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Les réseaux sociaux taclent les géants : le cas du retrait de la pub Saint Laurent
©LEON NEAL / AFP

Les entrepreneurs parlent aux Français

Ils ont plié. En une semaine. Ils avaient préparé cette campagne infamante et dégradante pendant des mois, nous avons mis fin à leur complot en 8 jours.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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Avec l’aide éclairée de Stéphane Martin, patron de l’ARP (Outil de contrôle de la pub en France), qui a immédiatement réagit à la fois en tant qu’homme et du fait de sa fonction, à la campagne dégradante d’une société dirigée par une femme ! Car YSL (Yves St Laurent) contrairement à ce que les images de la femme placardées sur nos murs suggéraient, est dirigé par une Femme.

Une femme, qui ne doit pas aimer les femmes mais seulement leur porte monnaie. Une femme qui ne doit pas respecter le combat pour l’égalité de traitement car elle est parvenue et souhaite fermer la porte aux autres en les traînant dans la boue. Une femme qui n’a peut être pas de fille, en âge de juger le travail minable d’une grande marque française et de critiquer le travail de sa mère qui lui inculque ainsi, dès le plus jeune âge toute la haine qu’il faut avoir pour l’image de la femme, pour l’obsession qu’il faut avoir à la maintenir dans les clichés de la possession par l’homme, pour l’image qu’elle devra à son tour véhiculer pour que l’avenir tourne et continue de tourner le dos aux femmes qui veulent sortir du ghetto de la misogynie.

Une femme sans courage, une lâche qui à aucun instant n’aura tenté la moindre justification ou excuse, à l’abri d’un bureau cossu qui a toujours abrité ceux qui fuient leurs responsabilités. La lâcheté et la médiocrité seraient elles devenues un luxe ? Une femme à la place de laquelle je n’aimerais pas être, car on retiendra le mal qu’elle a voulu faire à ses congénères plutôt que le développement d’une marque qui faisait rayonner la France. Elle laissera dans l’histoire du luxe l’une de ses plus noirs souvenirs. St Laurent a éclairé la femme, Mme l’a remise sous terre. J’aimerais tellement que mon camarade HEC, François Henri Pinault, qui lui aussi avec Salma, son épouse, a rejoint des causes qui défendent les femmes, puisse lui indiquer le chemin de la sortie. Afin qu’elle pèse le poids de son irresponsabilité.

Cette campagne que j’ai eu le plaisir et l’honneur de lancer, le hashtag #yslretiretapudegradante a montré à quel point la population française a été choquée dans des proportions qui laissent sans appel, la maigre défense de ceux, très rares, qui ont évoqué la liberté d’expression à travers l’art (sic) et montre à quel point les femmes ont en assez. Assez d’être considérée comme des proies. Des « putes à roulettes ». Des camées d’une extrêmes maigreur offerte, toute cuisse devant, à un fantôme virtuel mais tellement présent. A être toujours celle qui est la victime, l’objet, le joujou, de publicitaires débiles qui faute de créativité ne trouve de visibilité que par la provocation. Car il s’agit de cela. L’étape ultime, après laquelle, leur absence de talent permettra enfin qu’ils retrouvent les joies du chômage, c’est la même photo sans vêtement. Ce jour là Marc Dorcel passera pour un livre pour enfants et YSL disparaîtra des écrans de la mode pour devenir un site porno. De luxe !

Plus de 700 000 personnes avaient vu et suivi et relayé en moins de 3 jours. Journalistes, politiques, avec un temps de retard néanmoins, ont repris en chœur, tout en mettant en scène ceux qui n’avaient pas lancé le mouvement d’ailleurs. Les opportunistes trouvent toujours un meilleur preneur chez certains journalistes, qui préfèrent les mimes aux sources véritables. Vendredi le jury de l’ARP se réunissait et confirmait le caractère dégradant de la publicité, et les affiches étaient enfin retirées. « In social networks we trust » ! LinkedIn aura été un soutien très particulier et fort, publiant un billet écrit par votre serviteur sur la « Femme en danger » lu et transmis plus de 12000 fois en 3 jours. Un record ! Enfin les pays étrangers prenaient le relai presque aussitôt puisque le Daily Miror et les magasines Belges en demandaient autant.

Les réseaux sociaux, composés de petits, mais rassemblés, sont donc l’un des derniers remparts face à la bêtise des puissants. L’inverse est aussi vrai. Plus souvent même. Mais il reste un espoir de résistance à la dictature des tendances, du prêt à penser ou du pauvre à penser, un outil qui permette la critique sans le pouvoir de l’argent et du poids de la marque. C’est rassurant. Enivrant même, à l’heure où les forces du digital nous poussent au prêt à penser dans l’intérêt d’une consommation obsessionnelle. Cette idée qu’il restera chez l’homme une capacité à s’opposer à toute forme de diktat en utilisant un outil qui rêve d’imposer le sien laisse un espoir fabuleux de sursaut face à l’inéluctable.

Un jour, quand nous aurons réussi à imposer que les citoyens puissent choisir leurs candidats à la présidentielle au lieu d’en monopoliser le choix au profit unique des élus. Le jour où nous cesserons de cautionner un ersatz de démocratie, en réalité une oligarchie, afin de garantir que le système choisisse son candidat parmi le système au lieu de laisser au peuple une décision qui le concerne et un choix qui soit le sien, alors les réseaux sociaux seront finalement très utile. Peut être que ce jour est proche. Proche car il semble impossible et que le monde sombre suffisamment dans l’imprévisibilité pour que l’impossible devienne la norme. Avant de s’ennuyer d’un impossible normalisé, faisons en sorte qu’il le devienne.  Au bout de nos doigts un retour à la démocratie.

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