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La machine à fabriquer des pauvres alimentée à plein régime par le délitement de la famille
©Flickr/danielmoyle

Cercle vicieux

La chape de béton idéologique, la machine à fabriquer des chômeurs qu’est devenue l’Éducation nationale, la réglementation, les exceptions françaises que-le-monde-nous-envie sont quelques-unes des raisons qui ont fait de la France "une fabrique de pauvres", selon Simone Wapler.

Simone Wapler

Simone Wapler

Simone Wapler est rédactrice en Chef des Publications Agora (analyses et conseils financiers).

Elle est l'auteur de "Comment l'Etat va faire main basse sur votre argent: ... et ce que vous devez faire pour vous en sortir !", paru chez Ixelles Editions en mars 2013.

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Atlantico : Vous venez de publier La fabrique de pauvres aux éditions Ixelles. Pensez-vous comme Pierre Gattaz que la France est "une élève surdouée qui glande au fond de la classe" ? 

Simone Wapler : Je me sens très  loin d’être surdouée et je ne me permettrai pas de juger mes compatriotes. Mais, pour reprendre l'analogie scolaire, l’appellation « peut mieux faire » me semble bien s’appliquer bien à notre pays.   

Pour mieux faire, il suffirait d'un peu plus de pragmatisme et d'un peu moins d'idéologie. En somme, plus de travaux pratiques et moins de théorie !

Depuis quand la France s'est inscrite dans ce mouvement de fabrique de pauvres ? 

Le principe de la fabrique de pauvres est de susciter la dépendance à la puissance publique. Une façon sèche et arithmétique consiste à dater le moment où l'initiative privée a perdu la main, lorsque le secteur public a pesé plus de 50 % de l'activité économique. Ceci nous met en 1985. Les Français ont toujours bien aimé un État puissant et centralisé, très souvent vu comme bienveillant. La démocratie a favorisé le clientélisme électoral ; à la distribution de privilèges royaux ou impériaux se sont substitués l'assistanat et la création de rentes. Les programmes électoraux des différents candidats se résument à des distributions de faveurs achetées avec l’argent des contribuables. Résultat : 57,3% de l’économie française est aujourd’hui entre les mains de l’État. Voyez récemment les tractations entre concessionnaires d’autoroute et l’État, la montée de l’État au capital de Renault, le renforcement des pouvoirs des commissaires au redressement productif (heureusement que le ridicule ne tue pas), etc... Pourtant, redistribuer de la richesse ne la crée pas. La montée inexorable du chômage le prouve empiriquement même si cela est contraire à l’idéologie de la lutte des classes ou de l’égalitarisme.

Lire aussi : Ce qu’on sait des causes réelles de la pauvreté et des inégalités (et ça ne va pas faire plaisir aux adorateurs de Thomas Piketty)

Dans quelle mesure la politique fiscale mises en place depuis 2012 a-t-elle contribué de cette fabrique de pauvres ?

La politique fiscale a accéléré le mouvement : plus de prélèvements, plus de dettes, moins de secteur privé et plus de chômeurs. Rien de nouveau sous le soleil. Pour financer son clientélisme, la droite fait des dettes tandis que la gauche préfère taxer. Le résultat est le même, un appauvrissement général.

Entre 2011 et 2013, les prélèvements obligatoires sont passés de 41,3% du PIB à 44,7% de PIB ; l’État refuse de réduire son train de vie. Le secteur privé a perdu la main, ce qui explique que notre activité économique rentable ne cesse de se réduire et que le chômage grandit.

“Détruire la concurrence, c’est tuer l’intelligence” disait l’économiste Frédéric Bastiat au XIXème siècle. Regardez l’Allemagne du temps de la RDA et de la RFA. Du côté République démocratique – bon élève du communisme – une seule voiture, la Trabant. Du côté de la République fédérale, Porsche, Volkswagen, Audi, BMW, Mercedes… Combien faudra-t-il de chômeurs, d’emplois aidés, de contrats bidons pour comprendre que l’étatisme et le protectionnisme ne favorisent pas l’enrichissement collectif et que la concurrence est bénéfique ?

