Les constructeurs peuvent-ils se mettre en danger en ratant leur Mondial de l'Automobile ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le Mondial de l'Automobile : crash test pour les constructeurs ?
Le Mondial de l'Automobile : crash test pour les constructeurs ?
©Reuters

Belles carosseries

Pour les industriels, le Mondial est un rendez-vous immanquable. Mais pour les constructeurs l'enjeu est plus de vendre du rêve que de vendre des voitures.

Bernard Jullien et Christophe Benavent

Bernard Jullien et Christophe Benavent

Bernard Jullien est économiste.

Il est directeur général du réseau international Gerpisa (Groupe d’étude et de recherche permanent sur l’industrie et les salariés de l’Automobile).

Christophe Benavent est professeur à Paris Ouest. Il enseigne la stratégie et le marketing et dirige le Master Marketing opérationnel international l. Il assure aussi la responsabilité de la rubrique "Digital" de la revue Décision Marketing.

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Atlantico : Pour les industriels, participer au Mondial de l'automobile, à Paris, est une énorme opération de communication. Quel est l'enjeu de cette rencontre pour les fabricants de voiture ?


Bernard Jullien : Cela fait partie des questions que l'on ne se pose pas ! Il y a là un rituel dont on ne se demande plus s'il sont indispensables. Il est vrai qu'avec la crise, certains constructeurs renoncent à quelques salons.

Pour un constructeur, il s'agit de mettre en scène l'ensemble de son offre. Il montre à toute la chaîne qu'il fait partie des puissants. C'est une manifestation de force, commerciale, qui vise aussi bien le public, la presse que les réseaux commerciaux. Ce sont aussi de grands rassemblements qui permettent aux professionnels de l'automobile de participer à toutes sortes d'échanges sur la stratégie, la situation économique ou les perspectives à venir.

Les salons ne sont pas tous aussi importants. Paris, qui a lieu tous les deux ans plus ou moins en alternance avec Francfort, est plus crucial que celui de Genève. Ce dernier, par exemple, permet surtout aux constructeurs de rencontrer la presse, les analystes et certains spécialistes. Le Mondial, c'est aussi une rencontre avec le public et l'occasion de tester grandeur nature la réaction des gens face aux offres et aux produits.

D'autres choses relèvent du concept. Elles permettent de sentir vers quoi l'industrie automobile se tourne. Il faut y voir des formes de tests auprès du public, des médias et des autres acteurs du secteur. Par exemple, étudier le regard des visiteurs sur de petits véhicules urbains électriques ou sur des Peugeot plus haut de gamme permet de tester l'adhésion.

Peut-on évaluer si un salon est réussi ou raté pour un constructeur ?

Les salons, c'est encore pire que les campagnes de publicité. Il y a peu de données indicatives sur l'effet que cela peut avoir. Les constructeurs ne prennent pratiquement pas de commande. Alors on tente de mesurer le nombre de visiteurs sur le stand, le nombre de retours dans la presse ou encore le volume de prise de contacts.

Il s'agit surtout de valoriser les orientations que l'on souhaite affirmer pour une marque. Pour PSA, le pari sur une montée en gamme peut ainsi être clairement affiché. Les constructeurs peuvent aussi comparer leur stand avec ceux des voisins. PSA, encore une fois, est coincé entre Mercedes et Renault et peut ainsi garder un œil sur ses principaux challengers.

Pour Renault, il peut s'agir de mettre en avant un produit. La Clio 4 est ainsi largement promue sur ce salon. Si le choix du constructeur était totalement malheureux, il y a des chances pour que cela se remarque et dans ce cas, on s'en souviendrait. Avec 20 Clio, toutes de la même couleur, si la voiture ne plaît pas, il est possible que ce soit perçu par le public.

La démarche est-elle la même pour un fabricant de voitures urbaines et domestiques que pour un fabricant de voitures de sport très haut de gamme ?

Les marques généralistes, pour des raisons de volumes, ont en général des stands plus importants. Ensuite, il y a une dimension nationaliste. En France ou en Allemagne, les marques du pays sont mises en avant dans les hall les plus accessibles pour le public.

Les différences entre marques généralistes et marques dites premium sont légèrement effacées. Sur un Mondial, tout le monde cherche à renvoyer une image premium. Les hôtesses sont aussi charmantes, la présentation aussi luxueuse. Il y a presque le même effort de fournit en terme d'acceuil pour vendre un véhicule de luxe que pour vendre une voiture à 10 ou 12 000 euros.

Si différence il y a, c'est plus certainement dans les espaces VIP. Il est fort possible que là, les rencontres avec les responsables de chez Dacia ou de chez Jaguar ne se passent pas dans les mêmes conditions.

Le public est-il influencé par ce type de salons dans ses choix d'achat de véhicules ?

Infiniment peu. La manière dont les gens visitent les salons renvoient très peu aux démarches commerciales. Les visiteurs se précipitent au contraire vers les stands où se trouvent les voitures qu'ils ne vont pas acheter. Typiquement, les stands Bentley, Ferrari ou Rolls vont être fréquenté sans commune mesure avec les volumes de ventes qu'ils signent. L'acheteur d'un break ou d'une familiale ira rarement voir le véhicule qu'il envisage d'acheter au Mondial.

Pour des marques dont les réseaux sont plus fragiles et la politique publicitaire plus en retrait, cela peut être plus important. Si vous êtes en quête d'un monospace et que vous n'avez vu que les marques françaises, il se peut que vous découvriez sur le stand Mazda un véhicule dont vous ignoriez l'existence. Reste qu'avec l'explosion d'Internet, il n'y a guère plus d'enjeu en termes d'information.

Propos recueillis par Romain Mielcarek

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