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Les passagers sont accueillis à bord d'un avion au départ de l'aéroport Schiphol d'Amsterdam, le 26 juin 2020.
Les passagers sont accueillis à bord d'un avion au départ de l'aéroport Schiphol d'Amsterdam, le 26 juin 2020.
©Jeffrey GROENEWEG / ANP / AFP

Impact de la pandémie

Les incidents violents ou les rixes dans les avions sont en augmentation aux Etats-Unis et relayés sur les réseaux sociaux. Ce phénomène et ces tensions à bord des avions sont l'une des nombreuses conséquences de la crise du Covid-19. Les compagnies aériennes ont-elles la capacité d'endiguer ce phénomène qui pourrait nuire au tourisme en cette période estivale ?

Velina Negovanska

Velina Negovanska

Velina Negovanska est psychologue clinicienne, docteur en psychologie et spécialisée dans le traitement des phobies et la gestion de l'anxiété. Elle est fondatrice du Centre de traitement de la peur de l'avion (www.peuravion.fr) et auteur du livre "Je n'ai plus peur de l'avion" aux éditions Dunod.

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Atlantico : Les rapports d'incidents violents ou de rixes sur les vols aux Etats-Unis sont en augmentation. Comment expliquer ce phénomène ? Des situations similaires pourraient-elles se produire en Europe ?

Velina Negovanska : Pour certaines personnes, prendre l'avion a toujours représenté un événement marquant : peur d'être en retard, procédures aéroportuaires invasives, sans oublier ceux qui souffrent de la peur de l'avion et utilisent parfois de l'alcool ou des médicaments... Dans ces conditions de stress et de désinhibition dûs à l'alcool, des passagers ne supportant pas la contrainte peuvent devenir plus violents.
D'autre part, l'obligation du port du masque n'est pas acceptée de la même manière dans tous les pays et de nombreuses personnes ont du mal à respecter les exigences imposées.
Ce dernier point est le plus important, puisque sur les 3100 cas de passagers violents répertoriés par l'agence de sécurité aérienne américaine cette année, 2350 sont liés à un refus de port du masque qui dégénère en dispute en vol.
Même si une hausse pourrait être observée en Europe, elle ne sera donc probablement pas de la même importance qu'aux USA où le respect des gestes barrières n'est pas aussi largement accepté, avec un refus du port du masque qui a largement été repris dans les médias.

Certains avancent que la crise du Covid-19 pourrait avoir renforcé ces phénomènes. Qu'est-ce qui dans cette pandémie peut expliquer des comportements plus agressifs en avion ? Est-ce une forme de « cadeau empoisonné » de la crise du Covid-19 et du lourd impact psychologique chez certaines personnes et chez les voyageurs ?

La crise sanitaire est en grande partie liée à la hausse de ces violences, le port du masque n'en est qu'une composante. Il y a en réalité une accumulation de nouveaux facteurs qui se renforcent les uns les autres :

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Cette technique pour acheter des billets d’avions moins chers qui fait enrager les compagnies aériennes
- l'anxiété générale dans toute la population a énormément augmenté à cause de la crise et des conditions de vie subies, avec par exemple 27% de la population qui présente désormais des troubles anxieux d'après la dernière enquête de Santé Publique France, soit un doublement par rapport à la situation avant-crise (source),
- les procédures d'embarquement se retrouvent également considérablement rallongées par le COVID avec parfois plus de 3 heures d'attente, et même jusqu'à 7 heures prédites par l'association des compagnies aériennes si le volume de trafic aérien reprenait comme avant la crise tout en maintenant ces mêmes règles.
Mais la violence en avion s'accroissait déjà régulièrement depuis des années, probablement avec l'évolution du transport aérien dans lequel le vol low cost devient petit à petit la norme : sentiment de devoir se dépêcher, augmentation de la promiscuité avec des sièges toujours plus serrés, disparition des collations à bord... Or l'inconfort, la faim ou le stress sont autant de facteurs conduisant à la colère et dans un moment de difficultés psychologiques suite à la crise du Covid il n'est pas étonnant qu'elle s'exprime plus !

Que peuvent faire les compagnies aériennes pour calmer les passagers les plus anxieux et ceux susceptibles d'avoir des explosions de colère ?

Une bonne prise en charge des passagers ayant peur de l'avion réduirait drastiquement les cas de violence, tout comme l'amélioration du confort global en vol. Mais l'application de ces suggestions paraît peu probable. Certaines petites pratiques peuvent être évitées : on a par exemple remarqué que le fait de faire passer les passagers de la classe économique par la porte avant de l'avion augmente leur agressivité : en passant devant les classes business leur niveau de frustration augmente, tout comme la violence à bord.

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Les hôtesses et stewards pourraient également être mieux formés à la gestion du stress, si on leur apprend en amont des méthodes de gestion du stress pour les passagers stressés, comme la cohérence cardiaque par exemple.
Les compagnies aériennes commencent également à s'organiser pour mettre en place des "no-fly list", qui consistent à répertorier les passagers violents pour leur interdire de prendre l'avion, une bonne solution mais qui arrive une fois que les violences ont déjà eu lieu.
Certaines autres mesures plus ponctuelles sont également observées en ce moment, et des compagnies comme Southwest ou American Airlines ne servent par exemple plus d'alcool à bord de leurs avions pour faire face au pic de violence observé (source).

Peut-on s'attendre à ce que les conséquences de la crise Covid aient des effets de moyen-long terme sur les passagers d'avion ?

L'avion n'est qu'un amplificateur des tendances de la société : et la société en ce moment est mise en grande épreuve suite à la crise du Covid : des nombreuses personnes sont à bout ou stressées, d'autres craignent la perte de leur emploi ou ont vécu des difficultés durant toute cette année. La prise en compte de ces facteurs par les compagnies aériennes et la formation du personnel navigant aux techniques de gestion du stress seraient un point important afin d'éviter que les avions soient obligés de se poser pour déposer des passagers turbulents.

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