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Les drapeaux européens flottent en berne au siège de l'UE à Bruxelles le 9 septembre 2022.
Les drapeaux européens flottent en berne au siège de l'UE à Bruxelles le 9 septembre 2022.
©JOHN THYSAFP

Corruption à Bruxelles

Le scandale des fonds apparemment versés à certains parlementaires européens pour influencer leur vote met en lumière la question de la corruption à Bruxelles. Mais aussi un défi beaucoup plus politique avec une Europe ciblée comme « ventre mou » de l’Occident.

Jean-Pierre Marongiu

Jean-Pierre Marongiu

Jean-Pierre Marongiu est écrivain, conférencier, ingénieur, expert en Management et Directeur général et fondateur du thinktank GRES : Groupe de Réflexions sur les Enjeux Sociétaux.Perpetuel voyageur professionnel, il a parcouru la planète avant de devenir entrepreneur au Qatar où il a été injustement emprisonné près de 6 ans, sans procès. Il a publié plusieurs romans et témoignages dont : Le Châtiment des Elites, Qaptif, InQarcéré, Même à terre, restez debout ! Aujourd'hui conférencier et analyste societal, il met son expérience géopolitique au service d'une approche libérale-souverainiste de la démocratie.

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Rodrigo Ballester

Rodrigo Ballester

Rodrigo Ballester dirige le Centre d’Etudes Européennes du Mathias Corvinus Collegium (MCC) à Budapest. Ancien fonctionnaire européen issu du Collège d’Europe, il a notamment été membre de cabinet du Commissaire à l’Éducation et à la Culture de 2014 à 2019. Il a enseigné à Sciences-Po Paris (Campus de Dijon) de 2008 à 2022. Twitter : @rodballester 



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Atlantico : Le scandale des fonds apparemment versés à certains parlementaires européens pour influencer leur vote met en lumière la question de la corruption à Bruxelles. Mais aussi un défi beaucoup plus politique avec une Europe ciblée comme « ventre mou » de l’Occident. De quoi ce Qatargate est-il le nom ?

Jean-Pierre Marongiu : Le Qatargate est la partie émergente du grand djihad. Même s’il éclate  au grand jour aujourd'hui pour certains médias. Il prend sa source dans les années 2000 avec la restructuration des Frères musulmans.  En 2010 à Doha, alors que le Qatar venait de jouir de la pleine possession de ses ressources jusqu'alors gérées par la France et les USA, et devenait le pays le plus riche du monde, une scission s'opérait parmi les Frères musulmans. Une tendance plus moderne prenait le pouvoir sous l'impulsion d'un idéologue Sultan Jassim. À l'hôtel Hilton de Doha une conférence en présence de nombreux chefs religieux, l'invasion de l'Europe était décrétée.

Le nouveau grand Djihad était expliqué dans ses moindres détails. D'abord la corruption de masse des organes intermédiaires en France et en Angleterre. Une corruption tous azimuts permettant d’infiltrer les institutions. Le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy fut le point d'orgue et le seuil de non-retour du grand djihad. Le ballet incessant des allées et venues de tout ce que la France compte comme sénateurs, députés, ministres, homme d'affaires et intermédiaires interlopes débuta.  Le financement de mosquées  salafistes, d'associations de toutes natures et enfin la stratégie des milles entailles.

Rodrigo BallesterC’est tout d’abord le nom d’un scandale sans précédent dans la bulle européenne. Il s’agit tout de même d’une vice-Présidente du Parlement Européen arrêtée par les autorités belges et qui auraient des centaines de millers d’euros dans des valises, excusez du peu !  C’est également le nom d’un Parlement européen imbu de lui-même, donneur de leçons jusqu’à la satiété, qui se perçoit en autorité morale continentale, voire planétaire, ivre de signallement vertueux, qui chute brutalement du piédestal sur lequel il s’est lui-même issé. Et c’est finalement le nom d’une bulle européenne de plus en plus éprise d’idéologies politiquement correctes, extrêmement réceptive à la « société civile » qu’elle confond volontiers avec les citoyens européens, vulnérable mais droite dans ses bottes dogmatiques et très influençable.  Dans le cas d’espèce, il s’agit d’une cas de corruption gravissime et, heureusement, rare. Mais le vrai problème, c’est justement cet écosystème qui permet l’entrisme de lobbies de tout poils et, pire, d’idéologies extrêmement dangereuses.

