Les policiers font grève mais sont-ils vraiment les plus pénalisés dans le budget 2014 ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Les policiers français sont moins bien rémunérés que la moyenne des policiers européens.
Les policiers français sont moins bien rémunérés que la moyenne des policiers européens.
©Reuters

Sucrées !

Le syndicat majoritaire de la police Unité-SGP-FO a appelé à une journée de mobilisation le 22 octobre devant les préfectures de région et Bercy. Le ministre de l’Intérieur Manuel Valls entend en effet faire une économie de 12 millions d’euros en diminuant l’indemnité de sujétions spéciales de police (ISSP) des élèves policiers et gendarmes en école.

Mathieu Zagrodzki

Mathieu Zagrodzki

Mathieu Zagrodzki est politologue spécialiste des questions de sécurité. Il est chercheur associé au Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales et chargé de cours à l'université de Versailles-St-Quentin.

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Atlantico : Le syndicat majoritaire Unité-SGP-FO a appelé à une journée de mobilisation le 22 octobre devant les préfectures de région et Bercy. L'objet de la colère : la baisse d'une indemnité pour les élèves prévue dans le budget 2014. Au-delà de cette revendication, le budget 2014 et plus largement leurs conditions actuelles de travail donnent-ils aux policiers de bonnes raisons de faire grève ?

Mathieu Zagrodzski : Il est difficile de répondre à cette question. Les policiers sont plutôt mieux lotis dans le budget 2014 que d’autres administrations, même si l’augmentation d’effectifs va être cosmétique (environ 280 fonctionnaires). Le mécanisme de baisse des effectifs a été stoppé et la courbe plutôt inversée. On est dans un contexte budgétaire compliqué dans lequel la police, la gendarmerie et la justice tirent plutôt leur épingle du jeu.

On ne manque pas de policiers en France. Si on ajoute les policiers et les gendarmes titulaires, on arrive à 220 000, ce qui est bien au-delà de nos voisins européens.

La rémunération des policiers est-elle faible comparée à celle de nos voisins européens et par rapport à celles des autres fonctionnaires français ?

Il est vrai que les policiers français sont moins bien rémunérés que la moyenne des policiers européens, et les policiers américains le sont davantage. Un gardien de la paix gagne environ 1700 euros par mois, son équivalent américain dans une ville comme Los Angeles gagnera près de 50 000 dollars par an. Les policiers ont des raisons d’être relativement frustrés, comparé à la situation de leurs voisins européens et ce qui a mis le feu aux poudres est la réduction d’une indemnité.

La différence entre les policiers et les autres fonctionnaires est que les premiers bénéficient de davantage de primes que d’autres professions. Cela se justifie par un certain nombre d’inconvénients comme la dangerosité de certains postes, le fait de ne pas avoir le droit de faire la grève ou encore les rythmes de travail décalés. Certains postes difficiles (les commissaires ou les commandants) ont des primes supplémentaires mais toutes ne sont pas prises en compte dans le calcul de la pension de retraite. Il est difficile de comparer deux professions de la fonction publique.

Les gendarmes dénoncent également le gel de leur budget. Leur situation est-elle comparable ?

La situation n’est pas comparable car les gendarmes n’ont pas le droit de se syndiquer et ne peuvent monter au créneau comme le font Alliance et SGP. Les gendarmes travaillent sur des zones moins difficiles, ils couvrent 90% du territoire et gèrent 25% des affaires. Ils ont en charge des zones périurbaines qui peuvent être difficiles mais les zones les plus difficiles restent gérées par les policiers.

Ont-ils une chance d'être entendus ?

Je pense que oui. Comme souvent, il y aura compromis entre les volontés du gouvernement et celle des syndicats. Il n’est pas possible de gouverner la police sans les syndicats, la police est l'une des professions les plus syndiquées de France (plus de3 policiers sur 4 sont syndiqués). Les décisions dans la police se font souvent avec l’aval du syndicat. Des policiers qui ne mettent plus de PV ou qui font moins de contrôle d’identité font désordre et entraînent des pertes sèches. On est dans un contexte où on reproche au gouvernement son autorité, où les lois sont controversées, si en plus les policiers et les gendarmes font la grève du zèle, c’est un échec politique.


Propos recueillis par Karen Holcman

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