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L’abandonnite : les médecins le confirment, on peut vraiment mourir de désespoir
©CHRISTOPHE SIMON / AFP

Lutte pour la vie

Une étude de la Porstmouth University apporte un nouvel éclairage sur un phénomène psychologique déjà connu et constaté notamment chez les prisonniers de guerre : le « give-up-itis » - littéralement la « capitulationnite » ou « syndrome de glissement ». Face à une situation traumatique exceptionnelle, certaines personnes se laissent simplement mourir, parfois en moins de trois jours.

François  Chauchot

François Chauchot

Médecin Psychiatre Libéral. Il exerce également à l'hôpital Sainte Anne. 

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Atlantico : Comment se manifeste ce phénomène ?

François Chauchot : Les deux aspects principaux semblent être une brutale et massive perte de sens – en lien avec l’événement traumatique - et un ralentissement global et progressif de l’ensemble des grandes fonctions de l’individu que sont sa capacité à prendre soin de lui, l’appétit, la vie en relation. On constate aussi la perte d’initiative et l’absence totale d’anticipation qui plongent l’individu dans un repli total, coupé du monde et de soi. Ayant perdu tout sens et tout intérêt à l'existence et à la vie, le sujet perd littéralement toute énergie vitale, un peu comme s’il se vidait de lui même, pour devenir « une coquille vide ». Dans un tel état, l’individu dénué de tout intérêt et de tout plaisir à « être au monde » se dévitalise et s’éteint progressivement.
Sur un plan comportemental, l’observateur extérieur constate un arrêt de toutes les fonctions vitales ou presque. Au premier plan l’appétit, le sommeil, le mouvement, le soin de soi, la vie de relation la capacité à interagir par le regard, le discours, le dialogue émotionnel..
La recherche d’un événements traumatique majeur vient étayer cette perte de sens qu’a pu connaître l’individu par exemple lors d’un conflit, d’un attentat ou de la perte d’un être cher - ces circonstances pouvant s’entremêler et accroître la portée traumatique de ces événements.

Le fait de "se laisser mourir" est un phénomène connu. L'étude donne-t-elle un éclairage nouveau ou un cadre plus scientifique à cet état ?

Ce phénomène n’est pas effectivement nouveau et l’article lui donne un éclairage d’apparence plus scientifique à travers des hypothèses neuro-biologiques et neuro-anatomiques . L’Histoire et les romanciers nous en ont fait déjà part par le passé; cette étude apporte un angle d’attaque plus scientifique à une réalité humaine. Ce « syndrome de glissement » pourrait renvoyer à une réaction d’adaptation à un contexte « horrible », c'est-à-dire non représentable pour l’individu, dépassant les possibilités de réactions psychiques humaines. Face à l’horreur, faut-il mieux s’arrêter de vivre en ne reconnaissant plus le caractère humain de l’expérience existentielle du moment ? C’est probablement dans ce rapport humain/deshumain que se loge cette réaction dépressive extrême.

Comment surmonter un événement traumatique susceptible de provoquer cet état ?

Réintroduire de l’humain semble alors être une urgence, à travers un geste ou une parole. C'est le premier temps du soin apporté à l’autre; en d’autres termes lui demander ce qu'il se passe pour lui et ce dont il aurait besoin.
Il s’agit donc de s’occuper de cette personne, même si elle ne demande rien. Ensuite viennent les soins de « réanimation » physiques et psychiques, alimentation, traitements médicamenteux adaptés. Redonner du sens et un sentiment de sécurité physique et psychique est le but du traitement de ce grand état de détresse psychique.

Les cinq étapes du syndrome de glissement

1) Le repli social : les gens se coupent de leurs proches et refusent le contact
2) L'apathie: la personne ne prend plus soin d'elle-même, ne se soigne plus et ne se lave plus
3) L'apragmatisme: l'impossibilité de prendre des décisions ou de faire preuve d'initiative
4) Akinésie psychique : la personne perd toute motivation et peut même devenir incontinent ou incapable de se mouvoir pour sauver sa propre vie
5) Mort psychogène: la personne perd totalement sa volonté de vivre

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