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L'histoire du vrai "M" qui a inspiré James Bond
©Renée Anne Nat / AFP

Bonnes feuilles

Henry Hemming dans "Nom de code : M", publié aux éditions Mareuil, révèle pour la première fois, le nom et l’histoire de ces hommes et femmes qui, sous l’égide de M, prirent tous les risques en infiltrant les organisations politiques les plus dangereuses de l’époque. Jusqu’ici, leurs identités étaient restées secrètes. Extrait 1/2.

Henry Hemming

Henry Hemming

Henry Hemming est journaliste, il collabore à The Economist, au Sunday Times et au Washington Post. Il est l'auteur de livres références comme Churchill's Iceman.

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Lundi 20 mai 1940, tôt le matin : alors que la menace d’une invasion nazie de la Grande-Bretagne est on ne peut plus tangible, une voiture de police s’arrête devant une pension de famille du centre de Londres. Cinq hommes en sortent, se dirigent vers l’édifice. Une bonne ouvre la porte. Ils recherchent un Américain répondant au nom de Tyler Kent. Elle leur demande d’attendre, le temps qu’elle aille chercher sa maîtresse. Après quelques secondes d’hésitation, les cinq hommes se précipitent dans le bâtiment. L’un suit la bonne, les autres se ruent dans les escaliers.

Parmi ceux qui montent quatre à quatre les marches du 47, Gloucester Place, deux sont des inspecteurs des renseignements généraux, chevronnés et massifs. Le troisième est fonctionnaire à l’ambassade des États-Unis. Le dernier, trente-neuf ans, épaules larges et nez en bec d’aigle, a une démarche qui trahit les longues promenades à la campagne. Il s’appelle Maxwell Knight. Ses amis l’appellent Max, mais la plupart de ses collègues du MI5, l’agence de contre-espionnage britannique, et la famille tentaculaire des agents infiltrés, le connaissent sous le nom de « M ». Cette descente, c’est la sienne. C’est le fruit de son analyse des renseignements fournis par ses agents, un réseau d’hommes et de femmes qu’il a recrutés personnellement pour sa branche rebelle du MI5, connue sous le nom de « section M ». Sa spécialité, c’est d’infiltrer des espions dans des groupes politiques extrémistes. Pour cette descente, les informations proviennent d’un de ces agents sous couverture, une mère célibataire entre deux âges, qui avant-guerre gagnait sa vie grâce à des démonstrations de cuisine.

À l’étage, les quatre hommes font face à la logeuse. L’un d’eux sort de sa poche un mandat de perquisition et demande où est Kent. D’un signe, elle indique la porte derrière eux. Tyler Kent est un fonctionnaire de l’ambassade américaine que M suspecte d’être un espion nazi. Si l’homme du MI5 a tort, ce sera l’incident diplomatique. S’il a raison, mais qu’il attend trop, des communications classées secrètes pourraient être transmises à Rome, et de là à Berlin. Dans les films d’espionnage que ce maître espion aime à regarder, l’intrigue se concentre généralement sur un agent secret ennemi qui tente de voler des papiers confidentiels. Alfred Hitchcock appelle cela des « MacGuffin », ce qu’il y a sur ces papiers importe rarement. Là, c’est différent. Les documents que M espère trouver, et que le présumé espion nazi a volés, contiennent la correspondance secrète entre Winston Churchill, le nouveau Premier Ministre britannique, et Franklin D. Roosevelt, le président américain ; si elle tombe entre de mauvaises mains, elle pourrait changer le cours de la guerre. L’un des inspecteurs essaie d’ouvrir la porte.

Elle est verrouillée de l’intérieur ; il frappe. « N’entrez pas », dit un homme. L’inspecteur frappe de nouveau. « N’entrez pas ! » La voix se fait indignée, cette fois. M entend les bribes d’une conversation chuchotée, et le bruit sourd et irrégulier de déplacements soudains et rapides. L’un des inspecteurs s’éloigne de la porte, se tourne et se prépare à charger. C’est l’inspecteur Pearson, il est bâti comme une armoire à glace. Les autres hommes s’écartent pour lui laisser le champ libre et pendant un instant, dans ce couloir, alors qu’ailleurs dans Londres on se dirige vers son travail, et que de l’autre côté de la Manche l’armée allemande continue de se frayer un chemin vers Paris à coups de bombes, d’obus et de balles, tout est silencieux. Il est difficile d’imaginer exactement ce qui passe par la tête de M à ce moment de l’opération, mais il est arrivé à un tournant de sa vie peu de temps auparavant. Neuf mois plus tôt, le début de la guerre l’a obligé à affronter un fantôme du passé. À présent, il se tient dans ce couloir, attendant que le policier enfonce la porte, et la décision qu’il doit prendre changera la vision qu’on aura de lui pour les années à venir.

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