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Les réformes du PS pour moderniser les règles de la présidentielle ou comment confisquer la démocratie
©Reuters

Par les bons sentiments

Le groupe PS à l'Assemblée nationale a proposé cette semaine une série de réformes sur les règles de la présidentielle, en vue de plus de "transparence" notamment. Temps de parole, d'apparition, parrainages des maires... Des dispositions qui avantageront certainement les grands partis, et rendront les autres inaudibles.

Le président de la commission des loi de l'Assemblée nationale, M. Jean-Jacques Urvoas, a présenté le 27 octobre une proposition de loi organique et une proposition de loi simple destinées à rénover et moderniser les "règles applicables à l'élection du président de la République qui interviendra au mois de mai 2017. Les réformes prévues par ces textes vont dans le sens d'un vote normalisé, aseptisé, favorisant les candidatures des grands partis du système politique. Les parrainages des candidats par les élus – 500 au minimum – seront tous rendus publics en temps réel et la liste des parrains diffusés. "le principe de responsabilité politique et l’exigence de transparence doivent conduire à ce que les élus assument leur choix devant leurs électeurs." Ce dispositif donne l'impression de viser à dissuader les soutiens à des candidatures originales ou "hors système", susceptibles d'entraîner la honte ou l'opprobre des grands partis sur tel ou tel maire, avec des conséquences pour ses investitures prochaines... Cet état d'esprit, visant à la normalisation d'un choix par la transparence, pourrait tout aussi bien conduire à supprimer le principe du vote secret qui est pourtant l'un des fondements de la démocratie...

Les modalités complexes sur les temps de parole des candidats vont dans le même sens. Le dispositif, défini par une délibération du CSA du 4 janvier 2011, est remarquablement alambiqué.  En gros, il distingue deux principes : l'équité, avec un temps d'apparition ou de parole proportionnel à l'importance du courant représenté par le candidat, évalué notamment à travers ses résultats aux derniers scrutins ; et l'égalité qui signifie la stricte équivalence du temps d'apparition ou de parole. Au cours d'une période intermédiaire, ou pré-campagne électorale, entre la date de cloture du dépots des candidatures et l'ouverture officielle de la campagne, un principe d'équité prévaut pour le temps d'apparition des candidats sur les médias, mais un principe d'égalité est prévu pour le temps de leurs prises de paroles. Dans la seconde période, à partir de l'ouverture officielle de la campagne,  le principe d'égalité s'applique à la fois aux apparitions et à la prise de parole. 

La réforme proposerait de mettre fin au principe d'égalité pour la prise de parole dans la phase intermédiaire, et d'y appliquer intégralement le principe d'équité. Ce changement est donc clairement au détriment des petits candidats et va donc dans le sens, là aussi, de la pénalisation des petites formations ou des candidats indépendants des grands partis. Là aussi, sous couvert de simplification, la mesure vise de toute évidence à favoriser les grands partis du système, Front national, Républicains, parti socialiste...

S'ajoute à cela l'interdiction de certaines formes de propagande, comme les appels téléphoniques. Il faut y voir une pénalisation de ceux qui n'ont pas accès aux moyens de campagne officiels que sont les grands médias de télévision et de radio.

Bien sûr, ces mesures n'ont qu'une importance secondaire et ne sont pas de nature à changer quoi que ce soit aux résultats du vote. Elle reflètent un état d'esprit, une philosophie, une tendance à la confiscation de la démocratie par une caste de grands partis, incluant le Front national, les Républicains, les socialistes. Nous sommes bien dans la logique de la pensée unique, du conformisme idéologique, de l'enfermement des électeurs dans un choix verrouillé. Cette réformette de l'élection présidentielle ne touche en aucune façon aux grands problèmes de fond qui s'attachent à un système présidentialiste discrédité et source d'impuissance publique. Les responsables politiques français sont désormais obsédés par la conquête de l'Elysée au détriment du sens de l'intérêt général et du bien commun. La présidentialisation du régime se traduit par une vague de narcissisme obsessionnel dans les milieux politiques. Ce narcissisme élyséen, s'ajoutant au quinquennat, a abouti à l'effacement de la fonction de chef de gouvernement, de Premier ministre, qui est par définition le responsable public chargé de gouverner, de faire des choix, de décider. Elle a jeté le pays dans l'immobilisme, l'impuissance, le vertige d'une manipulation et d'une communication qui se substituent à l'action politique. Voilà les vraies questions de nature politique qui se posent aujourd'hui à l'élection et à la fonction présidentielle et que personne ne veut voir, par aveuglement et par lâcheté.

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