"Je serais au second tour" et autres promesses fortes de la campagne 2022<!-- --> | Atlantico.fr
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Un promeneur devant des affiches de campagne, le 31 mars à Montpellier.
Un promeneur devant des affiches de campagne, le 31 mars à Montpellier.
©Pascal GUYOT / AFP

Palpitante campagne

À dix jours du premier tour de l’élection présidentielle 2022, la campagne électorale ne parviendrait pas à intéresser les Français. Elle n'est pourtant pas ennuyeuse du tout ! Elle est au contraire très drôle et le devient de plus en plus à mesure qu’on avance vers le premier tour.

Nathalie MP Meyer

Nathalie MP Meyer

Nathalie MP Meyer est née en 1962. Elle est diplômée de l’ESSEC et a travaillé dans le secteur de la banque et l’assurance. Depuis 2015, elle tient Le Blog de Nathalie MP avec l’objectif de faire connaître le libéralisme et d’expliquer en quoi il constituerait une réponse adaptée aux problèmes actuels de la France aussi bien sur le plan des libertés individuelles que sur celui de la prospérité économique générale.
 
https://leblogdenathaliemp.com/

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C’est incompréhensible. À dix jours du premier tour de l’élection présidentielle 2022, la campagne électorale ne parviendrait pas à intéresser les Français ! D’après l’institut de sondage Ifop, seulement 56 % d’entre eux ont évoqué le sujet dans leurs conversations de la semaine dernière alors qu’en 2017, ils étaient 80 % à le faire à la même époque ! Ne dirait-on pas que les Français trouvent la campagne mortellement ennuyeuse ?

Alors permettez-moi de m’insurger. C’est trop injuste ! Trop injuste pour nos candidats, trop injuste pour notre classe politique et trop injuste pour tous ces nombreux politiciens dévoués au bien commun qui n’ont jamais ménagé leur peine pour nous amuser et nous faire rire. Non, non et non, la campagne électorale n’est pas ennuyeuse du tout ! Elle est au contraire très drôle et le devient de plus en plus à mesure qu’on avance vers le premier tour.

Prenez la candidate des Républicains Valérie Pécresse. Dans les sondages les plus récents, on voit qu’elle a bien du mal à se maintenir aux 10 % où elle est tombée depuis quelques semaines. Mais d’un autre côté, elle l’a toujours dit : dans sa vie politique, on l’a mille fois donnée perdante et finalement, au dernier moment, quand personne n’y croyait plus, elle a gagné ! Dans sa région Île-de-France, par exemple, et face à un candidat socialiste, en plus !

Selon cette philosophie de l’espoir qui n’est pas sans rappeler la méthode Coué, elle aurait tout lieu de s’inquiéter si elle était mieux placée aujourd’hui dans les intentions de vote. Dieu merci, c’est très loin d’être le cas, ce qui lui permettait d’affirmer sur LCI le 31 mars, au micro d’Elisabeth Martichoux : « Je peux être la surprise du deuxième tour. »

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Pour une surprise, ce serait une surprise, incontestablement. Je ne sais pas vous, mais moi, je ris aux éclats. Quel brio, quelle persévérance, quel spectacle ! The show must go on. Une vraie politicienne, en somme.

Mêmes 10 % et même optimisme chez Éric Zemmour. Pas parce que les derniers seront les premiers, mais parce qu’il se voit comme l’homme providentiel de la réconciliation des droites et le sauveur de la France. Les électeurs potentiels de Mmes Le Pen et Pécresse l’ignorent peut-être encore, mais lui seul est capable de bouleverser l’échiquier politique au soir du premier tour.

Et puis tout le monde sait qu’il existe un immense vote Zemmour « caché » tandis que Le Pen est scandaleusement surévaluée pour activer le réflexe facile du barrage à la droite et l’extrême-droite. Et hop ! Cinq points de moins pour elle, cinq points de plus pour lui, on oublie Mélenchon qui, mine de rien, avance dans son « trou de souris », et la conclusion s’impose d’elle-même : « Je vous assure que je serai au second tour. » (Zemmour, BFM TV, 30 mars 2022).

.Peut-être le candidat de Reconquête! a-t-il eu connaissance de la fameuse « prophétie de la chaussette ».

