédure de destitution à l'encontre de Mahmoud Ahmadinejad. 

Plusieurs membres du gouvernement ont déjà dû démissionner ou seraient sur le point de le faire. Le ministre des Affaires étrangères, Ali Akbar Salehi, a dû quitter son poste au bout de trois jours pour avoir nommé comme adjoint Mohammad Sharif Malekzadeh, l'un des proches d'Ahmadinejad chargé de faire la guerre aux religieux. Le chef du cabinet de Mahmoud Ahmadinejad, Esfandiar Rahim Mashai, est également visé.

Le président iranien a essayé de répliquer en limogeant le ministre des Renseignements, mais cette décision a été publiquement annulée par l'ayatollah Khamenei. De même, la décision de Mahmoud Ahmadinejad de se nommer lui-même ministre du Pétrole a été jugée illégale par la Cour constitutionnelle.

Comment expliquer ces tensions entre le leader suprême Khamenei et celui qui fut deux fois son candidat présidentiel Ahmadinejad ? Est-ce une simple querelle d'égos, sur fond d'argent lié au pétrole, ou y a-t-il des raisons davantage structurelles ? 

Souveraineté populaire contre droit divin

La République Islamique d'Iran est fondée sur une incongruité profonde : le mélange entre le principe moderne et républicain de la souveraineté populaire et la notion quasiment médiévale de velayat-e-faqih, autorité suprême de droit divin, indépendante des votes et autres soutiens populaires.

Légitimités divine et populaire s'opposent donc et nombreux furent les présidents à finir par affronter le guide suprême dans les 32 dernières années. Parmi les six présidents de la République Islamique, le premier fut  démissionné, le second assassiné, le troisième (Khamenei) survécut à une tentative d'assassinat et s'opposa vigoureusement à l'ayatollah Khomeini, les quatrième et cinquième, Hashemi Rafsanjani et Mohammad Khatami, ont eu de nombreux conflits avec Khamenei et, à présent, Ahmedinejad risque à son tour d'être contraint au départ.

Ahmadinejad pourrait payer ses tendances à outrepasser ses prérogatives, l'ayatollah Khamenei semblant, lui, également apprécier de plus en plus le pouvoir absolu. En exacerbant le nationalisme iranien, le président s'est parfois placé en contradiction vis-à-vis des religieux prônant l'ummat (communauté spirituelle) comme étant au-dessus de la mellat, la nation. Il lui est également reproché de célébrer les rois perses et le nouvel an Perse, considérés comme païen par les religieux. Plus important, la gestion des ressources pétrolières et le possible enrichissement de plusieurs proches du président iranien ont attisé la haine des religieux.

L'économie étant le talon d'Achille de la République Islamique, le contexte  de crise actuelle offre une parfaite opportunité pour Khamenei d'écarter Ahmadinejad du pouvoir. Le président iranien et ses proches ont totalement surestimé leur pouvoir et pourraient le payer cher. Reste à savoir comment réagiront les millions de partisans d'Ahmadinejad. En cas de destitution du président, l'Iran s'exposerait à des troubles certains et durables.

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