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Les dernières découvertes sur le fonctionnement des trous noirs
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Porte des étoiles

Des scientifiques ont récemment remis à l'honneur la théorie expliquant que les tourbillons marins auraient de grandes similitudes avec les trous noirs. Retour sur un corps céleste qui passionne toujours autant le grand public.

Jean-Pierre Luminet

Jean-Pierre Luminet

Jean-Pierre Luminet est un astrophysicien, spécialiste de réputation mondiale des trous noirs et de la cosmologie. Il est directeur de recherches au CNRS et membre du Laboratoire Univers et Théorie (LUTH) de l'observatoire Paris-Meudon. Il est chevalier des Arts et des lettres, et a été lauréat du prix international Georges Lemaître 1999 pour son travail de recherche

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Atlantico: Récemment, des scientifiques (George Haller et Franscisco Beron) ont exposé une théorie qui démontrerait que les tourbillons océaniques auraient de réelles similitudes avec les trous noirs. Si la comparaison n’est pas nouvelle, celle-ci fait la une des magazines de vulgarisation scientifique et souligne l’attrait toujours présent pour les trous noirs. Mais les connaissons-nous vraiment ? Que sont réellement ces corps célestes ?  

Jean-Pierre Luminet : Les trous noirs sont des objets extraordinairement compacts, des puits de gravitation. Il faut qu’il y ait une certaine masse contenue dans un certain volume, à partir d’une certaine masse l’objet est appelé trou noir. Pour faire simple, il faut imaginer l’espace comme un tissu élastique, si vous mettez des billes sur votre tissu élastique, les tissus vont se courber autour de la bille. Le trou noir est une configuration ou la bille serait tellement pesante, tellement dense, que la déformation prendrait la forme d’un puits. Ce qu’on appelle le trou noir c’est l’intérieur du puits avec comme frontière une montagne de surface solide, le bord du puits. Si vous franchissez le bord du puits, vous ne pouvez pas revenir en arrière, c’est le cas des rayons lumineux. La configuration de la matière et de l’énergie est tellement condensée qu’elle provoque une zone de non-retour dans l’espace et le temps. C’est la définition théorique et abstraite.

En astronomie on cherche à comprendre comment ces objets peuvent effectivement se former et s’ils existent vraiment. On connaît plusieurs processus de formation de trous noirs, cela se joue dans l’effondrement gravitationnel. Si vous prenez une étoile qui brille grâce à l’énergie thermonucléaire. Mais à la fin de leur vie, le cœur des étoiles se contracte sous l’effet de la gravité écrase les astres sur eux-mêmes. À partir d’une certaine taille critique cet effondrement produit un trou noir. Tous les modèles de l’astrophysique montrent que toutes les étoiles qui au départ dépassent une certaine masse de l’ordre de trente fois la masse soleil créent nécessairement un trou noir.On pense aujourd’hui que dans notre galaxie où sont présentes un milliard d’étoiles, il y a au moins 10 millions de trous noirs. On sait qu’au centre de chaque galaxie, il y a un trou noir gigantesque. Dans la voie lactée, on observe ce trou noir au centre de la galaxie depuis 20 ans. Il aurait une masse d’environ 4 millions de fois celle du soleil. Par ailleurs, les trous noirs peuvent absorber tout ce qui passe à leur portée : étoiles, astéroïdes, planètes… Mais pas d’inquiétude, la Terre n’est pas concernée ! Et pour cause, le trou noir le plus proche de nous est à plusieurs milliers d’années-lumière ! Pour parler de danger, il faudrait qu’il y ait un trou noir qui fasse irruption dans le système solaire et c’est impossible. Le soleil n’est pas assez massif pour devenir un trou noir. Même si on mettait un trou noir à la place du soleil, de même masse que lui, il n’y aurait pas d’effet particulier sur le plan de la gravitation sur Terre. Il faut être tout près du trou noir pour en ressentir les effets.

Il semble que les trous noirs, comme le big bang passionne toujours le grand public. Mais pourquoi avons-nous un tel intérêt pour les trous noirs? Existe-t-il un mythe autour de ces corps ?

Pour les physiciens, les astronomes, ce sont des objets qui ont des propriétés absolument fascinantes. Pour le grand public, il y a une part d’imaginaire qui entre en jeu. Il est l’archétype du gouffre sans fond, où tout fini infini, le symbole de la fin de quelque chose, sans espoir de retour… toutes ces idées imprègnent l’imaginaire, à travers la littérature, la poésie… Il est difficile à comprendre et c’est aussi pour cela qu’il fascine.  

Le trou noir n’émettant pas de lumière et se trouvant justement à des années lumières de la Terre sont invisibles à l’œil nu. Mais comment sont-il alors étudiés ?  Les tourbillons peuvent-ils vraiment nous apprendre beaucoup à propos des trous noirs?

A priori, le trou noir ne laisse pas échapper de lumière, on ne peut donc effectivement jamais l’observer directement. On a la preuve qu’ils existent dans l’univers car la matière va briller ou graviter autour du trou. Il fait en effet subir à la matière quelque chose qu’aucun autre astre n’est capable de faire. L’aspirateur gravitationnel qu’est le trou noir aspire le gaz de l’étoile qui l’accompagne, le gaz tombe en tourbillon, il est chauffé par des rayons X, et nous pouvons observer les conséquences de ce processus grâce à des télescopes envoyés dans l’espace qui détectent le rayonnement d’énergie.

Mais pour faire comprendre au grand public les grands principes de l’astronomie et des trous noirs, il est intéressant d’essayer de trouver des phénomènes traditionnels qui peuvent évoquer certaines propriétés des trous noirs. Depuis longtemps, les scientifiques utilisent l’analogie assez bonne entre un trou noir et un tourbillon. Le trou noir tourne effectivement en lui-même, comme un tourbillon. Je l’ai pris en exemple dans les années 80 en le surnommant le « maelström cosmique ». Voici l’explication : dans un tourbillon marin et jusqu’à une certaine distance, tant que votre bateau tient une vitesse supérieure au courant marin, vous y échappez. Si vous vous approchez, il y a une zone particulière dans laquelle la vitesse du bateau est suffisante pour pouvoir encore vous échapper en effectuant une longue spirale sortante. Et si vous vous approchez encore, la vitesse radiale, qui vous entraîne vers le centre, si elle est supérieure à la vitesse de votre bateau, vous entraîne vers le fond. C’est exactement la même chose pour un trou noir à rotation.

Étudiés et objet de fascination depuis de longues années, les trous noirs ont-ils révélé tous leurs secrets ? La recherche en ce domaine a-t-elle bien avancé ?

Je travaille sur les trous noirs depuis plus de trente ans, et je l’ai vu beaucoup progresser. Aujourd’hui, il réside beaucoup d’inconnus. Et la grande question demeure : qu’est-ce qu’il se passe au fond ? Seule la théorie pourra nous le dire. Une théorie suggère d’ailleurs que le trou noir n’aurait pas de fond. Ainsi, si l’on rentrait dans un trou noir, il y aurait la possibilité de se retrouver ailleurs dans l’univers. C’est une idée sérieuse sur le plan mathématique mais on ne sait pas  si ça se réalise réellement dans l’univers. Mais cette image laisse rêveur, elle a été très exploitée par la science-fiction, comme dans la série Stargate, la « porte des étoiles ».  Mais sur ce plan, la recherche n’est pas assez avancée, nous n’avons pas encore tous les outils théoriques et conceptuels pour résoudre cette question bien que beaucoup d’études y soient consacrées.

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