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Le Brésil reçoit environ 60 milliards de dollars d'investissements étrangers directs chaque année.
Le Brésil reçoit environ 60 milliards de dollars d'investissements étrangers directs chaque année.
©Reuters

Top chef

Selon une récente étude, les entrepreneurs choisiraient d'abord le Brésil pour investir, juste derrière la Chine et loin devant l'Inde et les Etats-Unis. Comment expliquer cet attrait pour ce pays sud-américain ?

Pierre  Salama

Pierre Salama

Pierre Salama est professeur émérite des universités, professeur et chercheur au Centre d'Economie de Paris-Nord où il est spécialiste des économies sud-américaines. Il a publié de très nombreux livres traduit en espagnol et en portugais dont Les économies émergentes latino-américaines : Entre cigales et fourmis aux Editions Armand Colin dont le dernier chapitre traite de la violence comparée dans les pays latino-américains.

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Atlantico : Une étude du cabinet d'audit PwC réalisée auprès de 227 chefs d'entreprise révèle qu'ils préfèrent le Brésil en deuxième position après la Chine pour investir, loin devant l'Inde et les Etats-Unis. Comment peut-on expliquer l'attractivité du Brésil pour les investisseurs étrangers ? 

Pierre Salama : Cela dépend bien évidemment des secteurs, tous ne sont pas attractifs. Chaque année, le Brésil reçoit environ 60 milliards de dollars d'investissements étrangers directs. On peut l'expliquer de plusieurs manières : la rentabilité du Brésil est assez élevée,car la monnaie s'était appréciée pendant plusieurs années. Mais il y a une illusion sur les possibilités de croissance concernant le Brésil, car en dehors de l'année 2010 qui a connu une croissance de 7,5 %, celle-ci est assez médiocre -comparable à celle de la France- et très en dessous de celle de la Chine ou de l'Inde.Cette année, la croissance de la production industrielle est nulle, et même légèrement négative.

Sur 10 ans, la croissance moyenne du Brésil est légèrement supérieure à celle de 1990 à 2000, mais elle tourne autour de 3 %, ce qui est très peu. Il est toujours surprenant de constater l'optimisme des investisseurs, notamment français, concernant le Brésil.

Toujours selon l 'étude, plus de 80 % des investisseurs disent préférer le Brésil pour investir dans les technologies de pointe et les métiers de l'information, et plus de 55 % d'entre eux pour le secteur des services financiers. Comment peut-on expliquer l'engouement des étrangers pour ces secteurs en particulier ?

Effectivement, le secteur financier est extrêmement lucratif. En revanche, pour le secteur des nouvelles technologies, il faut être plus réservé : si on prend en compte l'effort de recherche par rapport à son PIB, celui du Brésil est très faible : on est passé de 0,6 ¨%  il y a quelques années à 1 % , alors que la France est par exemple à 2,3 %. L'effort en terme de technologie est très faible. Par contre, les niches de haute technologie sont elles très lucratives. Dans certains domaines, le Brésil produit d'excellents chercheurs et d'excellents cadres. 

Outre ces secteurs, y en a t-il d'autres lesquels il est intéressant d'investir au Brésil ?   

Bien sûr, il y a notamment celui de la grande distribution, de l'exploitation des matières premières, l'automobile et celui de la finance. Renault s'est implanté au Brésil, et il arrive à engranger des bénéfices. C'est un pays dont la croissance est faible mais qui parait très forte par rapport à ce qu'elle est en France.

Il y a beaucoup d'entrées d'investissements étrangers flottants qui permettent de spéculer sur l'immobilier, notamment à Rio et à Sao Paulo, qui est devenue une des villes les plus chères du monde aujourd'hui. Le Brésil a une population très importante : plus de 200 millions de personnes, ce qui représente un marché potentiel important. Le crédit s'est développé, la pauvreté a diminué : Il y a donc des possibilités importantes, mais c'est une réalité qui reste quand même relativement fragile, comme en témoigne la réduction continue de la croissance.

Comment peut-il encore accroître son attractivité pour les investisseurs étrangers ? 

Le Brésil pourrait améliorer ses infrastructures, les transports mais aussi l'énergie : c'est d'ailleurs un des objectifs du gouvernement. Pour l'instant, les initiatives prises sur ces sujets n'ont pas été concluantes. 

Le pays commence également par rompre avec la politique d'appréciation du taux de change, d'ailleurs la monnaie s'est dépréciée ces dernières années. En 2006, la balance commerciale des produits industriels était positive, elle est aujourd'hui extrêmement négative. La raison pour laquelle la balance commerciale est encore positive, et elle ne le doit qu'aux matières premières. 

Il y a un réel mythe du Brésil vu de l'étranger : les entrepreneurs mondiaux, et notamment français, ne prennent pas la mesure de la réalité, et des limites de son offre.

Ceux qui vantent les opportunités du Brésil comme terre d'accueil d'investissement n'avancent pas d'analyses  sérieuses. Cela étant, c'est un pays qui connait une stabilité gouvernementale, ce qui est un avantage non négligeable par rapport à l'Argentine par exemple. 

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