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Défilé militaire : les moyens d'aujourd'hui seront-ils adaptés aux guerres de demain ?
©REUTERS/Benoit Tessier

Nouveau visage

Les armées "traditionnelles" paradent ce 14 juillet sur les Champs-Elysées, mais la réalité de la guerre du futur pourrait ne pas ressembler à ce que nous imaginons d'un conflit.

Bruno Tertrais

Bruno Tertrais

Directeur-adjoint à la Fondation pour la Recherche Stratégique (FRS).

Spécialiste des questions stratégiques

Dernier ouvrage paru : La revanche de l'Histoire, aux Editions Odile Jacob

 

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Atlantico : A quoi la guerre du XXI siècle ressemblera-t-elle ? Est-on en mesure d'établir une typologie des conflits du futur ?

Burno Tertrais : En partie à celle du XXème… On peut encore avoir de grandes batailles aéroterrestres, par exemple entre l’Inde et le Pakistan. Mais on aura sans doute une grande diversité d’affrontements : guerres civiles menées avec des moyens rudimentaires – la grande majorité des conflits aujourd’hui ; conflits de haute intensité technologique menés dans les cinq dimensions (terre, air, mer, espace, cyberespace) ; conflits opposant des États à des quasi-Etats bien armés tels que le Hezbollah…

Deux tendances lourdes en tout cas : l’action à distance, via les missiles, les drones, et les ordinateurs ; et des forces plus efficaces, plus coûteuses, moins nombreuses.  

Quel rôle les armées de terre ont-elles encore à jouer ? Faut-il voir dans l'intervention française au Mali la preuve que des guerres conventionnelles peuvent encore avoir lieu ?

Les armées de terre gardent un rôle central sur l’espace eurasiatique, où l’on trouve encore des « armées de masse ». Et pour tous les pays, l’action au sol reste absolument irremplaçable, que ce soit directement ou via des alliés locaux (cf. Kosovo, Libye, etc.). Sans oublier le rôle croissant des forces spéciales au sol!

Ce qu’on verra sans doute moins, en tout cas pour un temps, ce sont des gros volumes de forces terrestres occidentales stationnés longtemps dans un pays lointain, même avec un mandat international. Par ailleurs, les guerres inter-étatiques classiques sont devenues très rares.   

Les exercices de combats aériens qui ont lieu en ce moment en Norvège dans le cadre de l'OTAN, et qui rassemblent en tout 80 avions de chasse, ont-il encore une raison d'être ? Étant donné que les pilotes eux-mêmes reconnaissent qu'ils ne retrouvent pas de telles situations de combat ailleurs, à quoi ces exercices les préparent-ils ?

Ces exercices ont une double vocation : entraînement à l’agilité des pilotes, et démonstration politique de la cohésion d’une alliance ou de la détermination à défendre la souveraineté d’un pays. Mais il est vrai que les combats aériens traditionnels sont devenus très rares.

Les puissances en forte croissance comme la Chine développent considérablement leurs forces armées, dont la marine. Quel sera le rôle de cette dernière dans les conflits à venir ?

Fondamental, bien sûr. L’explosion du commerce, l’exploitation croissante des ressources hauturières et à l’avenir des fonds marins, les différends territoriaux en Asie, les pirates et les trafiquants - ces derniers de mieux en mieux équipés - tout ceci rendra les marines incontournables. Sans oublier leur rôle dans la dissuasion nucléaire. La prochaine guerre en Asie commencera peut-être par un accrochage en mer de Chine du sud ou de Chine orientale.

Finalement, la guerre du futur se fera-t-elle derrière un écran d'ordinateur ? Les avions, les hélicoptères, et pourquoi pas les véhicules terrestres, seront-ils tous guidés à distance ?

L’écran d’ordinateur sera partout… y compris sur le champ de bataille. Les soldats de l’infanterie auront un jour chacun leur micro-terminal, multipliant l’efficacité de leur action. Les drones sont appelés à jouer un rôle de plus en plus important. La robotisation terrestre arrivera un jour… Mais on en est encore loin. Et ce n’est pas un robot qui fera le contact avec les populations locales !La place de l’homme restera centrale. On a rien trouvé de mieux qu’un cerveau humain sur place pour réagir rapidement à des situations complexes en prenant en compte tous les paramètres, y compris moraux…

Sommes-nous entrés dans l'ère de la cyberguerre ? Sera-t-il plus stratégique d’infiltrer un système informatique plutôt qu'un territoire "physique"?

Je me méfie de ce terme. Je crois que l’on confond deux choses. D’une part, les actions d’espionnage, de sabotage ou de subversions conduites avec des moyens informatiques, qui ne relèvent pas de la « guerre » à proprement parler. D’autre part, l’importance croissante des moyens cybernétiques dans les opérations militaires. En tout cas on est encore loin des scénarios hollywoodiens. 

Propos recueillis par Gilles Boutin

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