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Fiscalité, subventions, baisses de charges… Le bilan de ce que les entreprises ont obtenu depuis l’arrivée de François Hollande à l’Élysée (partie 1)
©Reuters

Étude d’impact

Le chef de file des députés PS Bruno Le Roux a estimé mercredi 4 juin que les déclarations du numéro deux du Medef à propos "d'un harcèlement fiscal jamais vu" pouvaient "remettre en cause le pacte de responsabilité", et qu'il en avait assez "de ce syndicat des patrons qui est toujours en train de se plaindre".

Rémy Prud'homme

Rémy Prud'homme

Rémy Prud'homme est professeur émérite à l'Université de Paris XII, il a fait ses études à HEC, à la Faculté de Droit et des Sciences Economiques de l'Université de Paris, à l'Université Harvard, ainsi qu'à l'Institut d'Etudes Politique de Paris. 

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Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Le chef de file des députés PS Bruno Le Roux a estimé mercredi 4 juin que les déclarations du numéro deux du Medef pouvaient "remettre en cause le pacte de responsabilité", et qu'il en avait assez "de ce syndicat des patrons qui est toujours en train de se plaindre". L'occasion de faire le point sur qu'ont réellement obtenu les entreprises depuis le début du quiquennat de François Hollande. 

  • Fiscalisation des heures supplémentaires 

La défiscalisation des heures supllémentaires était une des mesures phares du quiquennat de Nicolas Sarkozy. A son arrivée au pouvoir en mai 2012, la gauche l'a supprimée.

Rémy Prud’Homme : La mesure a principalement touché les ménages, et plus exactement les travailleurs. Elle a augmenté leurs impôts, mais la mesure a également touché les entreprises. Elle a réduit la demande d'heures supplémentaires (il y a des travailleurs qui étaient prêts à travailler pour gagner 100 qui ne le sont plus pour gagner 80). Et gêné les entreprises en diminuant leur flexibilité et leur adaptabilité. L'ampleur de cette gêne est encore difficile à mesurer aujourd’hui.

Philippe Crevel : On a constaté en 2012 une forte baisse du pouvoir d’achat des ménages français une et donc baisse de la consommation intérieure. Par l’augmentation des charges induites, cette mesure a également diminué la compétitivité globale des entreprises recourant aux heures supplémentaires en dégradant les bénéfices dans les comptes de résultat.

  • Sur le raccourcissement de la durée des cotisations retraites

Philippe Crevel : L’élargissement du dispositif "carrière longue" qui permet désormais un départ à la retraite à 60 ans, ainsi que la création prévue pour 2015 du compte pénibilité entraine une augmentation des cotisations patronales. 1,5 à 2 milliards seront ponctionnés sur les entreprises. Cette mesure diminue encore une fois la compétitivité des entreprises françaises en dégradant les taux de marges.

  • Le crédit d'impôt compétitivité emploi

En vigueur depuis jeanvier 2013, ce crédit d'impôt est calculé en fonction de la masse salariale et est censé réduire le coût du travail de 4% en 2013 et de 6% en 2014 sur les salaire allant jusqu'à 2800 euros nets par mois. L'objectif est de permettre aux entreprises françaises de redresser leurs marges. 

Philippe Crevel : Le dispositif est trop récent pour avoir une réelle étude d’impact à ce sujet. On pourra commencer à juger les premiers effets du CICE au minimum à la fin de l’année 2014.

Le dispositif a été critiqué dans un premier temps pour sa complexité, mais il a néanmoins directement allégé le coût du travail, les entreprises l’utilisent donc malgré la complexité de sa mise en place. Cette mesure améliore un peu la compétitivité des entreprises. Je reste malgré tout dubitatif sur le CICE car on est sur des effets de seuil (seuls les salaires jusqu’à 2,5 fois le SMIC feront partie de l’assiette de calcul). Si on s’interroge sur les principaux bénéficiaires de cette mesure, on s’aperçoit que ce sont les secteurs de l’industrie et notamment automobile, et surtout la Banque Postale qui en bénéficiera car les emplois rentrent pleinement dans les critères du CICE. On peut déplorer le fait qu’elle ne favorise pas forcément les secteurs de pointe à forte compétitivité et qui sont présents sur les marchés extérieurs. Soit le CICE va aider les entreprises qui se retrouvent en déficit chronique, soit les services non exposés à la compétitivité. On imagine qu’elle va diminuer les coûts du travail de 2,6% à 3%, pour une moyenne à 2,8% dans l’industrie et 3% dans la construction, son impact sur la compétitivité ne nous fera donc pas vendre plus de Rafales, de TGV ou de produits biotechnologiques qui sont des secteurs où les salaires pratiqués sont généralement supérieurs à 2,5%.

  • L'augmentation de la contribution exceptionnelle sur l'impôt sur les sociétés pour les entreprises dont le Chiffre d'affaires est supérieur 250 millions d'euros

Philippe Crevel : L’impact ici est simple : il minore les bénéfices des entreprises, et est donc paradoxalement une perte pour les impôts. Les grandes entreprises ont des possibilités d’ajustement comptables qui leur permettent de moins payer d’impôts et peut donc favoriser les montages pour s’en détourner. On mine donc l’attractivité économique du territoire. Les investisseurs étrangers s’intéressent davantage au taux faciale de l’IS qu’à l’assiette ou aux possibilités de montage qui sont d’ailleurs réelles dans notre pays. Nous héritons donc à cause de cette mesure d’une image extrêmement pénalisante.

  • La taxe employeur de 50% sur la fraction des salaires supérieure à 1 millions d'euros

Rémy Prud’Homme : C'est ce qui reste de la fameuse taxe à 75%. Elle s'analyse comme une augmentation des charges sur les hauts salaires. Ou bien les entreprises payent, ou bien elles perdent/ne peuvent recruter de très gros calibres, ou bien elles vont s'installer à l'étranger.

  • Sur les augmentations d’impôts et de charges concernent en apparence les entreprises les plus importantes

Cela concerne notamment l'augmentation de la contribution exceptionnelle sur l'impôt sur les sociétés pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 250 millions d'euros ou encore la taxe employeur pour les très hauts revenus.

Philippe Crevel : Même impact sur l’image que la mesure précédente : impact financier marginal, et effet d’image redoutable. Le taux facial et le symbole dissuadent les investisseurs même s’ils n’envisageaient pas de salaires supérieurs à 1 million d’euros. Cette mesure, comme la précédente, entretient donc un climat défavorable à l’investissement étranger, et n’aura pas d’impact sur les entreprises déjà présentes et concernées car les grandes entreprises ont la possibilité de faire des montages financiers pour échapper à cette mesure.

  • Augmentation du taux général et du taux réduit de la TVA

Rémy Prud’Homme : Ces augmentations ne frappent pas directement les entreprises. Elles les gênent indirectement, en réduisant la demande pour leurs produits, et leur chiffre d'affaire. Mais cet impôt a la faveur des économistes car il est celui qui gêne le moins les entreprises puisque supporté par le consommateur.

Philippe Crevel : Soit les entreprises diminuent leur marge, et donc leur capacité à réinvestir, pour laisser intacte l’attractivité auprès des ménage, soit elles ne le peuvent pas. Nous sommes dans un contexte où la consommation intérieure stagne. Dans certains cas en revanche, elle impacte la rentabilité des entreprises. Les entreprises chinoises ont des taux de marge tels qu’ils peuvent encaisser de fortes augmentations des taxes. Chez nous, les marges de manœuvres ne nous permettent pas de stabiliser les prix, et les produits chinois seront donc plus avantageux auprès des ménages français.

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