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De Bernard Tapie à Marine Le Pen : pourquoi et comment la France va imploser
©Reuters

Bonnes feuilles

La question n'est plus de savoir si la France va imploser : mais comment et quand cette désagrégation s'imposera... Extrait de "Bernard Tapie, Marine Le Pen, la France et moi", d'André Bercoff, publié chez First (1/2).

André Bercoff

André Bercoff est journaliste et écrivain. Il est notamment connu pour ses ouvrages publiés sous les pseudonymes Philippe de Commines et Caton.

Il est l'auteur de La chasse au Sarko (Rocher, 2011), Qui choisir (First editions, 2012), de Moi, Président (First editions, 2013) et dernièrement Bernard Tapie, Marine Le Pen, la France et moi : Chronique d'une implosion (First editions, 2014).

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Nous nous acheminons lentement mais surement vers l’implosion. Et cela se comprend : Rome n’est plus dans Rome. La quasi-totalite des fondations culturelles, spirituelles, economiques et sociales qui maintenaient le pays, depuis les Trente Glorieuses, dans une harmonie surjouee mais reelle, est en train de s’effondrer avec un bruit sourd qui se repercute d’analyses en etudes, de livres en emissions, de rapports en essais. Surtout, il n’y a pas que sur le papier, les ondes et les ecrans que bruissent les rancoeurs, les indignations et les frustrations. Le quotidien de l’Hexagone est parcouru d’un frisson d’incivilites repercute, enjolive, grossi et deforme de facon telle que la perte des reperes s’en trouve dramatiquement aggravee.

Lire l'interview accordée par André Bercoff à Atlantico à l'occasion de la sortie de "Bernard Tapie, Marine Le Pen, la France et moi" : S’est-il vraiment passé quelque chose en France depuis 1984 ?

Toutes les etudes et expertises se rejoignent. Les Francais sont pessimistes, mefiants, nostalgiques, furax. L’avenir radieux devient une plaisanterie de mauvais gout a l’heure du chomage et des impots, de la baisse du pouvoir d’achat et du brouillard des retraites. Ils le repetent a l’envi : c’etait mieux avant. Il n’y a plus d’autorite, plus d’ordre. Dans certains endroits, on n’est plus chez nous. Il nous faut un homme a poigne. Une personnalite courageuse qui ose sanctionner. De droite ou de gauche, on s’en fout. Pourvu que ca recommence a fonctionner.

Non seulement l’avenir n’est plus ce qu’il etait, mais les jeunes ont l’impression qu’ils ont beaucoup moins de chance de reussir, meme modestement, que leurs parents ; en plus, a qui faire confiance ? Meme les voisins de palier n’ont plus la cote. Si nos sondeurs et autres specialistes des interrogations telephoniques et des entretiens qualitatifs affirment que l’on continue a faire confiance aux PME, a l’armee et a la police, un peu moins a l’instituteur et au maire, ils montrent depuis longtemps le degre de mefiance, voire de mepris, de nos concitoyens pour le Parlement, les medias et les partis politiques. Le ≪ tous pourris ≫ n’est pas nouveau mais il revient de plus en plus souvent.

On le comprend. Le divorce de l’Etat francais avec lui-meme a eu lieu sans qu’on le formule ou qu’on l’explique vraiment. La France fut batie sur un Etat fort, centralise, omnipresent et omnipotent, de Colbert a de Gaulle. Le roi puis le chef montraient la voie, tenaient bon le cap, decidaient, donnaient des ordres et la foule des brillants commis executait dans un ronronnement d’obeissance heureuse. Quand la Republique remplaca la royaute et que l’on fut pour de bon en democratie parlementaire, le mot d’ordre de tous les candidats, a droite comme a gauche, consista a dire au peuple electeur : donnez-moi le pouvoir, que je vous le rende. Chacun savait obscurement que seul le premier membre de la phrase comptait, mais tout le monde fit semblant de croire le contraire. Force est de reconnaitre que, pendant des decennies, la maison fut bien tenue, et ce, parce que l’Etat etait aureole, au-dela des catastrophes et des bonheurs de l’histoire, d’une legitimite aussi justifiee qu’incontestee.

Racontez, grand-pere, racontez ces temps heureux ou l’Etat centralise etait proprietaire de tout : automobiles, mines, transports, energies, banques, assurances. Il battait monnaie, decidait du taux d’inflation ou de l’opportunite d’une devaluation, avait la haute main sur l’economique, le legislatif, le culturel, le juridique, le militaire. Il faisait ce qu’il voulait, pour le meilleur et pour le pire. De Gaulle et dans une moindre mesure Pompidou furent les derniers capitaines du tout-puissant vaisseau amiral.

L’Europe, mal necessaire, fit tout basculer. Petit a petit, surgirent des regles, des oukases, des interdits, des quotas, des lois, a l’echelle d’une union qui commenca a 5 pour en arriver aujourd’hui a 28, et ce n’est pas fini. Voila donc les dirigeants de la nation condamnes a l’assainissement des finances publiques, a la limitation de la dette, a la liberalisation du marche, a l’abandon partiel mais reel d’une partie leurs prerogatives seculaires. Les voici souverains d’un Etat qui ne l’est plus. Ils se revaient Bonaparte ; ils se retrouvent Promethee, enchaines par les gnomes de Bruxelles et de Strasbourg. De plus, la creation de l’euro les privait de toute possibilite de danser avec la monnaie. Ils avaient d’ailleurs, dans ce domaine, legue sceptres et couronnes a la Banque centrale europeenne qui decidait seule desormais du taux et du niveau du nouveau dieu.

Extrait de "Bernard Tapie, Marine Le Pen, la France et moi", d'André Bercoff, publié chez First, 2014. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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