Entre confiance et défiance, Manuel Valls entame son slalom pour éviter les mines de sa majorité<!-- --> | Atlantico.fr
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Manuel Valls.
Manuel Valls.
©Reuters

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Malgré la large confiance accordée au Premier ministre par les députés de gauche, rien n’est acquis pour Manuel Valls, qui devra faire face au scepticisme d’une grande partie de ses propres troupes.

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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Sur le papier, le vote de confiance au gouvernement de Manuel Valls a plutôt belle allure et le discours a de quoi séduire. Le nouveau locataire de Matignon a obtenu 306 voix, quatre de plus que son prédécesseur dans le même exercice, au lendemain de la victoire de la gauche aux législatives en 2012. Mais rien n’est acquis pour autant pour Manuel Valls, car cette large confiance accordée au Premier ministre par les députés de gauche est très atténuée, marquée qu’elle est par le scepticisme d’une grande partie de ses propres troupes, voire entachée par l’abstention assumée de 10 députés socialistes. On pourra toujours objecter que 10 voix, cela ne représente qu’une petite partie de la liste de 90 signataires d’une motion réclamant un changement de cap politique et qu’il setrouve parmi eux des suppléants de ministres qui ne vont bientôt plus siéger sur les bancs de l’Assemblée parce que les titulaires ( écartés du gouvernement ) vont y revenir. Il n’empêche : s’abstenir dans le  scrutin fondateur qu’est le vote de confiance alors qu’on appartient au même parti que le Premier ministre nouvellement nommé, c’est pour le moins inédit, voire choquant sous la 5e République. C’est en tout cas un signe qui montre que le PS est plus que jamais divisé, entre les tenants d’une politique sociale libérale faite de réformes de structures fortes (en l’occurrence la suppression des départements et la réduction du nombre de régions) assortie de mesures en faveur des plus modestes (tendance  encore majoritaires pour l’instant), et ceux qui refusent la politique d’austérité qui résulte de la réduction des déficits (ou plutôt de la tentative d’y parvenir). Concrètement, cela se traduit par une opposition entre partisans et adversaires du fameux pacte de responsabilité de François Hollande. Le Premier ministre, qui l’a bien compris, affiche une volonté de dialogue permanent avec le Parlement, opposition incluse. La méthode Rocard adaptée à la crise sous François Hollande. La méthode Rocard adaptée à la crise. En clair, pour parvenir à ses fins, il devra constamment "godiller" entre ces deux tendances.

Car les députés socialistes qui ont fini par mettre leur bulletin "oui" dans l’urne en invoquant le devoir de raison, la "solidarité dans une démarche collective" et qui mettent en avant leur souci de "ne pas provoquer une crise institutionnelle" dixit le député de la Nièvre Christian Paul, ne vont pas rester inertes. Ils ont d’ores et déjà prévenu qu’ils "n’accepteront jamais une réduction des services publics pour financer des entreprises" et qu’ils feront preuve "d’une vigilance permanente" à l’égard du gouvernement, mais surtout qu’ils entendent bien amender le futur pacte de solidarité. On en est tellement conscient "en haut lieu" que l’on cherche précisément à gagner du temps et à éviter un vote sur le pacte de solidarité, qui deviendrait un simple accord entre les partenaires sociaux et le patronat. Quant aux mesures pratiques, elles prendraient simplement la forme d’un budget rectificatif, car il faudra bien entériner les réductions de charges pour les entreprises et les suppressions de cotisations pour les bas salaires qui vont dans un premier temps creuser les déficits. Une démarche osée qui permettrait cependant au gouvernement d’éviter les palabres et de raviver la rancœur de la défaite aux municipales dans cette caisse de résonance qu’est le parlement. C’est que depuis la débâcle du PS aux municipales, des verrous ont sauté, la parole s’est libérée dans les rangs des parlementaires qui enragent de ne pas avoir été entendus lorsqu’ils tentaient d’alerter l’Elysée et Matignon à propos du mécontentement, voire de la colère de leurs électeurs et dont on a vu la traduction dans les urnes. Les députés socialistes n’ont jamais été des godillots. Aujourd’hui, ils craignent non seulement pour leur avenir mais aussi pour celui du PS, qui s’est littéralement écroulé dans certains départements et les plus remontés s’en prennent ouvertement à François Hollande, qu’ils accusent de "les avoir menés dans le mur". Voilà pourquoi il suffirait d’une étincelle ou d’une maladresse pour que la maigre confiance accordée au nouveau gouvernement se transforme en défiance et donc en crise majeure. A l’UMP, on l’a bien compris et on exclut toute bienveillance à l’égard de Manuel Valls, qui reprend pourtant certaines des propositions de Jean-François Copé. C’est dire que Manuel Valls aura besoin de toute la fougue et l’énergie que ses portraitistes dépeignent pour surmonter la crise et tenter de faire bouger les lignes en France !

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