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L'heure du réveil de l'Europe a sonné et voilà pourquoi nous ne devons pas nous rendormir
©FREDERICK FLORIN / AFP

L'ami du petit déjeuner

Objectif : redonner à l'Union Européenne le dynamisme dont elle fait défaut.

Pierre Haas

Pierre Haas

Pierre Haas, après avoir servi comme officier dans les Forces françaises libres du Général de Gaulle, a fait carrière de 1950 à 1965 comme directeur général de Continental Grain France, puis à partir de 1963 à la Banque Paribas comme directeur des affaires financières internationales, puis président de Paribas International.

Il a été membre de nombreux conseils d’administration parmi lesquels on citera : Schneider S.A., Newmont Gold à Denver, Power Corporation du Canada et Power Financial.

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Les 70 années suivant la guerre franco-allemande de 1870 ont été marquées par deux conflits mondiaux, l’un en 1914, l’autre en 1940, qui ont ensanglanté la planète, causé la mort de dizaine de millions d’êtres humains, la misère chez autant de millions d’autres et secrété d’immenses dommages matériels.

Depuis la fin de la dernière guerre, le monde a connu de nombreux conflits locaux, de la Corée à l’Irak en passant par les Falkland et la Syrie, aucun n’a jamais perdu son caractère local.

Soit une longue période de paix, de prospérité et de stabilité, ne pouvant être le fait du hasard mais le fruit d’un facteur nouveau dans l’Histoire de l’Europe : la rencontre d’un conflit mondialisé, celui de 1940-1945, avec une nation dont la puissance de l’économie, les armes, la force morale également mondialisées a été le socle.

Cette nation, l’Amérique, se trouve actuellement entrainée dans le courant disruptif traversant les pays industriels dont la première manifestation a été au Royaume-Uni le Brexit et Outre-Atlantique, l’élection, à la Présidence, le 8 Novembre dernier d’un trublion vibrionnant, Monsieur Donald Trump.

Le nouveau Chef d’Etat américain doté d’un ego sans frontières, allergique à la contradiction mais prolifique dans son usage comme dans celui des fausses nouvelles, (fake news), consultant les dossiers seulement après l’envoi de tweets vengeurs traitant les problèmes dont il aurait du prendre connaissance avant de les évoquer, représente un danger pour l’ordre mondial, mis en place par l’Amérique après la victoire de 1945.

On en voudra pour preuve que dès le lendemain de son Inauguration, le Samedi 21 Janvier, le nouveau Président n’a pas caché son intention de changer l’ordre des choses en priant Madame May, la Première Ministre britannique, en visite à Washington, de bien vouloir accélérer la négociation du Brexit.

A l’évidence l’objectif recherché était de fragmenter l’Union Européenne pour supprimer l’obstacle qu’elle constitue au dialogue direct des Etats-Unis avec la Russie.

Fin Janvier, le sentiment des milieux politiques et diplomatiques étant qu’il convenait de donner du temps au nouveau Président pour faciliter son adaptation aux contraintes de gouvernement les a conduits à sous-estimer le caractère révélateur de la demande adressée à Madame May.

La perpétuation d’un comportement du Président en rupture avec les modalités feutrées des négociations diplomatiques vient de mettre fin à tout espoir d’amélioration.

Le temps de l’indulgence étant passé, une crise devenait inévitable. Le détonateur en a été la décision de sortir du Traité sur le Climat Cop 21.

La réaction de Madame Merkel d’habitude modérée, dans l’expression de ses opinions, ne s’est pas faite attendre.

Présente à une réunion politique au moment de l’annonce, la Chancelière a laissé libre cours à son exaspération en déclarant que les Européens ne pouvaient plus se reposer sur d’autres et devaient prendre en mains leur destin.

Façon de penser et d’agir n’étant pas propre à la seule Union Européenne puisque Madame Chrystian, Ministre des Affaires Etrangères du Canada s’est également exprimée dans le même sens.

Comment pouvait-il en être autrement dès lors que la négation de la validité de la signature du Président Obama sur un Traité en comportant 163 autres, s’ajoutant à l’absence de mention, à Bruxelles, de l’Article 5 du Traité de l’Otan est contraire à l’esprit du Pacte Atlantique.

Pacte dont la signature en Avril 49 avait entériné le rôle décisif joué par les Forces Armées américaines dans la victoire en Aout 1945 et la contribution du Plan Marshall à la reconstruction d’une Europe détruite et exsangue.

