Les priorités stratégiques de Macron sont connues, reste à trouver les moyens politiques et financiers<!-- --> | Atlantico.fr
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Emmanuel Macron célèbre sa victoire à l'élection présidentielle française, au Champ de Mars à Paris, le 24 avril 2022
Emmanuel Macron célèbre sa victoire à l'élection présidentielle française, au Champ de Mars à Paris, le 24 avril 2022
©THOMAS COEX / AFP

Atlantico Business

Pour Macron, les amours n’ont pas été débordants, les soucis très nombreux et « les emmerdes » sont à venir

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Les chefs d’entreprises connaissent déjà le plan de vol de la gouvernance française, ses incertitudes politiques et ses besoins financiers.

Alors qu’une majorité des suffrages exprimés se sont finalement portés sur Emmanuel Macron, la plupart des Français s’interrogent sur la façon dont il va affronter les problèmes qui submergent la société française. 

Finalement, les Français n’ont pas cru Marine Le Pen capable d’assumer « la fonction de présidente ». Ils ont pensé que E. Macron avait plus de qualités pour incarner la gouvernance, mais le résultat de l’élection ne lui donne sans doute pas les moyens de résoudre les problèmes. Il va falloir ramer maintenant.

Sans rentrer dans le détail de son plan de charge, tous ceux qui sont habitués à faire des plans stratégiques imaginent assez bien celui qui va s‘imposer à Emmanuel Macron dès ce lundi. 

1èrepriorité : Reprendre son rôle de médiateur dans la guerre en Ukraine. Emmanuel Macron est encore crédible pour obtenir une reprise des négociations. Son deuxième mandat pourrait commencer par un voyage à Kiev pour définir de nouvelles conditions susceptibles d’établir un cessez-le-feu. 

2e priorité : Reprendre son rôle de président de l’Union européenne pour éviter que les fissures ne s’élargissent et lancer un plan de réforme des institutions autour de deux axes : une défense européenne et une stratégie d’indépendance énergétique. Quelle que soit l’issue de la guerre en Russie, l’Europe ne tiendra pas si la moitié des pays complètement dépendants d’un seul fournisseur ne font pas leur transition. Ajoutons à cela que la politique énergétique sera au cœur de la lutte contre le réchauffement climatique. 

Ces deux premières priorités sont liées et pourraient faire l’objet de nombreux voyages dans les capitales européennes et se terminer par une rencontre avec Moscou. 

3e priorité : Renforcer la compétitivité industrielle française. C’est la clef de la puissance au niveau international. C’est dans son ADN personnel mais ça n’est pas naturellement dans l’ADN français. La France préfère naturellement un Etat fort et centralisé que le jeu des intérêts individuels chers aux libéraux. En bref, la France n’est pas libérale. Il lui faut enfin montrer que les Français ont tout à gagner à sortir les cartes de la liberté et de l’économie de marché. Moins d’assistance sociale et plus d’ascenseur social. Alors, ça passe par la réforme des retraites, la réforme du système de santé et la réforme de l’éducation. Autant de dossiers qu’on a très peu ouverts pendant la campagne, mais que le mur des réalités va nous obliger à traiter. Très difficile, parce que la plupart des protagonistes pensent qu’il s’agit d’une question de quantité de moyens, alors qu‘il s’agit d’une question de qualité. Mais difficile à expliquer à la fonction publique que les personnels ne sont pas au niveau. 

4e priorité : Lutter contre les inégalités croissantes. La France est au bord de la colère disent les sociologues, et si la France va mal, c’est que son ressenti de la situation est très toxique. Les inégalités sont de plus en plus flagrantes. Elles sont donc de moins en moins acceptées ; inégalités de revenus et de fortune, égalités culturelles et de formation, inégalités de santé, inégalités de logement etc. 

La France a rejoint sur le terrain des inégalités les États-Unis ou le Royaume-Uni. L’Etat providence a échoué. 

Si les objectifs sont connus, les moyens politiques n’existent pas, les moyens financiers risquent de manquer

  • L’une des premières taches qui va incomber très concrètement au président de la République va être de se constituer une majorité politique cohérente, solide, courageuse et représentative. Bref, ça va être pire que la quadrature du cercle. Sur la droite ou sur la gauche, il n’existe pas de majorité. Les macronistes (le mouvement En marche) ne seront ni assez nombreux, ni assez légitimes pour garantir au président une majorité assez forte et compétente pour lui permettre de faire passer ses réformes. 

  • La deuxième tâche très concrète va être d’établir une loi de finances rectificative pour le deuxième semestre et un budget pour 2023. Ces budgets ne peuvent pas promettre un retour à l’équilibre maastrichtien. Et même, si les critères de Maastricht étaient assouplis, ce qui est probable, le ministre de l’économie - Bruno Le Maire encore sans doute) ne peut pas prétendre un redressement rapide et ignorer les risques d’inflation et de hausse des taux d’intérêt. 

Sa mission, et le ministre actuel de l‘économie en est parfaitement conscient ; sera de limiter la hausse de l’endettement public (celui de l’Etat, des collectivités publiques et du système social). Le prochain ministre de l’économie sera chargé d’interdire toute hausse des dépenses de fonctionnement ; parce que ces dépenses courantes ne peuvent être financées que par des emprunts plus chers qu’actuellement. 

En bref, la France peut très bien supporter la charge d’endettement actuel puisque cette dette a été contractée pour dix ans ou plus à taux zéro... Mais la France doit s’interdire toutes dettes courantes nouvelles parce qu’elles seraient contractées à un taux positif. 

Le gros des embuches du prochain quinquennat sont au niveau politique (quelle majorité) et au niveau financier : quels moyens pour le financement public, hors investissement parce que le bon investissement trouve toujours à se financer. 

Les embuches vont aussi se durcir avec les incertitudes externes. Aznavour a écrit tout ça avec beaucoup de talent et un peu d’amertume. Pour Macron aussi, les amours n’ont pas été débordantes, les ennuis ont été nombreux, les emmerdes sont à venir. 

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