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Crise politique belge :
et si la France intervenait ?
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Démission Elio di Rupo

Le formateur belge Elio di Rupo a remis sa démission au Roi lundi. Celui qui devait constituer le prochain gouvernement fédéral du pays laisse ainsi le pays dans l'expectative. Né en Belgique, Eric Verhaeghe en appelle à la France, patrie originelle des Flamands.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Le formateur Élio di Rupo a démissionné... Cette information totalement mystérieuse pour les Français marque probablement une étape majeure dans la lente agonie de la Belgique. Elle marque probablement la décision prise par le malade de passer des soins palliatifs au suicide thérapeutique.

Depuis le mois de juillet 2011, le leader socialiste wallon tentait de mettre sur pied un gouvernement de coalition sans le premier parti du pays, la fameuse NV-A flamande, visage moderne de l’extrême droite nationaliste. Cette procédure, qui est totalement baroque, ne manque jamais d’étonner. Elle consiste officiellement à informer le Roi sur les possibles fondements d’une coalition gouvernementale.

En cinq mois de tractations de couloir, Elio di Rupo n’a ménagé ni son temps ni sa peine pour n’aboutir à rien. Un luxe que peu de pays peuvent s’offrir en pleine crise de l’euro. On imagine mal en France ce que ce luxe signifie. Fin octobre, les partis concernés entamaient à peine les discussions sur les contours d’un possible budget 2012. Autrement dit, à la mi-novembre, les Belges en sont au stade de la procédure budgétaire où les Français se trouvent d’habitude... au mois de juin. Certes la nouvelle mode qui consiste à greffer dans le sol budgétaire un nouveau plan de rigueur tous les 4 mois rend obsolète notre bel ordonnancement administratif. Il n’en reste pas moins qu’entamer le mois de décembre sans avoir la moindre idée du budget de l’année peut sembler légèrement surprenant.

Cette démission peut paraître une simple péripétie dans le lent glissement de la Belgique vers le néant. Pourtant, elle marque une étape nouvelle.

Quand la Belgique retourne en enfance

Jusqu’en juillet 2011, les tractations des partis belges avaient inclus la NV-A dont le régionalisme flamand était une bonne raison de ne pas aboutir. La personnalité de son leader Bart de Wever expliquait largement les rebondissements incessants, à l’italienne, de la comédie que les négociateurs jouaient. Face à l’entêtement de Bart, l’ineffable Albert II, Roi des Belges (une profession durement frappée par la crise !), avait innové en demandant à un francophone de chercher à bâtir une coalition. Confier la constitution d’un gouvernement national à un Wallon, descendant de l’immigration italienne très forte en Belgique, socialiste et connu pour son homosexualité, alors que l’extrême droite nationaliste flamande est devenue la principale force du pays ne manquait pas de piquant.

Les Belges eux-mêmes ont-ils cru à ce scénario improbable? L’histoire nous dira peut-être si le principal intéressé, Elio lui-même, a pu y croire. Car, pour finir de compliquer son entreprise, il a mis autour de la table les seuls partis traditionnels, ceux de l’antique verzuiling (mal traduite par la pillarisation) belge: socialistes, sociaux-chrétiens et libéraux.

Jusqu’aux années 1980, ces trois forces avaient le monopole de fait, ou presque, de l’espace politique, et structuraient la vie sociale. En excluant de la table nationaliste et écologiste, en se recentrant sur les ingrédients de la Belgique d’avant le fédéralisme, Elio nous faisait sa madeleine de Proust. Il niait les partis apparus depuis la fin de son adolescence, il revenait aux bonnes combinaisons qui rendait la vie politique belge si attendue, si théâtrale.

Sa démission conclut brutalement cet acte de cinq mois qui a probablement permis à beaucoup de Belges de rêver de leur enfance, mais n’a pas sorti le pays de l’ornière politique où il se trouve depuis un an et demi.

Et maintenant ? Quel avenir pour le pays ?

Quel est l’épisode suivant, maintenant que les partis traditionnels ont démontré que, même sans les nationalistes flamands, gouverner ensemble la Belgique n’était pas possible?

On se demanderait volontiers quel est le plan B. Mais Elio vient de mettre un terme au plan Z, et recommencer l’alphabet paraît difficile en pleine tourmente financière. En réalité, c’est probablement l’ultime confiance dans une possible Belgique qui vient de s’évanouir. Cette création grotesque du Congrès de Vienne, en 1815, qui a consisté à démembrer une partie du territoire naturel de la France pour protéger le territoire allemand d’une invasion militaire, manifeste haut et fort son désir de ne plus subsister. Il est donc difficile d’imaginer une solution à la crise qui vienne de la Belgique elle-même.

De façon extravagante, et symptomatique de notre déclin, la France, qui est la patrie originelle des Flamands (le comté de Flandre est l’un des plus anciens fiefs de la couronne de France), et la patrie de cœur des Wallons, n’a manifestement pas de vision claire sur ce qu’il faut faire. Pourtant, rien ne justifie que la France ne fasse pas à son tour sa réunification. Après tout, les raisons de démembrer notre territoire historique sont bien loin maintenant. Napoléon est mort, et la Flandre est riche.

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