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Le graphique qui fait peur: de moins en moins de Français travaillent depuis 1975
©PHILIPPE HUGUEN / AFP

Marché du travail

De moins en moins de Français travaillent depuis 1975… L’INSEE vient de publier une série longue sur la population active en France (les plus de 15 ans) au sens du Bureau International du Travail (BIT), et les résultats sont sans appel : la part de la population active ne cesse de diminuer depuis cette date.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Il faut absolument lire les statistiques de l’INSEE sur la population active en France depuis 1975, qui éclairent de façon très utile le débat sur l’emploi, mais aussi sur la croissance et sur les dépenses sociales. Les statistiques qui sont reprises et décortiquées ici sont établies par référence à la définition de la population active selon le Bureau International du Travail. Elles ne résultent donc pas d’un tripatouillage à la française, mais correspondent à des définitions internationales bien ancrées.

On soulignera qu’il s’agit ici d’une approche de la population active (les 15 ans et plus) en emploi et au chômage, rapportée à la population totale. 

Le taux d’emploi baisse de 3 points en 35 ans

Le constat le plus évident est que le taux d’emploi en France a atteint un point culminant avec Raymond Barre. En 1980, près de 58,5% des Français de plus de 15 ans étaient soit en emploi, soit inscrits au chômage. Ce taux d’emploi a entamé une forte pente baissière avec l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981. Pendant dix ans, la part des Français en emploi n’a cessé de baisser, pour atteindre un point bas à 55,5% en 1990.

On verra dans ce repli l’effet de la retraite à 60 ans, puis de la massification du baccalauréat. 

Au tournant des années 2000, le taux d’emploi a repris une pente haussière, et a atteint un plateau entre 56% et 56,5% de 2002 à 2013. Le retour de la gauche a provoqué un nouveau plongeon vers les 55%, phénomène continu depuis 2013.

On tient ici une explication des piètres performances macro-économiques du pays : de moins en moins de Français travaillent ou sont en position de travailler. 

L’effondrement de l’emploi des jeunes

Le point le plus marquant dans l’évolution de la population active depuis 1975 tient à l’emploi des jeunes. En 1975, 60% des 15 à 24 ans étaient en situation d’emploi. Cette proportion est passée sous la barre des 50% en 1987, puis sous la barre des 40% en 1991. Depuis cette époque, elle stagne autour de 38%. 

Autrement, moins de 2 jeunes de 15 à 24 ans sur 5 est en emploi ou au chômage aujourd’hui, quand il étaient 3 sur 5 il y a près de 50 ans. On mesure la modification radicale que la massification de l’accès au baccalauréat puis à l’enseignement supérieur a produit dans la jeunesse française. Le travail est devenu l’exception, et l’étude la règle.

Le travail des seniors progresse

Pendant que le taux d’emploi des jeunes s’effondrait sous les coups de boutoir de la gauche, le travail des seniors entamaient une étrange courbe qui est passée par un effondrement dans un premier temps, puis par une remontée escarpée sous l’effet de l’allongement des durées de cotisation retraites. 

Ainsi, en 1975, près de 40% des Français de 60 à 64 ans étaient en position d’emploi. Ce taux s’est littéralement effondré à 10,4% en 2000. Il est ensuite remonté, notamment du fait des politiques européennes, pour atteindre 25% en 2013 et 35% aujourd’hui. Après ce gros creux dû à l’abaissement brutal de l’âge de la retraite à taux plein, la catégorie des 60-65 ans a donc à peu près retrouvé aujourd’hui (tendanciellement) le taux d’emploi qui était le sien 50 ans plus tôt. Avec une espérance de vie bien supérieure toutefois. 

La révolution du travail des femmes

Pendant que le taux d’emploi des jeunes diminuait comme neige au soleil (de même que celui des seniors, durant les années Mitterrand, ce qui donne un reflet assez précis des dégâts de cet épisode sur la place du travail dans la mentalité collective), le travail des femmes compensait partiellement ces phénomènes baissiers. Il ne faudrait toutefois pas surestimer le poids de cette féminisation du marché du travail. 

Ainsi, elles étaient 43% en 1975 à exercer une activité ou à être au chômage. Après avoir atteint un pic de près de 52% (soit un gain de 9 points) en 2013, le taux d’emploi des femmes s’est légèrement replié depuis lors et flotte autour des 51,5% depuis les années 2010.

De façon tendancielle, le travail des femmes oscille donc bien à un niveau supérieur de 8 points environ à ce qu’il était au début de la crise pétrolière. Ce sont les femmes qui ont compensé la baisse du taux d’emploi dans les autres catégories de population. 

Une diminution globale de la masse travaillée depuis cinquante ans

S’il existe un chiffre à retenir, une tendance générale, c’est celle du recul du travail dans notre société depuis un demi-siècle. Cette tendance systémique a commencé dès les années Giscard, avec l’allongement de la durée des études. Mais il est vrai que, sous Giscard, le taux d’emploi a battu des records. Il « couvait » des tendances baissières qui ont explosé avec les années Mitterrand. Les années Sarkozy ont permis de remonter partiellement la pente, mais l’arrivée de François Hollande aux affaires a enrayé cette « remontada ». 

Si l’on admet l’hypothèse qu’il existe un lien structurel entre le taux d’emploi d’une société et sa prospérité globale, on comprend dans quelle ornière le pays se trouve. 

Cet article a été initialment publié sur le site Le Courrier des stratèges, cliquez ICI

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