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Les affiches de la campagne des législatives.
Les affiches de la campagne des législatives.
©GAIZKA IROZ / AFP

Atlantico Business

Triste démocratie qui s’est autorisée un débat d’ego, de pouvoir et de démagogie sur les thèmes obsessionnels qui ressortent dans l’opinion. Mais le grand perdant est l’économie. Comme si l’argent que l’on a promis de distribuer allait tomber du ciel. Le besoin le plus urgent, c’est de créer de la richesse.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Législatives : le grand perdant de ce premier tour est l’économie.

Triste démocratie qui s’est autorisée un débat d’ego, de pouvoir et de démagogie sur les thèmes obsessionnels qui ressortent dans l’opinion. Mais le grand perdant est l’économie. Comme si l’argent que l’on a promis de distribuer allait tomber du ciel. Le besoin le plus urgent, c’est de créer de la richesse.

Personne n’en a parlé. Si on décrypte les débats et les programmes, on notera que les mots qui ont dominé le vocabulaire politique sont pouvoir d’achat, impôts, cotisations, retraites, protection et protectionnisme, immigration et sécurité. Bien sûr. 

Mais on notera aussi que les mots qui n’ont jamais été utilisés appartiennent au monde de l’entreprise : la croissance, la productivité, la compétitivité, l’investissement et la création d’emplois… autant de concepts sur lesquels les responsables d’entreprises appuient dans leur vie quotidienne, qui n’ont jamais été mentionnés, jamais été utilisés par les responsables politiques sauf pour se plaindre d’un monde trop peu transparent à leur goût.

La vraie question qu’il faut poser au lendemain de ce premier tour des législatives est de savoir si les électeurs qui se sont mobilisés en masse pour aller voter ont compris et cru toutes les promesses qui leur ont été faites, parce que jamais depuis 50 ans on n’avait assisté à une telle débauche de propositions incohérentes, floues, contradictoires et ridicules, si elles n’étaient pas dangereuses. 

Faut-il être bête, ou affreusement cynique pour croire véritablement tout ce que les partis ont dit? 

Le premier tour de ces législatives a ressemblé à une visite festive et inquiète dans une sorte de caverne d’Ali Baba imaginaire. On est loin de l’exercice de pédagogie attaché à la démocratie. 

Qui pouvait refuser une baisse de la TVA sur les énergies fossiles de 20% à 5%? Personne, même ceux qui n’ont pas de voitures. Tous ceux qui auraient pu, les écologistes par exemple, se sont tus. 

Qui aurait pu refuser une augmentation du SMIC de 14% d’un seul coup? Évidemment personne, parce que si le SMIC augmente aussi vite dans de telles proportions, il est évident que tout le monde a cru qu’il pourrait en profiter sauf les chefs d’entreprise nombreux qui croient dur comme fer sans réussir à se faire entendre qu’une telle disposition mettra leur compte d’exploitation à genoux. 

Mais qui refusera de ramener la retraite de 64 à 62 ans puis à 60? Personne sauf ceux qui savent qu’il faudra travailler plus longtemps. Ils auraient pu mais ils n’ont pas osé. Qui refusera d’exonérer d’impôts les moins de 30 ans? Personne. Qui peut se mettre en colère contre l’augmentation des APL? Personne. Qui viendra grogner sur les augmentations d’impôts? Personne puisque la grande majorité n’en paie déjà pas. Même Mbappé, qui les fait payer par son club. Même pas les milliardaires qui ont les moyens de délocaliser leurs fortunes. Au fait, sait-on combien il y a de milliardaires en France? Beaucoup dira la foule. Pas autant que ce que vous pensez disent les statistiques qui en ont décompté 77 exactement avant les programmes électoraux.

On pourrait feuilleter à loisir le catalogue des propositions qui ont été faites pour attirer les mouches que sont les électeurs désabusés par des dizaines d’années de promesses non tenues. Peu importe le passé, nos démocraties occidentales fonctionnent désormais et de plus en plus avec des promesses comme carburant… alors que ce carburant est éminemment inflammable. 

Ou bien les promesses qui seront réalisées ne seront pas finançables et elles creusent le trou dans lequel on va tomber. 

Ou bien les promesses sont mises de côté au lendemain de l’élection ou bien elles fabriquent de la frustration et de la colère sociale. Dans tous les cas, il va falloir que les institutions de la 5e République soient très solides pour maintenir l’équilibre entre les trois blocs politiques qui se seront cristallisés autour de promesses irréalisables. À moins que cette situation et le climat de peur-panique qu’elle révèle ne provoquent une prise de conscience des réalités qui s’imposent.

La démocratie française a un problème avec l’argent. Les politiques n’aiment ni l argent ,ni les riches parce qu’ils s’ils imaginent que ça serait bon à leur image les responsables politiques font mine de croire que l’argent n’est pas un problème. Mais , Ils sont incapables d’expliquer qu’avant de redistribuer des richesses, il faut les créer, les accumuler même. Jamais dans cette campagne législative, un responsable politique de gauche ou de droite n’a pris le temps de dire qu’il fallait avant toute chose assurer le redressement de l’économie, faire en sorte que l’entreprise fonctionne et que tous ses acteurs et ses partenaires travaillent davantage. 

On a donc besoin de croissance et de travail. Faisons le pari que l’opinion se retrouvera sur la nécessité de défendre des projets qui participent et contribuent à la prospérité. La forte participation, la probabilité d’un blocage politique, et la peur qui a envahi le corps électoral, peuvent entraîner les forces de la démocratie à trouver des compromis pour gouverner. Raymond Aron disait que la politique n’était pas de choisir entre le bien et le mal mais plutôt entre ce qui est détestable et préférable. La semaine qui s’ouvre permettra sans doute à l’opinion de choisir des formes de compromis qui soient compatibles avec les contraintes de la réalité. Dans ce cas, l’économie sera évidemment omniprésente dans la campagne du deuxième tour. Exclue parce que détestable aux yeux des leaders économiques, l’économie pourrait prendre sa revanche au deuxième tour.

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