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Hausse de la consommation et baisse du chômage : pourquoi la catastrophe annoncée du Brexit n’a pas (encore ?) eu lieu
©Reuters

Fin du monde

Le Brexit devait être une catastrophe économique pour le Royaume-Uni. Pourtant, le chômage est actuellement au plus bas outre-Manche et la consommation est bonne. Des indicateurs qu'il convient, malgré tout, de prendre avec des pincettes.

Frederik Ducrozet

Frederik Ducrozet

Frederik Ducrozet est économiste senior chez Pictet Wealth Management, en charge de l'Europe, depuis septembre 2015. Auparavant, il était économiste chez Credit Agricole CIB entre 2005 et 2015. Spécialiste de l'économie européenne, et de la politique monétaire de la BCE en particulier, ses travaux portent notamment sur le cycle du crédit, les politiques monétaires non-conventionnelles et leurs conséquences pour les marchés financiers.

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Atlantico : Alors que le Brexit faisait craindre une crise économique outre-Manche, il n'en est rien pour le moment. Fin juin, le taux de chômage s'établit à 4,9 %, le niveau le plus bas depuis l'été 2005 et le nombre de demandeurs d'emploi a reculé de 207 000 personnes sur trois mois. Dans le même temps, les ventes au détail progressent de 1,4 % en juillet et laissent espérer une consommation des ménages robustes. A quoi tient ce paradoxe ? Le Brexit n'a-t-il finalement aucun effet économique ?

Frédérik Ducrozet : Il est de toute façon trop tôt pour tirer des conclusions de moyen terme. Tous les indicateurs dits "avancés", comme les indicateurs des directeurs d'achats et les enquêtes de confiance, qui ont un caractère prédictif pour la croissance des trimestres à venir, se sont effondrés. Ils sont compatibles avec un recul du PIB de l'ordre de 0,5% sur le trimestre. D'un autre côté, les indicateurs de données durs ou "retardés", comme ceux que vous avez cités, donnent peu d'indices sur les perspectives de croissance à court terme. C'est surtout le cas pour le marché du travail, qui est l'indicateur retardé par excellence. C'est également le cas, mais dans une moindre mesure, pour les ventes de détail. Cependant, elles donnent à mon avis une information très utile : la consommation n'est pas la composante de la croissance qui sera affectée. C'est une bonne nouvelle, mais ce ne sera pas là qu'il faudra regarder pour évaluer l'impact du Brexit.

Le Brexit a cependant eu un effet sur les prix de l'immobilier, qui ont connu en juillet leur plus faible hausse en trois ans. En outre, le nombre d’acheteurs et les ventes conclues sur le marché ont baissé par rapport au mois précédent. Compte tenu du niveau élevé des prix, est-ce vraiment une mauvaise nouvelle pour la population ?

Nous avons effectivement des signes avant-coureurs de corrections sévères qui s'annoncent sur l'immobilier. Mais c'est trop tôt pour en évaluer l'ampleur. Ce n'est pas une bonne nouvelle pour la richesse des ménages ou pour l'activité au sens large. Nous pouvons cependant faire des estimations sur d'autres composantes de marché, comme la devise ou des flux financiers.

Le Brexit aura-t-il vraiment des effets à long terme sur l'économie anglaise ? Les récentes déclarations de Theresa May et de Mark Carney, gouverneur de la Banque d'Angleterre, sont-elles à même de faire du Brexit un non-événement économique de court, moyen, et long terme ?

Non, cela ne pourra pas être un non-événement. Le scénario qui s'annonce est celui d'un choc très fort, avec plusieurs dimensions. L'ajustement risque d'être très long. D'abord, nous ne savons pas quand les négociations vont démarrer. Ensuite, nous ne savons pas quelles formes elles vont prendre. Pour finir, nous ne savons pas vers quel type d'accord nous allons tendre. Est-ce que nous aurons un arrangement entre l'Union européenne et le Royaume-Uni du même type que celui négocié avec le Canada ? Nous ne pouvons donc pas deviner les effets à terme sur l'activité et la richesse par habitant du pays. Mais nous pouvons imaginer un effet à très long terme négatif et significatif sur l'économie britannique. Mais tout dépendra de la forme que prendront in fine les accords bilatéraux, pas seulement commerciaux, mais dans toutes leurs dimensions.

Il y a un risque de déséquilibre macroéconomique très important, dans la mesure où des déséquilibres dans les grands agrégats macroéconomiques étaient déjà visibles avant le Brexit. Je doute qu'une simple baisse de la devise puisse résoudre le problème. Nous pouvons craindre une baisse du potentiel de croissance et à très court terme, il y a le risque que le gouvernement n'adopte pas la bonne politique économique et que les mesures budgétaires et structurelles ne soient pas à la hauteur.

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