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La vice-présidente grecque du parlement, Eva Kailli, avait déclaré à propos du Qatar. “Nous n’avons pas le droit de donner des leçons de morale pour obtenir de l’attention médiatique de bas étage ». À quel point cette déclaration s’inscrit-elle dans une stratégie de culpabilisation et de relativisme que l’on retrouve chez les islamistes ? En avons-nous d’autres exemples ?

Jean-Pierre Marongiu : Parmi les armes de la stratégie d’Islamisation de l’occident des Frères musulmans, la place donnée au soft Power, à savoir celle des réseaux d’influences médiatiques est la plus importante et surtout la plus couteuse. La création d’Al Jazeera puis d’AJ+, la prise de participation dans une kyrielle d’organes de presse, de site internet, de blogs, la mise en place d’une cellule réseaux sociaux diffusant jour et nuit des informations à la gloire de l’islam radical permet aux acteurs du grand djihad de répandre l’idée d’une islamophobie occidentale. En se servant des failles des démocraties à leur profit. Très vite la Turquie et autres pays tels que les plus radicaux du monde arabe ont rejoint les animateurs du soft Power islamistes. Financièrement d’une puissance inouïe, rien ne résiste à cette offensive secrète. Les députés européens sont désormais les cibles privilégiées du Qatar et de la Turquie, puisque la constitution européenne prend désormais le pas sur les états souverains, qui voient leurs pouvoirs législatifs soumis aux décisions des Commissions européennes. Pour exemple, le Qatar en France influe directement ou indirectement sur 75 % des médias français. Eva Kaili n’est qu’un micro phénomène de l’entrisme de l’islam radical , les campagnes de communication de la communauté européenne , montrant des femmes voilées comme modèle de liberté et de féminité, les décisions d’annuler les mesures juridiques prises à l’encontre des nations condamnant le radicalisme islamiste sous prétexte d’islamophobie participe aux techniques de culpabilisation d’une opinion publique soumise à l’influence wokiste venue d’outre atlantique. 

Rodrigo Ballester : Ces déclarations sont  très probablement l’écho des pétro-dollars dont cette députée se serait  (présomption d’innocence) rempli les poches . Elles ne valent rien, elle n’en croit pas un traître mot, elle ne fait probablement que ressasser des éléments de language d’un consultant grassement payé par Doha. Personnellement, je pense que l’Occident en général, y compris l’UE, cherchent trop souvent à imposer un catalogue de valeurs qu’ils considèrent comme universelles alors que les autres n’y voient que de l’impérialisme culturel. Mais ce n’est pas la question ! Le problème,  c’est d’invoquer ce relativisme dans les propres sociétés européennes afin de donner un alibi à des idéologies contraires aux lois et aux moeurs de nos pays. Voilà toute la perversité du culte de la « diversité » et de « l’inclusion » qui sont devenus des vecteurs d’atomisation sociale et des instruments de chantage émotionnel. Une aubaine « intersectionnelle »  dont se servent allègrement  lobbies et groupe de pression pour imposer des points de vue, obtenir des privilèges et saper le dénominateur commun indispensable à toute société.

D’autres exemples ? On ne compte plus les résolutions du Parlement Européen qui reprennent mot pour mot tous les mantras woke dont l’incohérence à un seul point de chute : la haine de soi-même, de tout ce que la culture occidentale est le nom. L’example le plus frappant ? La désormais célèbre et scandaleuse campagne du Conseil de l’Europe (financée par la Commission) faisant la promotion du « hijab heureux » au nom de la diversité et dont un des slogans est « que le monde serait ennuyeux sans diversité – la liberté est dans le hijab ». Plus inquiétant à mes yeux, le Plan d’Action contre le racisme 2020-2025 de la Commission européenne de novembre 2020 qui est un monument à la « critical race theory », cette idéologie délétère qui fait des ravages aux Etats Unis. Que la Commission assume allègrement que « le racisme est souvent profondément ancré dans l’histoire de nos sociétés et étroitement lié à ses normes et à ses racines culturelles » nous donne une idée précise et glaçante de l’entrisme de certaines idéologies.

