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LREM 2ème génération : ces discrets ralliements à la majorité présidentielle que masque le fracas des départs
©STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

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Si l'on note plusieurs départs de la République en Marche, qu'ils s'agisse de certains députés à un ministre comme Gérard Collomb -qui ne veut plus de l'étiquette du parti- il existe aussi, de manière plus discrète, des arrivées. Pierre Moscovici dans un entretien accordé au Monde, expliquait qu'il ne sera pas candidat aux élections européennes sous la bannière PS et ne semble pas fermé à l'idée de rejoindre Emmanuel Macron.

Maxime Tandonnet

Maxime Tandonnet

Maxime Tandonnet est essayiste et auteur de nombreux ouvrages historiques, dont Histoire des présidents de la République Perrin 2013, et  André Tardieu, l'Incompris, Perrin 2019. 

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Atlantico : "Après la phase « Macron 1 »,peut-on s'attendre à un « Macron 2 », ? A quoi pourrait ressembler le macronisme 2.0 auquel fait allusions Pierre Moscovici ? 

Maxime Tandonnet : En vérité, il existe deux possibilités: soit l'accentuation de la voie qu'il a prise jusqu'à présent, soit une prise de conscience de l'abîme qui est en train de s'ouvrir sous ses pas et un changement de cap. 

Dans la première hypothèse, nous verrions s'approfondir le scénario d'une mise en scène de son propre personnage, en héros romanesque de la cause du bien post-national et européiste, livrant une lutte sans merci au "mal nationaliste et populiste". Cette posture est probablement celle à laquelle songe M. Moscovici. Elle a l'inconvénient de radicaliser la cassure entre les élites, économiques, médiatiques, administratives et judiciaires, qui peuvent s'identifier à cette présidence, et la grande masse de la population qui se sent méprisée, sentiment aggravé par les saillies verbales ou gestuelles du président. Elle condamne alors cette présidence a une impopularité toujours plus grande. 

L'autre hypothèse est celle d'une remise en question et de l'inflexion du cours d'un quinquennat. Elle suppose le choix de l'humilité, de la sincérité, de la vérité, le retour à une présidence plus discrète, laissant le Premier ministre et les ministres gouverner le pays conformément à la lettre de la Constitution, un discours de réconciliation avec la France dite "d'en bas", axé sur une vision plus unitaire des choses. D'autres chefs de l'Etat ont su, dans le passé, s'adapter à une situation bien compromise, à l'image du tournant de François Mitterrand en 1983. Dans l'esprit de chaque personnalité dirigeante s'affrontent une vanité hors du commun et une part de bon sens ou de réalisme. Laquelle des deux l'emportera dans ce cas d'espèce? 

Qui sont ceux qui pourraient venir composer cette deuxième vague ? Quelles sont les orientations politiques qui pourraient encore venir grossir les rangs du macronisme à la veille des élections européennes ? 

Dans la première hypothèse, celle de la fuite en avant, les gains ne peuvent être que limités. On peut imaginer le ralliement de personnalités très engagées dans le système bruxellois, telles que M. Moscovici, ou d'autres qui ont servi au plus haut niveau à Bruxelles, pourquoi pas M. Barnier lui-même. Ceux-là joueront à fond le jeu de la lutte à mort contre le populisme maudit, la vile multitude, les peuples "réfractaires". Mais dès lors que les sondages de popularité continueront alors à s'effriter, la tendance générale restera à la débandade et la classe politique dans son ensemble suivra le sens des sondages. 

Dans la seconde hypothèse, en revanche, celle du changement de cap et de l'adoption d'un discours et d'une attitude plus unitaires, la marge de gains possibles est étendue. On peut imaginer un retour vers le président Macron des déçus du macronisme, par exemple M. Collomb, voire M. Valls lui-même. A la faveur d'une remontée dans les sondages, des personnalités de droite et du centre qui ont pris leur distance ces derniers mois, M. Bertrand ou M. Estrosi, pourraient revenir à des sentiments plus favorables, ceux qui ont prévalu en gros jusqu'à l'été 2018.  

A l'inverse, quels sont les rangs qui pourraient être imperméables aux sirènes du macronisme ? 

L'opinion publique est comme un paquebot, une fois lancée dans une direction, il est extrêmement difficile d'en modifier le cap sur une période de quelques années, en tout cas un quinquennat. La sensation négative produite par une personnalité politique est durable. Une majorité de l'opinion publique ne croit plus au discours sur la "transformation de la France" et encore moins à celui sur le "nouveau monde".  Il paraît inconcevable de modifier, en quelques années, l'impression générale négative des retraités et des Français de la classe moyenne sur le quinquennat de M. Macron. Même des événements titanesques, comme les attentats terroristes, nous l'avons constaté sous le mandat de M. Holllande, provoquent un réflexe légitimiste autour du président, mais il est de courte durée et l'impression profonde, négative, finit par prévaloir. La rupture avec la gauche socialiste et communiste paraît irrémédiable et l'adoption de la PMA n'y changera pas grand chose. L'image inégalitaire de M. Macron dans cette partie de l'opinion, le rejet que suscite sa personne et son parcours, sont trop forts pour être surmontés. Un élargissement de la majorité à droite est encore plus inconcevable, dès lors que de nombreux aspects de la présidence actuelle sont vécus comme le prolongement du quinquennat hollande, notamment sur les sujets régaliens (sécurité, politique d'immigration), sur la dette publique et les déficits, sur le poids des prélèvements fiscaux et sociaux. 

Alors? Alors, il faut bien voir que la politique française se trouve aujourd'hui plongée dans une vertigineuse impasse. Dans les années qui viennent, le chaos politique a toutes les chances de s'aggraver. Jamais l'incertitude sur l'avenir du pays n'a été aussi considérable. Si l'opposition républicaine ne parvient pas à s'organiser et à offrir une alternative crédible, la voie est cette fois-ci toute ouverte en 2022 pour une expérience radicale, de droite ou plus probablement, de gauche.    

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