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Le glamour, seul moyen de vendre
le sport féminin ?
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So sexy

Fabienne Broucaret démontre qu'aujourd'hui, l'une des seules manières de promouvoir le sport féminin est d'utiliser l'image sexy des athlètes. Extraits de "Le sport féminin, le sport, dernier bastion du sexisme ?" (2/2).

Fabienne Broucaret

Fabienne Broucaret

Fabienne Broucaret est journaliste indépendante. Elle a été rédactrice en chef adjointe du magazine Néoplanète et  a collaboré, entre autres, pour la Figaro, Elle.fr et Psychologies.com.

Elle est l'auteur de "Le sport féminin, le sport, dernier bastion du sexisme" aux éditions Michalon

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"Kournikova a changé la manière de vendre le circuit féminin de tennis WTA : elle l’a rendu glamour, estime Yannick Cochennec. Les campagnes du WTA sur le thème Strong is beautiful tournent autour d’une image rêvée de la sportive et d’une sexua­lisation à outrance. C’est un peu triste d’en arriver là, surtout que tout le monde s’engage maintenant sur ce terrain. » En effet, le physique des joueuses est plus que jamais mis en avant par les organisateurs de tour­nois. L’Open de tennis de Cagnes-sur-Mer joue ainsi depuis trois ans la carte du glamour sur ses affiches. La Française Mathilde Johansson y apparaît plus apprêtée que jamais. Selon l’organisateur de ce tournoi, Denis Anouilh, « il faut se servir des armes que l’on a pour donner envie au spectateur de venir 122 ». Visiblement, la seule arme de séduction massive repose sur le physique avantageux de certaines joueuses.

De nombreux sports ont imité depuis le tennis. Avant l’Euro 2009, la Fédération française de football a ainsi lancé une campagne de promotion du football féminin avec quatre joueuses de l’équipe de France : Gaétane Thiney, Sarah Bouhaddi, Corine Franco et Élodie Thomis n’y apparaissent pas en short et en maillot, ni même en robe. Non, elles y apparaissent nues. Avec comme seul message : « Faut-il en arriver là pour que vous veniez nous voir jouer ? » En 2010, la fédération utilise cette fois l’image d’Adriana Karembeu. La top model devient l’ambassadrice du football féminin en France. Le but ? Donner une image sexy des footballeuses alors que beaucoup pensent encore que ce n’est « pas un sport pour les femmes ». Question efficacité, les résultats des Françaises à la dernière Coupe du monde ont eu un impact média­tique et populaire indéniablement plus grand et plus durable grâce aux retransmissions télévisées. « Hormis ces deux initiatives très médiatiques, la fédération a également organisé, avant la Coupe du monde en Allemagne, une rencontre entre des journalistes et les joueuses de l’équipe de France à Clairefontaine, se souvient la capitaine Sandrine Soubeyrand. Nous avions fait un match, c’était très sympa. Nous recroi­sons justement certains de ces journalistes lors des compétitions. Je pense que cette action était intéres­sante car elle reposait sur le football et sur le terrain, pas sur notre physique. »

Pour vendre un événement sportif féminin, il est désormais commun d’user – et d’abuser – d’attributs glamour et sexy. Bijoux, épaules dénudées, talons aiguilles et maquillage sont exigés. Catherine Louveau regrette que les « sportives doivent toujours prouver leur appartenance à la norme dominante par des artifices culturels, comme si ceux-ci devaient les disculper de leurs corps musclés, performants, gestuels souvent dits masculins ». Cette stratégie marketing fait débat. Certains y voient un ramassis de clichés sur les femmes, d’autres un moyen efficace de mettre les projecteurs sur leur discipline.

L’Open de la Ligue féminine de basket, lancé en 2005, en est un bon exemple. Les trois premières affi­ches ont été réalisées sur le thème « Basket in the City », en clin d’oeil à la série Sex in the City. La première montrait une paire de jambes en talons aiguilles ; la deuxième un corps féminin dont on ne voyait pas la tête mais seulement la tenue d’entraînement très moulante ; la troisième une femme dans un vestiaire avec une robe très échancrée dans le dos. Sur l’affiche de 2008, une jeune femme écrit « Open addict » sur le torse d’un homme très musclé qui tient un ballon de basket. L’année d’après, la figure d’une joueuse appa­raît, enfin. En 2010 et 2011, les internautes ont voté pour les basketteuses qu’ils souhaitaient voir en haut de l’affiche. « Mais bon, on a quand même inclus du rose et des paillettes, au cas où on ne comprendrait pas très bien qu’il s’agit d’un tournoi féminin », s’agace un internaute. Alors, sexistes ces pubs ? « Nous souhai­tons simplement innover, explique Thierry Balestrière. Cette affiche est essentielle pour la promotion de l’Open. Le visuel fait vraiment partie intégrante de notre stratégie de communication. Il doit permettre d’attirer l’attention des médias, mais aussi du public parisien, qui est très sollicité et n’a pas encore d’équipe féminine de basket de haut niveau. » Pour l’édition 2012, qui se déroulera les 22 et 23 septembre au stade Pierre-de-Coubertin, la top model est de retour. Cette fois, elle croque un ballon de basket, dont la couleur rose est assortie à son rouge à lèvres.

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Extrait de "Le sport féminin, le sport, dernier bastion du sexisme ?" Éditions Michalon (7 juin 2012)

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