Au passage, n’oublions de souligner l’immense cynisme du Qatar quand il s’offusque de l’impérialisme culture de l’Occident alors qu’il a investi des milliards pour radicaliser les populations musulmanes d’Europe et propager l’idéologie frériste.

Comment cela se cumule-t-il avec une stratégie de corruption, en termes financiers, auprès d’élus, notamment dans les institutions européennes ?

Jean-Pierre Marongiu : Dans les réponses précédentes, je décris une grande partie du système de corruption de masse menée par le Qatar, la Turquie et leurs alliés. La prise de pouvoir de certains partis politiques tels que ceux d’ultra gauche ou de mouvements prétendument écologistes ou féministes largement subventionnés par des fonds occultes permet une présence efficace au sein du parlement européen.

Rodrigo Ballester :  Le talent des « agents corrupteurs » est de brouiller les lignes et d’avancer lentement, à petit feu jusqu’à ce que la personne visée se convertisse en « agent d’influence ». La corruption et le trafic d’influence, en général, ne sont pas aussi grotesques et rocambolesques que le cas Kailli, et c’est justement une partie du problème. Dîner, voyages pour assister à une conférence, nuits d’hôtels, donations pour des projets concrets dans une circonsciption, autant de « gestes » qui permettent de séduire et d’ amadouer des élus qui deviennent des relais d’influence parfois même sans s’en rendre compte. Un exemple concret de séduction institutionnelle, l’initiative éducative Wise de la Qatar Foundation qui organise prix, sommets et projets éducatifs selon les codes et la novlangue pédagogiques les plus « glamour ». Cela pourrait être la Fondation Gates, mais non, c’est le Qatar rigoriste qui se gargarise d’égalité, d’inclusion et de nouvelles technologies! Est-ce de la corruption en soi ? Non. Est-ce l’antichambre de l’influence qui peut mener à la corruption? Sans aucun doute. 

À quel point l’entrisme islamiste est-il fort dans les institutions européennes. À quelles occasions s’est-il manifesté ? Quelles actions concrètes ont été menées ?

Jean-Pierre Marongiu : Là encore, m’étant longuement étendu sur la stratégie des Frères musulmans dans mes réponses précédentes , la réponse est évidente. Les bureaux des députés européens ne désemplissent pas de lobbyistes de toutes parts . Plus de 13 000 entités exercent leur lobbying auprès de la Commission européenne. Environ 3 500 d’entre elles sont des ONG financées par les Frères musulmans.

Les Frères musulmans en Europe agissent dans le cadre juridique et politique de leurs pays d’accueil. Ils ont compris que l’interaction avec les institutions européennes est l’une des tactiques les plus importantes pour étendre leur influence. Les Frères musulmans et leurs sous-institutions se sont donné pour priorité de devenir les représentants légaux ou effectifs des communautés musulmanes et ainsi d’être perçus par les institutions européennes comme des « gardiens » de ces groupes. En nouant de telles relations, les islamistes, les Frères musulmans cherchent à avoir par le biais des gouvernements européens la gestion de tous les aspects de la vie musulmane.

Il semble qu’aujourd’hui, les politiques de mondialisation de l’ultralibéralisme occidental ne soient plus en mesure d’endiguer la vague islamiste. La pantalonnade de la manifestation contre l’islamophobie à Paris à laquelle participaient LFI, les mouvements écologistes, LGBT et féministes aux cris d’Allah Akbar , des drapeaux palestiniens ouvrant la marche en plein Paris est aveu criant de renoncement , de déni et d’aveuglement des instances politiques françaises et européennes fagotés par leur corruption .

Le Programme pour l'inclusion et la lutte contre les discriminations du Conseil de l'Europe proposait des portraits de plusieurs jeunes femmes, voilées sur une seule moitié de l'image. La  campagne de communication célébrant la diversité et "la liberté dans le hijab", lancé par le Conseil de l'Europe n’est que l’un des multiples exemples de l’influence de l’islam le plus radical dans les milieux progressistes pétris de bonnes intentions, mais néanmoins suicidaires.

