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Une publication montrant le coronavirus sous la forme d'une bombe, sur la mairie de Séoul (Corée du Sud).
Une publication montrant le coronavirus sous la forme d'une bombe, sur la mairie de Séoul (Corée du Sud).
©Jung Yeon-je / AFP

A l’épreuve de la pandémie

Certains pays ont démontré une grande capacité à réagir avec une efficacité remarquable dans le contrôle de l’épidémie de Covid-19. Cette réactivité a permis de limiter les effets négatifs de la pandémie sur le plan économique notamment en réduisant les périodes de confinement.

Michel Fouquin

Michel Fouquin

Michel Fouquin est conseiller au Centre d'Etudes Prospectives et d'Informations Internationales (CEPII) et professeur d'économie du développement à la faculté de sciences sociales et économiques (FASSE).

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La principale raison de la bonne performance de l’Asie orientale en développement réside dans sa gestion de la crise pandémique. Alors que la pandémie a pris naissance en Chine et s’est répandue dans tous les pays proches, puis dans le monde entier, les pays d’Asie orientale ont démontré une grande capacité à réagir avec une efficacité remarquable à la fois dans le contrôle de l’épidémie elle-même et dans la mise au point (par la Chine) de vaccins semble-t-il efficaces. Cette réactivité a permis de limiter les effets négatifs de la pandémie sur le plan économique notamment en réduisant les périodes de confinement. Pour 2020 la croissance à Taiwan dépasse symboliquement, avec 3%, celle de la Chine continentale à 2.3%, celle du Vietnam atteint 2.9%. En comparaison la croissance moyenne des pays développés est négative proche de moins cinq pour cent. Les prévisions actuelles pour l’Asie orientale en 2021 sont tout aussi positives, les chiffres sont couramment supérieurs à 6%.

Sur le plan sanitaire les raisons de tels succès peuvent être résumées à deux principaux facteurs :

La très forte mobilisation des autorités sanitaires de ces pays (même s’il y a eu un retard critique au tout début de la gestion chinoise), est due au fait que l’Asie orientale avait déjà été confrontée à une épidémie similaire -le SARS originaire lui aussi venu de Chine- en 2002-2004- qui avait révélé les défaillances de leur système sanitaire et avait incité les autorités locales à se préparer au retour de telles épidémies. Alors que l’Occident qui avait été alors pratiquement épargné a mis du temps à prendre la mesure de la gravité de la situation (et quelques responsables politiques de haut niveau continuent encore d’en nier la réalité) et s’est retrouvée parfois désarmée.

Le second facteur est lié à l’acceptabilité par les populations d’Asie des contraintes extrêmes qu’on a pu leur imposer sans que ces restrictions drastiques de liberté de mouvement ne provoquent de réactions notables. Le contrôle étroit exercé sur ces populations est pour une part une donnée héritée de la guerre froide où l’opposition entre pays communistes et pays capitalistes a été d’une extrême violence et entrainait des mesures draconiennes de contrôle des populations. Aujourd’hui encore les tensions sont extrêmement vives entre ces pays, notamment entre la Chine et Taiwan, entre la Corée du Nord et la Corée du Sud et le Japon, sans parler des multiples conflits latents à propos du contrôle certaines îles de la mer de chine. On peut sans doute aussi ajouter que la tradition confucéenne, commune a beaucoup de ces pays, place l’intérêt du collectif avant les libertés individuelles. C’est d’ailleurs devenu un argument de la propagande chinoise visant à discréditer l’Occident qu’elle qualifie de décadent.

