Crise du Covid-19 : nos libertés sont notre bien le plus précieux et le plus fragile<!-- --> | Atlantico.fr
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Philippe Juvin, covid-19, coronavirus, pandémie, France
Philippe Juvin, covid-19, coronavirus, pandémie, France
©Thomas SAMSON / AFP

Bonnes feuilles

Le Professeur Philippe Juvin publie « Je ne tromperai jamais leur confiance » aux éditions Gallimard. En 2020, alors que le monde bascule dans une crise sanitaire sans précédent et que la France paie au prix fort son impréparation, le professeur Juvin, qui est aussi maire, entame le journal du tsunami Covid. Extrait 1/2.

Philippe Juvin

Philippe Juvin

Philippe Juvin est professeur de Médecine, chef du service des urgences, HEGP, Paris. Il est également député des Hauts-de-Seine et conseiller municipal de La Garenne-Colombes.

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Je garderai aussi de cet épisode du Covid la réactivation d’une inquiétude résiduelle  : l’Histoire nous apprend que toute société peut basculer très vite et renier ses valeurs. Les députés élus en 1936 lors du Front populaire n’ont-ils pas voté les pleins pouvoirs à Pétain, offrant la République à la dictature la plus odieuse ? Pendant la crise du printemps 2020, sans comparaison hasardeuse et déplacée, nous avons accepté, et moi le premier, que les libertés individuelles les plus élémentaires, celles de se déplacer, d’aller à l’école, de rencontrer nos familles et amis, soient sacrifiées à l’urgence sanitaire. Avec le recul, nous devons y réfléchir.

La fin justifie-t-elle toujours les moyens ? Toutes les options sont-elles envisageables pour s’en sortir ?

Chacun se souvient du discours du président Macron décrétant que la France était « en guerre » contre ce virus et qu’elle se mettrait en ordre de bataille pour y résister, « quoi qu’il en coûte ». On a beaucoup glosé sur cette formule. Les plus optimistes (et c’était sans aucun doute le sens que lui donnait Emmanuel Macron) y ont vu le rappel que l’État providence né après la Seconde Guerre mondiale serait là pour protéger les malades, les chômeurs et toutes les victimes directes et indirectes de la pandémie. Mais d’autres intuitions me traversent. Et si le « quoi qu’il en coûte » avait été moins généreux qu’il n’en a eu l’air ? Et si le prix de cette « guerre » au virus était dans ce « coût » pour les libertés ? En confinant la population entière, nous aurons sacrifié des malades non soignés, l’économie, l’éducation, la culture mais aussi nos libertés individuelles. Comme pour beaucoup, c’est peut-être la prise de conscience de notre grande vulnérabilité qui restera pour moi une des traces les plus profondes de cette crise. Car les libertés mises en sourdine temporairement se regagnent-elles toujours toutes ? À un moment de l’épidémie, alors qu’on réfléchissait à la mise en place d’une application pour tracer les sujets contacts, le Conseil de l’Ordre des médecins a rappelé le caractère fondamental du secret médical. S’il avait fallu, ne serait-ce que partiellement et temporairement, l’écorner, pour des raisons sanitaires ou d’ordre public, même évidentes, sommes-nous certains que nous l’aurions retrouvé intact plus tard ? Rien n’est moins sûr.

Ce sont les chemins que nous empruntons pour nous sortir d’une crise qui définissent la société d’après. Il faudra y réfléchir si, à l’avenir, la question devait se reposer. Nous devons être très vigilants, veiller à ne pas transiger sur nos libertés : elles sont fragiles, mais elles sont notre bien le plus précieux.

Extrait du livre du Professeur Philippe Juvin, "Je ne tromperai jamais leur confiance", publié chez Gallimard

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