Quels sont aujourd'hui les atouts de la France que cette dernière ne sait pas mettre à profit ? 

Les Français se débrouillent vraiment très bien dans l’espace de liberté de plus en plus restreint qu’on leur laisse. Leur créativité est proprement miraculeuse.

Le ministre dit « social-libéral » Emmanuel Macron aime citer Henri Lacordaire, considéré comme le fondateur de la démocratie chrétienne : « Entre le riche et le pauvre, le fort et le faible, c’est la liberté qui opprime et la loi qui protège. » Curieuse mentalité pour un homme politique que de penser que la liberté puisse opprimer. Si tel est le cas, nous ne sommes plus dans un État de droit capable de faire régner une concurrence loyale, une égalité en droit, c’est à dire l’équité. 

Quelles sont les réformes à mettre en place pour enrayer la fabrique de pauvres ? Le gouvernement en prend-il le chemin ? 

Je ne crois pas aux réformes par le haut, aux hommes providentiels. Je reprends cependant une idée de Denis Payre, le fondateur du mouvement Nous Citoyens : la première réforme serait que tout élu démissionne de la fonction publique. La seconde mesure serait de supprimer le statut de fonctionnaire à vie. Il est indispensable que ceux qui créent la richesse, ceux qui travaillent dans le secteur concurrentiel, le secteur privé, reprennent la main et que la machine étatique arrête de nous coloniser. Une assemblée législative de fonctionnaires élus ne peut que vouloir plus d’État. Connaissez-vous beaucoup de bouchers végétariens ?

Si quelqu’un se faisait élire avec de telles propositions, cela voudrait dire que la révolution des mentalités serait déjà faite. La partie serait gagnée et les réformes ne poseraient plus de problème.

Pour vous une structure familiale unie permettrait d'assurer une solidarité suffisante. Mais pourrait-on vraiment pour autant se passer d'une politique de redistribution ?

J’ai simplement repris les propos de l’économiste suisse Paul Dembinsky pour qui la famille est « l’endroit qui génère ce que l’argent – ni public ni privé – ne peut acheter, le lieu d’émergence de la dignité humaine » ; il estime que les dépenses  sociales obligatoires - qui sont à 26% du PIB en Suisse - atteignent leur maximal. Au delà on sombre dans le gâchis. Saper la famille c’est détruire la première cellule naturelle d’entraide et donc, à terme, augmenter les dépenses sociales.

Une politique de redistribution  n’est pas condamnable en soi, si elle est librement consentie. C’est le clientélisme qui est injuste, le principe selon lequel “ je redistribue l’argent de tout le monde prioritairement à mes électeurs potentiels afin qu’ils deviennent mes obligés”.

Pour éviter cette dérive, le principe de l’impôt négatif, allocation universelle unique ou encore revenu de subsistance est parfois évoqué par certains économistes. « L’assurance d’un certain revenu minimum pour tous, une espèce de plancher en dessous duquel personne ne devrait tomber, même lorsqu’il n’arrive pas à s’auto-suffire, apparaît non seulement comme une protection tout à fait légitime contre un risque commun à tous, mais un élément nécessaire de la Grande Société dans laquelle l’individu n’a plus de demande spécifique pour les membres d’une communauté particulière », estimait l’économiste autrichien Friedrich Hayek. Pour ses défenseurs, ce revenu versé à tous et prélevé par l’impôt n'entraînerait pas de désincitation au travail, puisqu'il serait versé sans conditions. Pour ses détracteurs, cependant, l’absence de contrepartie retire toute responsabilité.

Un tiers des Français voient désormais dans les impôts une extorsion de fonds, une écrasante majorité pense que leur argent est gaspillé. La vraie solidarité implique l’adhésion, pas la coercition.

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