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Iran, Egypte, Syrie : Israël face à la nouvelle donne de ses voisins
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Relations (super) tendues

Depuis la première guerre israélo-arabe de 1948, l'Etat hébreu ne doit pas seulement faire face à des régimes hostiles, mais aussi à des peuples gagnés collectivement à une propagande haineuse alimentée par le nationalisme arabe et le fanatisme religieux.

Alexandre del Valle

Alexandre del Valle

Alexandre del Valle est un géopolitologue et essayiste franco-italien. Ancien éditorialiste (France SoirIl Liberal, etc.), il intervient dans des institutions patronales et européennes, et est chercheur associé au Cpfa (Center of Foreign and Political Affairs). Il a publié plusieurs essais en France et en Italie sur la faiblesse des démocraties, les guerres balkaniques, l'islamisme, la Turquie, la persécution des chrétiens, la Syrie et le terrorisme. 

Son dernier ouvrage, coécrit avec Jacques Soppelsa, Vers un choc global ? La mondialisation dangereuse, est paru en 2023 aux Editions de l'Artilleur. 

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Ilot majoritairement juif, occidentalisé et pro-américain dans un océan arabo-musulman majoritairement anti-juif, anti-occidental et anti-américain, l’Etat hébreu ne doit pas seulement faire face, depuis la première guerre israélo-arabe de 1948, à des régimes hostiles, mais aussi à des peuples gagnés collectivement à une propagande haineuse alimentée par le nationalisme arabe et le fanatisme religieux. Or l’islamisme politique a remporté la plupart des élections depuis le début du printemps arabe. Et comme en Turquie avec le Premier ministre très anti-israélien Erdogan, seule la menace d’intervention militaire dissuade encore les partis issus des Frères musulmans au pouvoir en Tunisie, au Maroc ou en Egypte, d’aller plus loin.

Parmi les ennemis de l’Etat hébreux, l’Iran chiite, jadis précieux allié d’Israël sous les Shah, revêt une place spéciale : il est certes le pire ennemi idéologique, politique et stratégique de l’Etat hébreux, depuis l’arrivée de l’Ayatollah Khomeyni en 1979, mais il est également en guerre avec le monde arabo-sunnite. Pour les stratèges les plus cyniques de Téhéran, Israël est un "ennemi utile", dont la dénonciation permet de mobiliser les masses arabes afin de leur faire croire que la bombe nucléaire de l’Iran islamiste n’est destinée qu’à "détruire Israël"... alors qu’elle est surtout tournée contre l’Arabie saoudite... Bien que n’étant pas en conflit de territoire avec l’Iran, Israël n’en est pas moins devenu l’ennemi suprême des Mollahs, tout comme d’ailleurs leurs alliés nationalistes arabes syriens ou Hezbollahis libanais, tous pris au piège de leur rhétorique maladivement antisioniste.

Pourtant, dans le cadre de la guerre totale qui oppose l’axe chiite Irak-Liban-Syrie-Iran à l’axe sunnite Arabie-saoudite-Salafistes-Frères musulmans, les Mollahs chiites iraniens, irakiens ou libanais, comme les Syriens chiites-alaouïtes auraient tout intérêt à sceller avec l’Etat hébreux des "alliances de revers". Certes, le Premier ministre Benyamin Netanyahou a qualifié le nouveau président iranien, Hassan Rohani, de "loup déguisé en mouton". Il rappelle en effet le "réformateur" Khatami, qui présida la République islamique iranienne de 1997 à 2005 et qui endormit les Occidentaux afin de gagner du temps pour accélérer le programme nucléaire, ce que le "gentil mollah" Rohani pourrait très bien faire, sachant qu’il ne pourra pas imposer des improbables vues "modérées" au vrai homme fort du régime, le Guide suprême Khamenei.

Quant à la Syrie, même si certains modérés de l’ASL annoncent de meilleures relations futures avec l’Etat juif, et bien que des stratèges syriens et israéliens estiment qu’une paix serait possible entre Damas et Jérusalem en échange de la restitution du Golan à la Syrie, on voit mal comment persuader les leaders du Baas au pouvoir en Syrie, comme les Frères musulmans ou autres salafistes du front al-Nosra, intégré à Al-Qaida en Irak, de voir en Israël autre chose qu’un diable coupable de tous les maux...

Morale de l’Histoire, les Etats et hommes ne se battent pas seulement au nom d’intérêts géo-économiques froids. Ils sont souvent aveuglés par des fixations idéologiques qui contredisent leurs propres intérêts géopolitiques à long terme. Car les Etats chiites et les minorités alaouites (voir même chrétiennes) auraient tout intérêt, face à la menace globale de l’islamisme sunnite en provenance du Golfe, à s’allier avec Israël. Certes, on peut considérer cette proposition comme une fantaisie pure. Mais les exemples passés ou actuels des Druzes d’Israël, des chrétiens du Liban dans les années 1980 avec Béchir Gémayel ou encore des Iraniens chiites avant 1979 montrent que "l’alliance des minorités" peut fonctionner face à une masse hostile. L’avenir dira si le fanatisme anti-juif et anti-israélien des différentes branches du chiisme et d’autres minorités persécutées par les sunnites pèsera plus que leur intérêt communautaire direct...

En tout cas, les révolutions arabes ont initié un nouveau processus qui risque, à terme de changer la donne régionale et idéologique : les masses musulmanes arabes ne se rebellent plus seulement contre le "sionisme", l’Occident impérialiste-croisé ou le sionisme, mais de plus en plus contre leurs propres dirigeants, militaires nationalistes ou islamistes. L’idéologie du complot et du bouc-émissaire n’est plus le seul carburant des masses arabo-musulmanes. Et la réactivation de la guerre séculaire sunnites-chiites risque de contribuer encore plus à faire évoluer les registres et à détrôner les fixations...

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