Jean-Christophe Lagarde ou la mort de l’UDI<!-- --> | Atlantico.fr
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Jean-Christophe Lagarde.
Jean-Christophe Lagarde.
©UDI

Chemin de croix

Jean-Christophe Lagarde, 47 ans, est devenu le président de l’Union des démocrates et indépendants (UDI) hier jeudi 13 novembre à l’issue du vote interne des militants centristes, avec 53,49 % des voix. Mais la partie est loin d'être gagnée pour lui, car nombreux sont les sceptiques.

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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Dans le duel fratricide qui opposait le député maire de Drancy, Jean-Christophe Lagarde à l'ancien ministre de la Défense Hervé Morin pour la conquête de l'UDI, le parti centriste créé par Jean-Louis Borloo, c'est l'élu de Seine-Saint-Denis qui l'a emporté avec 53,5% des suffrages et 1500 voix de plus que son rival. Un score incontestable en apparence, mais la sincérité du scrutin a été sévèrement contestée au premier tour à cause du gonflement des voix dans le département d'élection du vainqueur, mais aussi dans d'autres départements. Le vainqueur sera officiellement intronisé ce samedi à l'occasion d'un congrès qui va définitivement clore l'ère Borloo. Cependant, le climat étant loin d'être au rassemblement de mise dans ces circonstances, l'avenir de l'UDI apparaît pour le moins compromis.                                                                                                                                                                 

Si dès hier soir Jean-Christophe Lagarde a déclaré que "ma première responsabilité consiste à créer après les frictions occasionnées par toute campagne interne, les conditions de l'unité", et assuré que "la collégialité sera la règle, le vote la manière de départager les options dans toutes nos instances", la partie est loin d'être gagnée pour lui tant il est accueilli avec froideur et scepticisme. Si l'élu a montré son savoir-faire dans son département, il devra aussi incarner l'image du renouveau sur l'échiquier politique, ce qui ne se fait pas en quelques mois.

Hervé Morin s'est contenté de "prendre acte, même si les manœuvres décrites par la presse ont altéré la sincérité du processus électoral", en soulignant que "compte tenu du faible écart de voix et du contexte si particulier que certains ont relevé, je laisse à chacun le soin de tirer les conclusions qu’il entend de ce scrutin". Et l'autre candidat éliminé au premier tour, le député maire de Neuilly, attend les conclusions de la commission pour la transparence pour reconnaître la victoire de Lagarde. Le président du groupe UDI de l'Assemblée, Philippe Vigier, s'est contenté de lui adresser des félicitations polies. Restent les Radicaux valoisiens : ils représentent la force la plus importante de cette nouvelle confédération centriste et avaient soutenu Jean-Christophe Lagarde au deuxième tour ; ils n'ont pas manqué de le souligner dans leur communiqué qu'ils "entendent tenir un rôle de premier plan dans la construction et l’animation de l’UDI et s’impliquer pleinement dans les échéances électorales à venir en 2015 et 2017".

Plus que les échéances locales de 2015, c'est la présidentielle de 2017 qui est dans tous les esprits et qui divise les centristes. Lorsque Jean-Louis Borloo a quitté l'UMP après son départ du gouvernement, faute d'avoir été nommé à Matignon, son projet consistait à construire une formation centriste qui fasse pièce au parti majoritaire, à l'image de ce qu'a été l'UDF (qui regroupait les centristes et les libéraux du Parti Républicain), sous Valéry Giscard d'Estaing. L'ancien ministre de l'Ecologie se voyait présidentiable. L'homme a du charisme mais manque de sens de l'organisation indispensable à un chef de Parti politique. Par la suite, ses ennuis de santé, la montée du Front National, le retour de Nicolas Sarkozy et surtout la perspective de l'organisation d'une primaire ouverte de la Droite et du Centre, tous ces éléments disparates, ont changé la donne. Pour Jean-Christophe Lagarde, pas question d'entrer dans le processus des primaires voulues par les dirigeants UMP : pour exister le Centre doit, d'après lui, avoir son propre candidat à l'élection  présidentielle et il se voit très bien dans ce rôle. Redoutant un morcellement des voix de Droite au premier tour, à l'instar de la multiplication des candidatures de Gauche face à Jean-Marie Le Pen qui a été fatal à la candidature de Lionel Jospin en 2002, Hervé Morin et ses amis sont au contraire favorables à la participation de l'UDI à la primaire, à l'image de la démarche des Radicaux de Gauche avec le Parti Socialiste en 2011.

Mais au Centre, on redoute aussi que certains répondent favorablement à l'appel de Nicolas Sarkozy. On ne voit pas bien pourquoi ceux qui ont refusé de faire le pas en 2002 le feraient aujourd'hui, d'autant que les soubresauts de l'UMP avaient conduit quelques députés UMP, ex-RPR, à rejoindre l'UDI . Aujourd'hui, les différences idéologiques entre Orléanistes et Bonapartistes réincarnées plus tard par les Gaullistes et les Giscardiens appartiennent à l'Histoire. Mais des traditions, des différences d'approche sur les questions de gouvernance subsistent et il est un fait que toute la Droite et le Centre droit ne peuvent pas vivre sous le même toit, de même que les Radicaux ne seront jamais des Démocrates Chrétiens et inversement. "Ni fusion, ni fédération, ni confusion", a décrété l'ancien ministre UMP Yves Jégo, aujourd'hui membre du Parti Radical. Voilà pourquoi, même avec un chef incontesté, l'UDI ne peut pas devenir un parti au sens strict du terme, mais sera un label électoral pour les élections cantonales et régionales. Et en attendant, Radicaux, Nouveau Centre, Force Démocrate et toutes les autres chapelles centristes continueront de vivre leur vie.

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