La situation économique est bien meilleure qu’avant le Covid, mais les chefs d’entreprise sont rarement aussi inquiets<!-- --> | Atlantico.fr
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Le président du MEDEF, Patrick Martin, et la Première ministre Elisabeth Borne lors de la Rencontre des entrepreneurs français (REF) à l'hippodrome de Longchamp, le 28 août 2023.
Le président du MEDEF, Patrick Martin, et la Première ministre Elisabeth Borne lors de la Rencontre des entrepreneurs français (REF) à l'hippodrome de Longchamp, le 28 août 2023.
©EMMANUEL DUNAND / AFP

Atlantico Business

Jamais contents : Drôle d’ambiance dans les allées de l'hippodrome de Longchamp. Les chefs d’entreprise reconnaissent que la situation économique est plutôt bonne, mais l'avenir leur paraît sombre, ce qui provoque une grogne générale. Il y a des explications, mais pas forcément de remèdes.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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La plaisanterie dans les allées de LaREF n’est pas nouvelle, mais elle résume assez bien l'état d’esprit :

  • Alors monsieur le président, en un mot comment ça va ?
  • En un mot ? répond le président, en un mot... bien.
  • Et en deux mots ?
  • En deux mots ? Pas bien !!!

En fait, les chefs d’entreprises reconnaissent que la situation économique est plutôt bonne, si on la compare à ce qu'on prévoyait, et surtout si on la compare à celle de nos grands voisins et partenaires. Au premier semestre, l'économie française a connu la meilleure croissance d’activité grâce à l’exportation, aux investissements et à la consommation qui s’est finalement maintenue. L'emploi est quasiment en situation de plein emploi, 6,7 %, c’est du jamais vu en France depuis 40 ans. Revers de la médaille, nous gardons un stock d'épargne liquide et disponible très important qui participe d’ailleurs à la qualité de notre signature auprès des créanciers, mais qui constitue une réserve pour éventuellement financer un rebond dans les secteurs à la traîne. Parce qu'il y a des secteurs à la traîne, l'immobilier par exemple, l'automobile et tout ce qui pourrait contribuer à la transition électronique, c’est une masse d'épargne qui permettrait le cas échéant d’amortir une crise financière.

Quand on se compare à nos partenaires, la surprise c’est les difficultés de l'Allemagne qui paraît complètement en panne. Peu ou pas de croissance depuis le début de cette année, moins d'exportations parce que la Chine est en panne et la Chine, c’était le moteur de l'Allemagne, avec en plus une compétitivité en chute libre à cause de la crise énergétique. L'Allemagne a connu un véritable miracle économique depuis trente ans parce qu'elle a su gérer ses coûts et son modèle social, mais surtout parce qu'elle a bénéficié d'une énergie pas chère et garantie. La guerre en Ukraine et la décision des Occidentaux de punir les Russes en n’achetant plus leur gaz ont complètement perturbé la chaîne de valeur des productions allemandes. L'Allemagne est à la recherche d'une source d'énergie alternative, il y en a peu qui soit moins chère et aussi propre que celle sur laquelle elle était branchée jusqu'à la guerre.

Par conséquent, les indicateurs français sont plutôt bien orientés, les perspectives concurrentielles doivent permettre à l'Hexagone de récupérer une partie de son industrie délocalisée... et les chefs d’entreprises auraient des raisons de se féliciter de la politique de l'offre qui a été menée dans le pays depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron...

Et bien non, ils ne sont pas contents. Ils grognent et ont peur de leur ombre. Patrick Martin, le nouveau président du Medef, a donné le ton en ouvrant LA REF et en se plaignant à Elizabeth Borne que la promesse de supprimer les impôts de production ne serait pas tenue... ce que la Première Ministre a reconnu en précisant que ces suppressions étaient simplement retardées compte tenu des impératifs budgétaires... dont acte... ce qui gêne plus sérieusement les chefs d’entreprise, c’est d'abord les mauvaises nouvelles dans le monde qui pèsent sur la situation française : la guerre en Ukraine, le déséquilibre de la Russie, l’effondrement de la Chine et les difficultés stratégiques de l'Allemagne. C’est ensuite l'apparente indifférence du gouvernement et du président à l'endettement considérable de la France.

C’est enfin, et c'est sans doute le plus important, l'absence de stratégie de développement. D'un côté, le gouvernement se targue de mener une politique de l'offre et reproche aux chefs d’entreprise de ne pas le reconnaître. De l’autre, les chefs d’entreprises sont conscients que les allègements fiscaux ont eu des effets directs et positifs, mais ils considèrent aussi qu'une politique de l'offre va bien au-delà d’un aménagement de la fiscalité .  

Les milieux d’affaires ont besoin de savoir quelle est la stratégie française dans trois directions.

En direction de la mondialisation, avec plus ou moins de multilatéralisme, avec une organisation du monde qui reste à définir.

En direction des affaires européennes, avec plus ou moins d'intégration et des projets communs et surtout une mutualisation des financements de projet.

En direction de la sphère sociale, dont il faut trouver des financements plus solides s'inscrivant plus dans une logique assurantielle ou mutualiste qu'une logique de solidarité. La logique assurantielle génère des réflexes de responsabilité des dépenses. La logique de solidarité alimente un État protecteur difficile à gérer et à financer.

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