75 ans plus tard, l ‘Amérique demeure la Première puissance planétaire mais l’environnement dans lequel cette puissance s’exerce n’est plus celui de ses origines.

Sortie du dernier conflit mondial avec un territoire épargné de toute atteinte de l’ennemi et un outil industriel aux capacités hypertrophiées par les livraisons d’armements, l’Amérique était dans une situation où le besoin de trouver des débouchés a justifié une participation financière de grande ampleur à la reconstruction des destructions subies par ses alliés ainsi que des besoins des anciennes colonies accédant à la pleine souveraineté.

Dans l’environnement de misère et de menace communiste régnant à l’époque les aides consenties et les accords commerciaux signés l’ont été dans un climat où les intérêts américains disputaient leur place à une obligation morale et sécuritaire.

Contexte validant l’existence des asymétries dénoncées par le Président Trump dans l’oubli que celles-ci sont partie intégrante du socle de la politique étrangère qui a fait des Etats-Unis le pouvoir dominant de la Planète. Pouvoir qui jusqu’à l’actuelle Présidence n’été contesté qu’avec prudence par les gouvernements des Nations sur lesquelles il s’exerçait.

L’imprévisibilité, les contradictions, les libertés prises avec la vérité, du nouveau Chef d’Etat américain ont mis à fin à cette prudente réserve. Le déclin de l’autorité américaine en affectant sa position de décideur et de protecteur en dernier ressort à l’échelle mondiale en fait, désormais, un sujet de préoccupation.

Qui aurait imaginé il y a moins d’un an que le Financial Times du week-end du 2 Juillet, sur sa page de couverture, en caractère gras, s’agissant de la Corée du Nord, titrerait « China lashes out as Trump hardens stance » en français « La Chine exprime sa furie de voir Trump durcir sa position ».

La Corée du Sud qui vient de rejeter la demande du Pentagone d’installer de nouvelles fusées sur son territoire est, comme la Chine, vent debout contre les risques d’un conflit avec la Corée du Nord, secrété par les divagations verbales du Président Américain.

Le parti pris belliqueux du Président américain contre cette nation est contredit par son abandon d’une position stratégique dans le Pacifique asiatique i.e le retrait de l’Accord Transpacifique. Cadeau à la Chine confirmant sa position dominante sur le chenal maritime le plus fréquenté. On rappellera que le Président Obama n’avait épargné aucun effort pour atténuer l’impact des atteintes chinoises au droit maritime international.

Cependant du point de vue de l’Europe, Trump en facilitant les exportations de gaz naturel liquéfié agit dans un sens utile. Décision qui mettant fin au monopole des Russes les prive d’une possibilité de pression politique en cas de crise.

En revanche le désintérêt de Washington pour l’Ukraine et la Crimée est fâcheux.

A ces observations, il convient d’ajouter l’impact négatif du Brexit sur le Royaume-Uni et le continent ainsi que la faiblesse d’un nouveau Gouvernement de Madame Teresa May.

Le désordre régnant à Washington du fait du combat confus engagé par le Président contre les médias doublé par l’incapacité de passer la moindre législation, font qu’on se trouve face à un monde en mal de leadership.

Dans ce tohu-bohu il est rassurant pour les Français de constater que notre Président a su saisir l’occasion offerte par la détérioration de l’influence américaine. L’invitation du Président Trump à la Revue du 14 Juillet le confirme.

Le Président Macron a eu l’intuition qu’en s’adossant au Chef affaibli de la première puissance économique mondiale, il obtiendrait un support, celui de l’Amérique, augmentant l’effet de levier, sur les allemands, des réformes qu’il souhaite engager et qu’il sait nécessaires à sa crédibilité Outre-Rhin.

La réussite de cette nouvelle approche, condition de l’indispensable renforcement de notre alliance avec l’Allemagne devrait faire comprendre à Madame Merkel que son exercice du leadership européen risque de ne plus être aussi solitaire qu’auparavant.

Un éventuel team Macron-Merkel sachant agir main dans la main restituerait à l’Union Européenne le dynamisme dont le défaut est, entre-autres, responsable du Brexit.

Notre Président ayant en partie gagné son élection en évoquant la contribution de l’Europe au bien commun, on peut imaginer que dans l’état actuel des rapports de force, sa vision d’un nouvel ordre mondial soit tripolaire : « Amérique, Europe, Chine ».

Si tel est le cas, fort de son autorité et de la qualité de ses intuitions, le Président Macron a le pouvoir d’offrir à la France le défi d’être un contributeur de premier rang à une reconfiguration de la Planète.

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