Rodrigo Ballester : Malheureusement, on ne les compte plus. LE 21 septembre dernier, Irache García Pérez, présidente des socialistes européens (auquel appartient Eva Kailli) recevait en grande pompe les représentants de FEMYSO, le visage officiel de la jeunesse frériste, au Parlement Européen, vous en aviez parlé dans votre journal. Cette organisation est également reçue avec révérence par l’Agence Européenne des Droits Fondamentaux située à Vienne. La communication des institutions semble totalement contaminé des codes fréristes, que ce soit de la petite fille voilée pour parler de recherche européenne à la glorification explicite du hijab dans des campagnes de communication. Finalement, au niveau de la « société civile » impossible de ne pas citer ENAR, le « European Network against Racism » , une des vaches sacrées de la « société civile » européenne, dirigé pendant des années par Michael Privot, un ancien Frères Musulman belge que j’avais moi-même reçu à l’époque quand je travaillais au cabinet du Commissaire à l’éducation et et dont je me demande si le qualificatif « d’ancien » est vraiment réel.  ENAR est largement et généreusement financé par la Commission (la Commissaire maltaise Dalli, la principale représentante du wokisme au Collège des Commissaires s’affiche régulièrement avec eux) et ils sont un des fers de lance, l’un des plus virulents,  contre les initiatives du Président Macron visant le séparatisme islamiste.  Sans parler du Collectif contre l’Islamophobie en Europe, succursale belge (et européenne) du CCIF dissout en France, et qui est choisi par l’association des journalistes européens pour les former les sensibiliser à l’islamophobie. Voilà pour un échantillon très sommaire.

Quelle est l’étendue de l’entrisme en Europe ? Avec quels résultats tangibles ?

Jean-Pierre Marongiu : Les municipalités européennes, les territoires entiercements islamisés en France , en Belgique en Allemagne  sont verrouillées par une idéologie ayant cédé les clefs de la grange aux loups.

La deuxième phase de la stratégie de l’idéologue Sultan Jassim est désormais de répandre la terreur au quotidien.  Les assassinats , les décapitations, les viols poussent les populations occidentales autochtones à la peur, à l’isolement ou au départ. Profitant de l’inertie de politiciens aveugles, naïfs ou corrompus, l’Europe bascule dans un changement de culture et de civilisation sans réellement prendre la mesure du danger. La troisième  et dernière étape sera l'élection de dirigeants frustes à la tête des municipalités , des régions , des instances européennes. Une colonisation de l'intérieur.

Rodrigo Ballester : Il faut surtout comprendre que l’entrisme de l’Islam radical s’effectue à travers le cheval de Troie de l’intersectionnalité et autres délires wokes. Voilà le véhicule que les organisations islamistes exploitent habilement (parfois en connivence avec des minorités qu’elles détestent, comme les minorités sexuelles, ce qui est stupéfiant) afin de s’imposer. Force est de constater que le wokisme a pris ses quartiers à Bruxelles et à Strasbourg et que sous couvert de ses maîtres-mots « inclusion » et « diversité », et même au nom des valeurs européennes de l’Article 2 (surtout la non-discrimination) ont imprégné toute la machine, surtout au Parlement et à la Commission. La méfiance de Bruxelles par rapport à la laïcitéà la française et la tolérance pour le communautaurisme « multi-culti » en sont le parfait exemple.

Permettez-moi d’émettre une hypothèse concernant les fonds européens. Le règlement européen sur les « dispositions communes » à plusieurs fonds européen prévoit que « Les États membres et la Commission prennent les mesures appropriées pour prévenir toute discrimination fondée sur le sexe, l’origine raciale ou ethnique, la religion ou les convictions, le handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle lors de l’élaboration, de la mise en œuvre, du suivi et de l’évaluation des programmes […] ». En considérant le concept de « non-discrimination » qui prévaut dans à Bruxelles, une telle formulation de favoriserait-elle pas l’accès à ces fonds de certaines organisations ? Pire, ces fonds pourraient-ils être utilisés par la France pour promouvoir la laïcité ? A voir, mais le risque de politisation du budget européen, un vrai sujet qui divise l’Europe sur fond de conditionnalité, pourrait peut-être, un jour, être utilisé à très mauvais escient.

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