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François Hollande utilise les risques de terrorisme pour s’affranchir du Pacte de stabilité européen… C’est un peu gros
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L'Edito de Jean-Marc Sylvestre

Alors que le Président avait fait un parcours presque sans faute, nos partenaires européens et les milieux d’affaires considèrent qu’il est allé trop loin en annonçant qu’il s’affranchirait des obligations de stabilité budgétaire pour pouvoir financer son pacte de sécurité. Ça ne passe pas et ça ne peut pas passer.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Annoncer solennellement dans son discours à Versailles qu'il allait s’affranchir de son obligation européenne de maintenir son déficit budgétaire à moins de 3% pour pouvoir répondre à l’urgence des urgences et engager des dépenses supplémentaires, la ficelle est un peu grosse et elle ne passe pas.Dans toutes les capitales européennes et dans la plupart des états-majors d’entreprise, on considère que le président de la République s’est livré-là a une manœuvre dilatoire qui n’est pas digne et surtout pas à la hauteur de l’enjeu. C’est même politiquement très démagogique. Personne ne peut croire à cette nécessité dans le cadre actuel.

François Hollande a expliqué froidement, sereinement, les yeux dans les yeux qu'il allait créer 5000 postes de policiers supplémentaires pour accroitre les moyens de sécurité, qu'il allait renforcer les moyens alloués à la douane etc... Selon les estimations rapides, il va dépenser entre 2 et 3 milliards qui n’avaient pas été prévus et qui vont creuser nos déficits budgétaires au-delà de la norme d’équilibre, soit 3%. Le message est clair, la gravité de la situation l’empêche de poursuivre son programme d’assainissement.

Ses services ajoutent que, de toute façon, les taux d’intérêt  sont nuls ou presque grâce à la magie de Mario Draghi, le président de la BCE. Tout est donc parfait, on peut emprunter.

Politiquement, ça peut passer. Les parlementaires savent que l’opinion a besoin de réponses simples et apparemment efficaces. Ces moyens supplémentaires ne seront pas inutiles. Mais le problème n’est pas là. La réalité est que le Président utilise l’état d’urgence pour justifier son incapacité à tenir les comptes de la France.

On peut certes s’endetter pour se protéger de Daesh et de ses terroristes, mais si on se rapproche du point de faillite ou si dans six mois les taux d’intérêt remontent, parce qu'il faudra bien qu'ils remontent un jour sauf à ruiner complètement les épargnants, et bien ce jour-là, la France en faillite sera devenu encore plus vulnérable au terrorisme.

Le Président avait d’autres solutions pour financer le renforcement des forces de sécurité. Tout d'abord, il pouvait faire des économies ailleurs et dégager des moyens. Deux milliards d'euros, ce n’est pas énorme, il les trouvent pour offrir une exonération fiscale à des catégories politiquement sensibles . Mais faire des économies en France, ça parait impossible.

Le deuxième problème est moins un problème de moyens globaux que d’efficacité des moyens existants. On pouvait engager une démarche d’efficacité. On pouvait aussi payer des heures supplémentaires aux services d’ordre. Ils n’auraient pas refusé de travailler. C’est ce qu' ont fait les médecins et les infirmières dans les hôpitaux, alors que, faut-il le rappeler, le corps médical s’était mis en grève pendant trois jours pour protester contre le tiers payant.

Cela dit, la démarche de François Hollande aurait pu être intéressante s’il était allé jusqu’au bout de la logique dans laquelle il est entré.

Demander à Bruxelles de pouvoir sortir des normes budgétaires pour financer un effort de guerre qui va profiter à l’Europe toute entière, ça revient  à demander à nos partenaires européens de prendre en charge une partie de cet effort de défense à l’extérieur comme à l’intérieur. Pourquoi pas ? Normal, logique.

François Hollande va donc imposer aux pays de la zone euro, une mutualisation des dépenses de guerre, sans leur dire.  Alors que, si on appelle les choses par leur nom, cette mutualisation de la dépense nous conduit directement dans l’antichambre d’une institution fédérale.

François Hollande n’est pas allé jusque-là. Il n’a pas expliqué que de dépasser les normes budgétaires c’est demander aux autres de payer à notre place. Il ne veut pas le reconnaitre. Et pourquoi ?

Tout simplement parce que si on commence un processus de  mutualisation de certaines dépenses, il faudra accepter de mutualiser les processus de direction stratégique et de gestion. En terme clair, si les Européens acceptaient de payer une cote part de la facture de guerre qui regroupe les dépenses engagées par la France, il faudra que la France accepte de partager le pouvoir de décision.

Et cela, le transfert des pouvoirs régaliens au niveau de l’union européenne, il n’en est pas question. Du moins publiquement. Trop sensible politiquement. Trop tabou aux quatre coins de l’hémicycle.

François Hollande a raté une occasion de faire progresser l’union politique en Europe. Il s’est contenté de petits arrangements avec la Commission pour masquer son impossibilité à faire ses comptes.

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