Iran-Occident : comment un coup de fil historique entre Obama et Rohani va déclencher un bouleversement au Moyen Orient<!-- --> | Atlantico.fr
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Hassan Rohani s'est entretenu au téléphone avec Barack Obama
Hassan Rohani s'est entretenu au téléphone avec Barack Obama
©Reuters

Détente ?

Barack Obama et Hassan Rohani se sont entretenus par téléphone vendredi 27 septembre. Une première depuis 1979, date de la révolution islamique.

Ardavan Amir-Aslani

Ardavan Amir-Aslani

Ardavan Amir-Aslani est avocat et essayiste, spécialiste du Moyen-Orient. Il tient par ailleurs un blog www.amir-aslani.com, et alimente régulièrement son compte Twitter: @a_amir_aslani.

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Ca y est, la semaine tant attendue est terminée. Le nouveau Président iranien, Hassan Rohani, est arrivé à New York en star sous les feux des projecteurs, le sourire aux lèvres. Il a volé la vedette à l‘ensemble des autres chefs d’Etat et a été suivi par une cohorte de journalistes. En effet, la planète entière était aux aguets pour comprendre la personnalité de cet élu que tous qualifiaient de modéré. Il s’agissait de vérifier que, comme annoncé, il y aurait une rupture, tant anticipée, avec la présidence chaotique de son prédécesseur, Ahmadinejad. Tous furent rassurés. Ce membre du clergé iranien s’est employé à chaque instant à convaincre les observateurs que non seulement le ton avait changé en Iran mais aussi que la substance avait été métamorphosée.

Rohani s’est efforcé de véhiculer l’idée qu’entre lui et son prédécesseur ce n’était pas une histoire de bonnet blanc et blanc bonnet mais qu’il existait une véritable différence. Il s’est même abstenu de mentionner le nom d’Israël dans son discours devant l’assemblée générale de l’ONU en contraste radical avec son prédécesseur. Alors qu’Ahmadinejad ne cessait d’invectiver l’Occident en donnant des leçons de moralité, de nier la Shoah et d’appeler de ses vœux la destruction de l’Etat d’Israël ; Rohani, en revanche, a réservé une surprise nouvelle pour chaque jour de sa présence aux Etats-Unis.

Cela a commencé par un changement de ton. Fini les invectives. Fini le discours millénariste. Fini l’attitude belliqueuse d’un Ahmadinejad se pavanant des attributs d’un paon rempli de certitudes, servant la théorie du complot sioniste à la communauté internationale tant à propos du 11 septembre que de l’Holocauste. Rohani a interpellé tous les observateurs par la novation qu’il a apportée. Après avoir préparé l’Occident au changement par son message de nouvel an adressé au peuple juif, il a radicalement rompu avec Ahmadinejad en reconnaissant la Shoah et en condamnant le génocide juif de la Seconde guerre mondiale. En libérant des prisonniers politiques dans son pays avant son arrivée à New York, il a traduit son souhait de changement à l’intérieur même de son pays.

En insistant sur le fait qu’il avait le soutien du Guide suprême, il a coupé court à l’argumentaire des pessimistes qui persistaient à le présenter comme un pantin entre les mains de l’homme fort du régime. Le Guide lui-même, en rappelant à l’ordre la milice armée du régime, les gardiens de la révolution, a apporté son concours à l’initiative de paix personnifiée par le Président iranien. Ceci a valu à Obama l’abandon de la phrase « toutes les options sont sur la table » dans son discours. Phrase qui brandissait en permanence la menace de frappe contre l’Iran.

En demandant à Javad Zarif, son Ministre des affaires étrangères, de changer de fusil d’épaule, il a fait dire à l’ensemble des ministres du groupe de 5+1 que l’Iran semblait avoir changé et que le dialogue avec ce pays s’avérait être constructif après tant d’années de langue de bois et d’inertie. Soudain donc, les mêmes paroles que l’Iran ne cessait de répéter à travers les années, prenaient un sens nouveau. Elles devenaient crédibles. Comme si dans la bouche de Rohani la proclamation selon laquelle l’Iran ne cherchait pas à développer la bombe prenait un sens nouveau. Alors que la même phrase dans la bouche de son prédécesseur semblait vide de sens. Même la « fatwa » du guide suprême contre les armes nucléaires, maintes fois réitérée, rappelée par Rohani, paraissait plus crédible et reconnue comme telle par Obama

Et voilà qu’en ce vendredi, un entretien téléphonique venait d’avoir lieu, à « l’improviste », entre Rohani et Obama. Une première depuis 1979. Voici 35 ans que les dirigeants iraniens n‘avaient pas échangé avec un Président américain. Voici chose faite. La voie diplomatique est maintenant la seule à être choisie par les parties. Il est peut-être même possible que le calendrier de 3 à 6 mois dépeint et souhaité par Rohani pour aboutir à une solution sur le nucléaire soit une réelle possibilité. Il était venu à New York pour mettre un terme aux sanctions qui asphyxient l’économie de son pays. Il était venu avec l’espoir d’entamer le retour de l’Iran dans le concert des nations, en mettant un terme à l’ostracisme que subissait l’Iran depuis 35 ans. Il était venu pour expliquer aux américains que comme eux, l’Iran combattait Al-Qaeda et le djihadisme.

Son discours a été entendu. Maintenant, le chemin le moins fréquenté, celui du dialogue et de la paix peut être emprunté. Rohani peut rentrer rassuré à Téhéran tellement sa mission fut une réussite.

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