La résilience économique repose aussi pour une part sur la bonne santé financière de ces pays où les dépenses publiques sont gérées avec prudence et où les niveaux d’épargne des ménages sont traditionnellement très élevés et leur garantit des marges de manœuvre mobilisables en cas de besoin. Enfin plus inattendu il y a la résilience de leurs exportations. En particulier, dans le cas chinois, où, en dépit des mesures prises par l’administration Trump pour contrer leurs exportations, écarter certaines entreprises chinoises de la bourse de Wall Street, et exclure certaines entreprises de télécommunication du marché américain, outre l’obligation pour les Chinois d’augmenter leurs importations de produits agricoles américains, toutes ces mesures n’ont pas empêché un rebond des exportations chinoises vers le monde et vers les Etats-Unis, ni les entreprises américaines d’investir en Chine. Selon les autorités chinoises, son commerce extérieur a augmenté de 1,9% en glissement annuel pour atteindre 32160 milliards de yuans (4970 milliards de dollars) en 2020, contre 2970 milliards de yuans en 2010, tandis que ses exportations ont augmenté de 4% en glissement annuel et ses importations diminué de 0,7%. Son excédent commercial a bondi de 27,4% à 3700 milliards de yuans, selon les dernières données du commerce extérieur publiées par l'Administration générale des douanes. La Chine a joué le rôle de premier fournisseur mondial de matériels de lutte contre l’épidémie. Par ailleurs ses exportations de produits à usage domestique, dont les tablettes, les machines à faire des pâtes et autres appareils ménagers, ont été boostées par le confinement et ont augmenté de 8,5% en glissement annuel. D’une manière générale le confinement prolongé dans les pays développés a favorisé les entreprises d’Asie orientale en général qui ont repris plus vite leur activité productive et ont pu combler par leurs exportations les baisses de productions dans les pays développés.

Un des effets du conflit Chine Etats-Unis a été aussi favorable aux pays proches de la Chine comme le Vietnam, Taïwan ou la Corée qui soit se sont substitués aux fournisseurs chinois soit ont renforcé encore leurs liens avec la Chine qui leur exporte des composants qui sont ensuite réexportés vers les États-Unis. Enfin la pénurie actuelle de composants électroniques, tirée en particulier par le développement des automobiles électriques, dont les prix s’accroissent dans le monde, bénéficie en premier lieu aux pays d’Asie orientale.

L’avenir de cette partie du monde est-elle pour autant sans nuages ? En se limitant à la Chine qui joue un rôle central dans le développement de cette zone, on perçoit de nombreux problèmes en particulier l’endettement excessif d’un certain nombre de grandes entreprises. La progression des grands groupes chinois a été stupéfiante, aboutissant à la création en quelques années des plus puissants groupes industriels mondiaux dont Huawei a été l’un des exemples les plus étonnants offrant des systèmes de télécom de la 5G en avance sur ceux des leaders occidentaux. Dans domaine de la santé la Chine a été capable de produire un vaccin plus rapidement que les leaders occidentaux. Sans parler du secteur des nouveaux media tech où Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi rivalisent avec les GAFA. On peut multiplier sans fin les exemples de ce type. Loin de se limiter à être l’usine du monde la Chine vise à devenir un leader mondial dans les technologies clefs de l’avenir.

Mais cela s’est fait au profit d’un endettement massif de ces entreprises, un peu sur le modèle des Chaebols coréens qui avaient entrainé la Corée du Sud dans une crise financière majeure en 1998. La conséquence actuelle que semble en tirer la Chine en ce moment c’est la repise en main par l’État d’un certain nombre de ces entreprises. Les réserves financières de l‘État chinois lui permettront sans doute de faire face à ces difficultés, il a déjà dû dans le passé intervenir massivement pour sauver ses banques d’État insolvables. Au total, ce sont quelques 100 milliards de dollars qui ont été injectés en 2004 dans le système bancaire, à partir de l'immense fonds des réserves monétaires chinoises qui s'élevaient, à l’époque à 403 milliards de dollars. 

Cependant le rôle croissant de l’État sera-t-il à long terme compatible avec la gestion de ces groupes et cela ne leur enlèvera -t-il pas leur capacité d’adaptation rapide aux changements du monde.

Dernier souci majeur de la Chine c’est son vieillissement accéléré, conséquence de sa politique de contrôle drastique des naissances pendant plusieurs décennies, qui pourrait affaiblir durablement son dynamisme. Mais c’est encore un problème à plus long terme.

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