Le Parti communiste chinois valide le 3e mandat de Xi Jinping. Et voilà ce que révèle sa feuille de route <!-- --> | Atlantico.fr
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Le président chinois Xi Jinping prête serment après avoir été réélu président pour un troisième mandat au Grand Palais du Peuple à Pékin, le 10 mars 2023.
Le président chinois Xi Jinping prête serment après avoir été réélu président pour un troisième mandat au Grand Palais du Peuple à Pékin, le 10 mars 2023.
©NOËL CELIS / AFP

Guerre froide

Xi Jinping a obtenu vendredi un historique troisième mandat de président de la Chine après un vote formel du Parlement (2 952 votes pour, zéro contre, zéro abstention).

Emmanuel Lincot

Emmanuel Lincot

Professeur à l'Institut Catholique de Paris, sinologue, Emmanuel Lincot est Chercheur-associé à l'Iris. Son dernier ouvrage « Le Très Grand Jeu : l’Asie centrale face à Pékin » est publié aux éditions du Cerf.

 

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Atlantico : Xi Jinping a obtenu, vendredi 10 mars, un historique troisième mandat de président après un vote formel des députés. Le Parlement étant quasiment inféodé au Parti communiste chinois (PCC) au pouvoir, l’issue du scrutin ne faisait aucun doute, et le résultat annoncé est sans appel : 2 952 votes pour, zéro contre, aucune abstention. Cette élection donne-t-elle carte blanche à Xi Jinping ?

Emmanuel Lincot : Evidemment il s'agit ici d'un simulacre de démocratie car toutes les décisions ont été prises en amont et principalement durant le XX° Congrès du PCC durant lequel l'ancien Président Hu Jintao a été éconduit devant les caméras du monde entier. L'assemblée nationale est en cela une boîte à enregistrement et Xi Jinping a désormais les pleins pouvoirs en s'appuyant sur des cadres qui lui doivent tout. Ce sont donc des hommes liges et beaucoup ont été changés à commencer par le premier ministre. Ainsi, Li Keqiang a été remercié au profit de Li Qiang tandis que He Lifeng est nommé vice-premier minsitre et Dingn Xuexiang intègre le cabinet présidentiel. En revanche, l'on peut constater que nombre de postes clés dans le domaine de l'économie ont été maintenus. Ainsi Wang Wentao et Liu Kun, respectivement ministre du commerce et ministre des finances, demeurent en fonction. Le système est désormais intégralement verrouillé. Mais gare: les Chinois savent aussi que lorsque le dragon est au sommet de son envol, il ne peut que retomber...

Quelles sont les priorités du président chinois, aussi bien en politique intérieure qu’en politique étrangère ?

Emmanuel Lincot : L'augmentation du budget militaire, en hausse de plus de 7 %, dit tout. Xi Jinping n'optera pas pour l'esquive en cas de confrontation avec les Américains. Le soutien de plus en plus explicite de Xi Jinping à Vladimir Poutine diminue désormais les chances de voir véritablement la Chine faire pression sur la Russie dans sa guerre contre l'Ukraine. Le duo russo-chinois quoi qu'affaibli s'appuie d'ailleurs sur des acteurs régionaux comme l'Iran et la Corée du Nord contre le bloc occidental. Bien sûr ce que Russes et Chinois souhaitent c'est une fracture au sein de ce bloc occidental. Les premières dissensions entre Français et Allemands sont apparues et il n'est pas dit que le voyage du Président Emmanuel Macron le 6 avril prochain en Chine soit bien vu des autres capitales européennes non plus que de Washington. En réalité et pour répondre à votre question, il n'y a guère de différence entre la politique intérieure et extérieure mise en oeuvre par la Chine. Celles-ci doivent répondre au même impératif: faire en sorte que la Chine recouvre son rang et qu'elle finisse par imposer ses propres règles à l'ensemble de la communauté internationale.

Peut-on s’attendre à quelques changements dans sa manière de présider ? 

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Emmanuel Lincot : Dans le ton, je pense qu'il faudra s'attendre à une vindicte anti-occidentale encore plus virulente. Il y a quelques heures seulement, Xi Jinping a reproché aux Etats-Unis d'entraîner les pays occidentaux dans "une politique d'endiguement, d'encerclement et de répression contre la Chine". L'inquiétant, c'est que Xi Jinping se retrouve totalement seul. Or un homme seul n'est jamais en bonne compagnie...  Le fait de changer un premier ministre qui lui était parfois critique est en soi attendu mais cela signifie désormais que Xi Jinping ne souffre plus d'aucune contradiction. Les duos que nous avons connus dans le passé permettaient toujours d'établir un certain équilibre dans le style comme les choix stratégiques entre les différents clans qui caractérisent le pouvoir chinois. Cette configuration n'est plus et cela peut s'avérer à terme très dangereux.

Un changement de gouvernement est-il à l’ordre du jour ? Si oui, quelle importance donner au choix des ministres ? 

Emmanuel Lincot : Bien sûr le premier ministre Li Qiang va prendre toute la lumière. Nous le connaissons peu: secrétaire général du Parti à Shanghai, sa gestion calamiteuse de la pandémie dans la conurbation et les émeutes du 30 novembre ne lui ont paradoxalement rien coûté. Au contraire même, ce proche de Xi Jinping bien que n'ayant aucune expérience gouvernementale devient le numéro 2 du régime. Est-ce un homme falot ? Peut-il nous surprendre et se retourner contre son mentor ? L'avenir nous le dira. En tout cas, il va être mis à rude épeuve contre les Occidentaux, dans les litiges frontaliers et maritimes qui opposent la Chine à ses voisins, par rapport à une crise économique grave qui inquiète beaucoup de ses concitoyens. Les défis sérieux commencent.

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