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L’Allemagne, grande perdante de l’élection de Donald Trump
©Reuters / Hannibal Hanschke

Zut

C’est l’Allemagne qui a effectivement perdu les élections américaines. Pendant que les aristocrates français en restent à leurs mimiques déconfites de mondains sidérés, les Allemands ont un peu de souci à se faire : ils sont les grands perdants de l’élection de Trump aux Etats-Unis.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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La question de l’alliance avec la Russie

Sans que nous n’en soyons forcément très conscients, l’Allemagne entraîne l’Europe depuis plusieurs années dans une politique hostile à la Russie, qui contrarie d’ailleurs la tradition française. Historiquement, en effet, la France s’allie à la Russie pour contre-balancer le poids de l’Autriche et de la Prusse. La construction communautaire a obligé la France à rompre avec cette stratégie séculaire.

L’Allemagne utilise volontiers le bouclier militaire américain pour provoquer la Russie ou se livrer à une guerre d’influence dans l’ancienne sphère prussienne. C’est notamment le cas en Ukraine. Le renversement d’alliance promis par Donald Trump, et qui pourrait signifier un retour partiel à la logique de partage avec l’Union Soviétique, devrait refroidir les ardeurs allemandes à l’Est.

La question de l’Otan

Parallèlement, Donald Trump a beaucoup dénoncé le coût de l’Otan pour les Etats-Unis. Contrairement à ce qu’a affirmé Hillary Clinton, il n’a pas proposé la "fin" de l’Otan, mais seulement la modification des termes économiques de l’échange actuel. Pour Trump, l’Otan coûte cher et ne rapporte pas assez.

"NATO is unfair, economically, to us, to the United States. Because it really helps them more so than the United States, and we pay a disproportionate share". (L’Otan n’est pas juste, économiquement, pour nous les Américains. Parce qu’en réalité elle les aide plus qu’elle n’aide les USA, et nous payons une part trop élevée).

Tout le monde a compris que Trump allait entreprendre ce que la France aurait dû exiger depuis longtemps de ses voisins : ils vont payer pour leur sécurité. Au premier chef, Trump devrait présenter l’addition à l’Allemagne, qui se vante tant d’avoir retrouvé son équilibre budgétaire…

Flop définitif du Tafta ?

Du côté du libre-échange, Trump a dit tout le mal qu’il pensait des accords commerciaux multilatéraux. Son élection constitue donc un sacré boulet pour le Tafta, auquel Angela Merkel tenait tant. Rappelons là encore que l’Allemagne est le seul grand pays européen exportateur net, donc bénéficiaire du libre échange. La signature du traité constituait donc un enjeu important pour Merkel.

Avec l’arrivée de Trump, les termes même du commerce international pourraient connaître une profonde mutation. Dans la durée, la situation pourrait donc devenir très compliquée pour l’Allemagne.

Vers un réveil du nationalisme allemand ?

Assez rapidement, des questions nouvelles pourraient être posées à l’Allemagne, questions taboues depuis 1945.

Si l’Allemagne est sommée de payer pour sa propre défense, il est peu probable qu’elle se contente de déléguer la gestion de ses opérations militaires. Selon toute vraisemblance, se posera donc rapidement la question du réarmement allemand. Ainsi, vingt ans après la réunification de la Prusse, le sujet tabou d’un renouveau militaire prussien sera remis sur la table européenne.

On mesure implicitement les tentations auxquelles l’Allemagne sera exposée dans les années à venir si Trump modifie effectivement la politique américaine en Europe. Réarmement, besoin de cultiver une sphère de coprospérité en Europe et dans le monde pour écouler ses produits, tensions grandissantes avec l’Allemagne autour du Lebensraum… Les démons du vingtième siècle devraient revenir rapidement.

Cet article a également été publié sur le site d'Eric Verhaeghe, et est disponible ici.

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