Il se trouve que début mars, la boutique lilloise « Chaussettes et Cie » s’est lancée dans la confection de chaussettes rouges ou bleues, avec ou sans masque chirurgical, à l’effigie de huit candidats présidentiels sur douze – Hidalgo, Jadot, Lassalle, Le Pen, Macron, Mélenchon, Pécresse et Zemmour. Au départ, Lassalle n’y était pas, mais face à la demande, il a dû être ajouté, de même que Taubira qui n’est pourtant plus candidate :

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Or selon cette toute nouvelle méthode de prédiction du résultat du vote, Marine Le Pen ne serait pas au second tour. Après récapitulation statistique des ventes, les préférences des acheteurs de chaussettes siglées au portrait des candidats vont dans l’ordre à Macron, puis Zemmour, puis Mélenchon :

« Les trois qui se distinguent vraiment sont Emmanuel Macron, Eric Zemmour, qui est quand même assez haut, et Mélenchon qui fait une belle remontada. » (Prophétie de la Chaussette, 20 Minutes, 30 mars 2022)

Attention quand même. Si certains acheteurs manifestent ainsi directement leur adhésion politique, d’autres aiment tout particulièrement l’idée de pouvoir fouler aux pieds les candidats qu’ils rejettent le plus, surtout avec un masque sur la bouche, comme pour leur intimer avec dédain de se taire une bonne fois pour toutes.

Côté Parti socialiste, Anne Hidalgo adore « ses » chaussettes 2022 – ce n’est pas le problème. En plus, elle peut se prévaloir de l’éminent soutien de l’ancien Premier ministre Lionel Jospin – ce n’est pas le problème non plus. Du moins à condition d’oublier que Jospin fut évincé du second tour de 2002 au moment où Jean-Marie Le Pen y accédait. Mais quand on pense à cette pauvre Valérie Pécresse qui n’est même pas arrivée à tirer un seul petit mot aimable de Nicolas Sarkozy, ce n’est pas si mal.

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En revanche, Hidalgo est à 2 % max dans les sondages – problème existentiel pour le PS. À ce niveau à peine perceptible qui fait du « grand parti de Jaurès, Blum et Mitterrand » un groupuscule de plus au sein d’une gauche de plus en plus Insoumise, difficile de jouer plus longtemps à prétendre être au second tour. Mais l’on peut agréablement s’amuser à faire des prédictions sur les autres : « Jean-Luc Mélenchon ne sera pas au deuxième tour. » (Hidalgo, France 3, 6 février 2022)

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Du reste, les déboires présidentiels d’Anne Hidalgo ne font pas que des malheureux. Quoique retiré de la vie politique, l’ex-candidat du PS Benoît Hamon n’est pas fâché de faire savoir à qui veut l’entendre que quand il se compare, il se console. N’avait-il pas réalisé le score appréciable de 6,36 % en 2017 ? « Et dire que tout le monde se foutait de ma gueule avec mes 6 %. »  (Hamon, rapporté par ChezPol-Libération, 31 mars 2022)

Ha, ha, la bonne blague ! Petite amnésie passagère, Benoît ? En 2017, Yannick Jadot s’était désisté en faveur du PS avant le premier tour. Donc pour respecter le périmètre de comparaison, il convient d’ajouter le score du Jadot solo d’aujourd’hui, soit environ 5 %, à celui d’Anne Hidalgo. Et là, nous arrivons au fabuleux total de 7 %. C’est toujours mieux que 6,36. Carrramba, Encore rrraté !

Mais le pire dans tout cela, ce sont les élections législatives. Avec les nombreuses défections d’anciennes gloires socialistes au profit d’Emmanuel Macron – les Touraine, Guigou, Valls, Chevènement – qui, hormis Hollande, pour faire entendre la voix de « la gauche de responsabilité » au sein de la République ? Qui, hormis Hollande, pour faire résonner la voix des grands orateurs socialistes d’antan à l’Assemblée nationale ?

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Autour de l’ancien Président, on murmure, on intrigue, on s’interroge. On soutient Hidalgo, mais on pense très fort à l’après. On compte les Présidents et les Premiers ministres redevenus députés : Giscard, Barre, Fillon, Valls, Ayrault… et l’on teste, l’air de rien, l’argument-massue : « Cela fait longtemps qu’il n’y a pas eu de grandes personnalités à l’Assemblée nationale. » (Entourage Hollande, l’Opinion, 31 mars 2022)

Il fallait y penser…

Voilà, voilà. C’était mon article de 1er avril. Aucun canular dans les faits rapportés, que du vrai de vrai. Mais une réalité qui prête tellement à rire et se moquer qu’on se demande s’il ne faudrait pas plutôt en pleurer. On parle quand même de l’élection présidentielle. Ça promet.

Article publié initialement (le 1er avril, donc !) sur le blog de Nathalie MP

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