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Les derniers chiffres de la croissance chinoise inquiètent.
Les derniers chiffres de la croissance chinoise inquiètent.
©Reuters

Decod'Eco

La première économie de la planète n'est pas en grande forme... et la deuxième emprunte à présent le même chemin - avec de lourdes conséquences pour certains secteurs.

Simone Wapler

Simone Wapler

Simone Wapler est rédactrice en Chef des Publications Agora (analyses et conseils financiers).

Elle est l'auteur de "Comment l'Etat va faire main basse sur votre argent: ... et ce que vous devez faire pour vous en sortir !", paru chez Ixelles Editions en mars 2013.

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Les derniers chiffres de la croissance chinoise inquiètent – à juste titre – malgré le parfait lissage statistique de la part des autorités. Souvenez-vous qu’il fut un temps où les économistes estimaient que 8% était le chiffre minimal requis pour assurer la stabilité du régime.

En Europe, le FMI prévoit un encéphalogramme plat pour deux ans et, aux Etats-Unis, ce sera moins bon que prévu. La croissance mondiale devrait se situer à 3,3% en 2013, à peine plus qu’en 2012.

Quelle véritable relation entre croissance et matières premières ?

Vous devez garder présentes à l’esprit deux choses essentielles :

  • la “croissance” n’est pas nécessairement la mesure de l’augmentation d’une activité économique créatrice de richesses et gourmande en “vraies choses” ;

  • la croissance des BRIC est la seule qui soit vraiment importante pour la demande en matières premières.

Pour le premier point, je vous rappelle que la croissance est considérée comme étant celle du PIB. Le PIB est lui-même une somme de dépenses dont une part non négligeable est financée par le déficit. C’est ce qui a conduit à l’accumulation des dettes que nous connaissons.

Donc une réduction ou une stagnation de la croissance n’est pas en soi une catastrophe pour les matières premières, s’il s’agit d’une baisse des déficits. En revanche, c’est évidemment une catastrophe pour toute l’industrie de la dette, c’est-à-dire le monde financier. L’industrie financière, peu consommatrice de matières premières, alimente la spéculation par le biais des contrats à terme.

Ceci intéresse les matières premières les plus financiarisées : pétrole, métaux de base, matières premières agricoles et métaux précieux. L’industrie financière est apte à gagner à la hausse comme à la baisse et accède à beaucoup plus d’instruments (notamment pour la baisse) que les simples particuliers que nous sommes. La “croissance” des pays riches et endettés n’alimente que la spéculation sur les matières premières mais pas la vraie demande.

Jusqu’à présent, la croissance des BRIC était réellement consommatrice de matières premières. Ces gens-là produisent des "vraies choses" et non pas que du service, et s’équipaient en infrastructures. Un optimisme mesuré pouvait permettre de penser que lentement mais sûrement, ces économies  allaient basculer d’un modèle “tout export” vers un modèle plus autonome où l’émergence d’une classe moyenne allait favoriser la consommation locale. Le réfrigérateur de madame Chang et la voiture de monsieur Chang, en quelque sorte.

Car dans les BRIC, la Chine tient une place à part, celle du plus gros consommateur de tout, le Vampire du Milieu, un véritable aspirateur à matières premières. Le surcroît de demande physique, c’est la Chine. La Chine est à l’origine de 40 % de la demande de métaux industriels, rappelait Les Echos du 16 avril qui titraient “Journée noire pour les matières premières. La Chine cale, ce qui signifie moins de surcroît de demande.

Que se passe-t-il réellement en Chine ?

Le rééquilibrage dont nous parlions, celui du tout export vers la consommation locale, ne semble pas se dérouler comme escompté. La Chine a embrassé les défauts des pays riches, la relance par la dette. Dans le cas de la Chine, il s’agit de la dette des collectivités locales.

Existe-t-il des preuves formelles de cela ? Non, car les statistiques sont de plus en plus trompeuses. Elles disent ce que les gouvernements veulent leur faire dire. Les prévisions sont revues à la baisse et nous avons vu que le terme de “croissance” était lui-même trompeur.

Pour nourrir cette hypothèse, il y a cependant un signe. Jusqu’à présent, lorsque l’or passait sous 1 600 $ l’once, des acheteurs se présentaient toujours. N’oubliez pas que le gouvernement chinois a lui-même appelé ses concitoyens à détenir de l’or. C’est pour lui un moyen de détourner les épargnants de la bulle immobilière.

En effet, les Chinois économisent (chez eux l’Etat-providence est encore au stade embryonnaire) et ils ont besoin de protéger leur épargne de l’inflation. Tout comme nous, ils se tournaient vers l’immobilier ou l’or. Mais cette fois, ce soutien a manqué. Quand l’or a craqué, ils n’étaient pas là. Cela pourrait signifier que l’inflation n’est plus une crainte pour eux (donc surcapacité productive et récession dans l’air). L’essor de la classe moyenne est freiné.

Deux autres signes favorisent cette idée : le recul de la demande de cuivre et le gonflement des stocks d’une part et l’inquiétude grandissante à propos des mauvaises dettes des collectivités locales. Elles étaient estimées à 1 200 milliards d’euros, mais elles pourraient, en réalité, s’élever à 2 500 milliards d’euros (et donc la Chine aurait une dette publique totale de 3 700 milliards d’euros).

“L’essentiel des dettes ont été contractées via des véhicules d’investissement spécialement créés pour pallier l’incapacité des collectivités à emprunter en leur nom. Pékin en a dénombré 10 000 à travers le pays, qui ont servi à financer des usines  de retraitement, des ponts ou des routes”, précise Le Figaro.

Donc, la consommation de matières premières de la Chine n’était pas sous-tendue par une saine demande, mais bien par des mauvaises dettes. Le modèle chinois se rapproche du modèle occidental : la “croissance” est essentiellement celle des créances douteuses. Mauvaise nouvelle…

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