Effet domino : comment la crise de la zone euro pousse l’Asie à se réformer (elle aussi) pour retrouver sa croissance<!-- --> | Atlantico.fr
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Après le plan de sauvetage espagnol, les marchés asiatiques ont semblé rassurés mais ont clôturé en baisse le lendemain.
Après le plan de sauvetage espagnol, les marchés asiatiques ont semblé rassurés mais ont clôturé en baisse le lendemain.
©Flickr/JasonLangheine

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La tâche ne sera pas facile pour la Chine et l'Inde, elles-même commençant à être concurrencées par leurs propres voisins.

Edgardo Torija-Zane

Edgardo Torija-Zane

Edgardo Torija Zane est économiste spécialisé dans l'Asie émergente chez Natixis depuis 2008. Il a été consultant dans des organismes internationaux (Agence Française de Développement, CEPAL- Nations Unis).

Il enseigne l’économie internationale à l’Ecole Normale Supérieure (Lyon) et à l’Université de Versailles Saint Quintin en Yvelines.

 
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Atlantico : Après le plan de sauvetage espagnol, les marchés asiatiques ont semblé rassurés mais ont clôturé en baisse le lendemain. Pourquoi un tel changement ?

Edgardo Torija-Zane : Il est difficile de se prononcer sur les mouvements à court terme de la bourse. Mais de manière générale, la tendance des marchés financiers asiatiques est plutôt négative depuis fin février. Deux facteurs principaux ont joué : la dégradation de la conjoncture mondiale et les mauvaises nouvelles de Chine émanant du ralentissement dans le secteur industriel, tout indicateur statistique confondu.

La structure productive des pays asiatiques est encore trop tournée vers la demande extérieure, principalement à destination des Etats-Unis, de l’Europe et du Japon. Le ralentissement dans ces trois zones débouche donc sur des inquiétudes quant à l’activité future des pays émergents.

Les économies asiatiques sont-ils victimes d’un effet domino en provenance d’Europe ?

Effectivement. A l’inverse de la crise de 1997, il ne s’agit pas d’une crise intrinsèquement asiatique. A l’époque, il y avait une crise de surendettement et de régime de change – fixe ou quasi fixe – qui était alors incompatible avec la croissance forte qui avait succédé à la libéralisation financière.

Depuis une dizaine d'années, la croissance économique de ces pays s’accompagne d’un important excédent extérieur. Ils accumulent donc des avoirs extérieurs, surtout des réserves de change, tout en ayant des déficits budgétaires relativement faibles.

Ce canal financier pose aujourd'hui problème aux pays ayant besoin des capitaux étrangers pour financer leurs croissances (du fait de la baisse des exportations à destination de l'Europe et des Etats-Unis, ndlr). L’Inde étant dans cette situation, elle sera contrainte de s’ajuster en diminuant ses importations.

Ainsi, l’adoption de politiques contra cycliques (en faveur de la relance, ndlr) risque de ne pas suffire s’ils ne parviennent pas à se substituer à la demande extérieure. Leur dépendance aux pays européens et nord-américains devient problématique.  Ils doivent désormais réorienter leurs systèmes productifs en les adaptant à la demande intérieure. Mais cela prendra du temps.

Outre cet « effet domino », quels facteurs intrinsèques aux deux géants asiatiques ont conduit à ce ralentissement ? Vont-ils devoir se réformer ?

La Chine ne dispose pas de système de protection sociale très développé. Le taux d’épargne est par conséquent très élevé ce qui pénalise la consommation comme moteur de croissance et maintien la dépendance du pays à la demande des européens et américains. L’Etat chinois va donc devoir se réformer. Sans changement, elle risque aussi de passer à un régime de croissance plus faible du fait d’une hausse des coûts salariaux et d’investissements plus faibles dans les industries bas de gamme.

L’Inde a pour sa part connu un ralentissement notable suite à l’augmentation brutale des taux d’intérêt de la banque centrale en 2010 et 2011. Mais plus généralement, le pays fait face à des problèmes structurels : la croissance est encore trop localisée aux grandes villes et dans le secteur des services au détriment des manufactures ou du secteur agricole qui ont stagné. Ainsi, l’augmentation de la demande dans les villes a provoqué une inflation alimentaire « structurelle » et une hausse des inégalités. Il a été très difficile de maintenir une croissance durable de façon harmonieuse.

Ces pays vont donc devoir mener des réformes afin d’instaurer des systèmes de protection sociale ou encore des hausses de salaires pour soutenir la demande intérieure. Mais la tâche ne leur sera pas facile puisqu’ils commencent à être eux-mêmes concurrencés par leurs voisins : le Vietnam, le Laos, la Birmanie où les coûts du travail y sont plus faibles.

 Propos recueillis par Olivier Harmant

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